L'Hôtellerie Restauration No 3705

Poser une question, ajouter un commentaire Anastasia Chelini > www.lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR263118 Poser une question, ajouter un commentaire Laetitia Bonnet-Mundschau > www.lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR863035 Les frères Pourcel et leur groupe font face au confinement MONTPELLIER À la tête de trois restaurants en France et de plusieurs autres enAsie, Jacques et Laurent Pourcel s’emploient à maintenir leurs établissements à flot. Une gageure à l’heure où des mesures de confinement s’appliquent un peu partout dans le monde. 7 30 avril 2020 - N° 3705 L’Hôtellerie Restauration E n pleine pandémie, avoir plusieurs affaires se révèle plus complexe que jamais. Les restaurants de Jacques et Laurent Pourcel - Terminal#1, Manita et Carré Mer - totalisent 77 employés annuels (hors saisonniers), désormais au chômage partiel. “ Cette mesure a heureusement permis que tous nos employés touchent 84 % de leur salaire , explique Jacques Pourcel, mais il faut avancer la somme, ce qui suppose d’avoir la trésorerie correspondante. Nous avons de quoi tenir deux mois. Si le confinement dure davantage, ça deviendra très compliqué. On a fait une demande de prêt PGE pour pouvoir alimenter la trésorerie et donc avancer les salaires ; c’est assez long à mettre en place, mais les choses sont en bonne voie. Quant au prêt, il va créer un endettement supplémentaire pour plusieurs années, forcément, on va perdre notre capacité à investir sur l’outil de travail … ” Pour ce qui est du restaurant de plage Carré Mer, ouvert les étés à Maguelone (Hérault), le montage de la struc- ture de cette adresse estivale est déjà bien entamé, mais l’absence de garantie d’ouverture in fine inquiète les deux frères. “ Les trois quarts de la structure, qui doit se refaire chaque été, sont déjà montés, ce qui représente une dépense de 80 000 €. Si finalement, on ne peut pas ouvrir, on aura perdu cette somme.” “On ne peut rien anticiper ni planifier” S’il se réjouit de ce que “ l’Europe protège bien les employés” , Jacques Pourcel regrette que les dates de déconfinement restent floues : “ Ce qui est si diffi- cile actuellement, c’est qu’on ne peut rien anticiper ni planifier.” La réouverture de leur célèbre Jardin des sens, qui se fera au sein de l’Hôtel Richer de Belleval - établissement de luxe à venir dans le centre-ville de Montpellier -, a elle aussi été reportée. “ L’ensemble devait ouvrir en juin ; tout est décalé. On garde pour objectif d’ouvrir en fin d’année, mais cela dépendra de l’avancée du chantier, actuellement à l’arrêt.” En Asie, où les Pourcel sont implantés de longue date, la pandémie dicte là aussi ses contraintes. “ Notre res- taurant au Japon est fermé depuis plus d’une semaine, ceux du Sri Lanka le sont depuis mi-mars, et au Vietnam, on tourne au ralenti. On est autorisé à ouvrir, mais il y a des mesures de sécurité à mettre en place : distances entre les tables, prise de température, port du masque, gel hydro-alcoolique, etc. On essaie également de faire de la vente à emporter, mais la gastronomie ne s’y prête pas vraiment. ” Du côté des États, “ aucune aide n’est prévue ; ni pour les salariés, ni pour les entrepreneurs…” RESTAURATION #coronavirus Notre restaurant au Japon est fermé depuis plus d’une semaine, ceux du Sri Lanka le sont depuis mi-mars, et au Vietnam, on tourne au ralenti.” Laurent (à gauche) et Jacques Pourcel à Montpellier, dans leur restaurant bistronomique Terminal#1. I ls ont commencé dès le 15 mars à préparer des repas à emporter. “C’était vital moralement. Nous vou- lions garder une activité à la fois pour être utiles et appor- ter un moment de bonheur aux gens”, raconte Isabelle Caulier , propriétaire avec son compa- gnon, Alexandre Bousquet , de l’Atelier, restaurant gastro- nomique étoilé situé à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques). Leurs douze salariés sont au chômage. Le chef et sa com- pagne préparent donc seuls, 4 ou 5 jours par semaine, 20 repas le midi et autant le soir - soit une formule complète pour 25 € (10 € pour les enfants). En temps normal, le restaurant assure 40 couverts par service, avec un menu au déjeuner à 35 €, et le soir des menus à partir de 75 €. “ Tout est compliqué. Par internet, la livraison des emballages est trop longue : je me fournis donc chez Metro, mais cela revient cher. Le primeur nous livre des fruits et des légumes, et je me déplace pour tout le reste, car beaucoup de sociétés ne livrent plus. Nos producteurs locaux nous dépannent, je vais aux Docks de Biarritz, je commande du poisson à la criée de Saint-Jean-de-Luz, je passe chez Metro, pris d’assaut…”, détaille Isabelle Caulier. L’impossibilité de faire plus, alors que la demande est là Installé depuis douze ans au Pays basque, le couple a tenu trois restaurants, dont deux étoilés, et compte de nombreux clients fidèles. Le succès est au rendez-vous : “Je reçois des centaines d’ap- pels chaque semaine, et nous refusons 50 clients par jour ! C’est rageant, car nous pourrions travailler beaucoup plus. Nous n’avons pas demandé à nos salariés de revenir. C’est un dilemme : nous avons une responsabilité morale et les directives ne sont pas claires. C’est difficile de s’organiser sans visibilité. Cette crise aurait pu être gérée autrement : les gens font la queue chez le boucher, dévalisent les rayons traiteurs des grandes surfaces… c’est probablement moins risqué de venir chercher un repas dans un restaurant”, soupire Isabelle Caulier. Les clients entrent par deux au plus dans l’établissement, dont la configuration permet d’éviter les contacts rapprochés. Le couple a ouvert son restaurant en juin 2019 et n’a pas de trésorerie. “ La vente de notre formule rapporte 500-600 € par jour, mais les dépenses étant supérieures, c’est une opération zéro. Nous n’avions jamais fait de repas à emporter et je ne pense pas que nous continuerons. Ce sont deux métiers différents. Mais nous sommes conscients que notre salle ne sera pas pleine du jour au lendemain à la fin du confinement”, conclut la restauratrice. À L’Atelier, le succès de la vente à emporter freiné par le manque de personnel et de produits BIARRITZ Leur équipe au chômage, le chef étoiléAlexandre Bousquet et sa compagne, Isabelle Caulier, proposent une formule à emporter à 25 €. Le succès est tel qu’ils sont contraints de refuser 50 personnes par jour. Le chef Alexandre Bousquet et sa compagne, Isabelle Caulier .

RkJQdWJsaXNoZXIy ODk2OA==