L'Hôtellerie Restauration No 3732

HÔTELLERIE Fermeture des restaurants d’hôtel : une décision non justifiée selon l’Umih Reconfinement : ces hôteliers qui font de la résistance I ls naviguent à vue, adoptent les consignes et s’adaptent au contexte, au gré des annonces du Gouvernement et des prises de parole du président de la République. En moins de quinze jours, les hôteliers sont passés du couvre-feu au reconfinement. Les plus fragiles ont préféré fermer, les plus agiles font preuve d’imagination pour mainte- nir une activité, une dyna- mique au sein d’équipes réduites, un accueil de qua- lité pour les voyageurs qui viennent encore. “Tant que nous avons des clients, nous ne fermons pas” , confie-t-on dans un palace parisien où, la nuit du 2 novembre, une seule cliente a dormi. “Le coût d’une fermeture et d’une réouver- ture, c’est exorbitant” , souligne Romée de Goriainoff , cofondateur de l’Experimental Group, dont les six hôtels tournent, sans baisse des tarifs. Mais avec des taux d’oc- cupation variables selon les destinations : à Venise, il flirte avec les 60 % - contre 80 % en octobre 2019 -, mais à Paris, le reconfinement vient plomber la reprise qui s’amorçait depuis septembre. Les chambres se remplissent avec des voyageurs récupérés d’établissements qui ont baissé le rideau et un petit volume de clientèle d’affaires. C’est le cas aussi dans les MOB de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) et Lyon (Rhône), ainsi qu’au Monte Cristo à Paris (V e ), établisse- ment du groupe Les Hôteliers Impertinents. “Le Monte Cristo a déjà 28 % de taux d’oc- cupation cette semaine. Notre clientèle cor- porate est au rendez-vous et nous récupérons plusieurs clients des hôtels fermés, ce qui nous permet de tenir pour le moment” , explique Florian Bitker , directeur des opérations. À cela s’ajoute “une masse salariale adaptée à la situation, un point quotidien sur les besoins en présence des chefs de service, une agilité des équipes et les aides que le Gouvernement met à disposition de notre profession.” “Il faut se réinventer du jour au lendemain” “On résiste et on pense aux hôteliers indépen- dants qui avaient commencé à relever la tête avant le reconfinement.” Cyril Aouizerate , fondateur du concept MOB Hotel, ne com- prend pas que l’on ferme des restaurants, y compris ceux des hôtels, “alors que nous avons suivi tous les protocoles sanitaires à la lettre”. Résigné, il ne décolère pas pour autant. Même amertume du côté de Romée de Goriainoff , remonté contre les politiques : “Il ne nous comprennent pas !” Alors, il fait partie de ceux qui poussent au maximum la personnalisation de cer- taines prestations, à l’instar du room service. “On fait du sur mesure” , dit-il. À l’hôtel Fauchon (VIII e ) aussi, le client peut commander “ce qui lui fait envie” , affirme Jérôme Montanteme , directeur géné- ral de l’établissement. “On oublie la carte et les menus. On tend vers l’exclusif, en partant du principe que, chez nous, tout devient possible” , poursuit-il. Y compris la vente à emporter de plats proposés sur une version courte de la carte du Grand Café Fauchon, qui vient de fermer, reconfinement oblige. “Ces temps-ci, il faut se réinventer quasiment chaque semaine, voire du jour au lendemain” , commente encore Jérôme Montanteme. Un avis partagé par Emmanuel Sauvage , face aux caméras de CNews. Le cofondateur et directeur général du groupe Evok main- tient ouverts ses quatre hôtels parisiens, avec ce mot d’ordre : “Confinez-vous chez nous !“ Les clients ont accès au room service et à tous les équipements de chaque établissement. Quant à la clientèle extérieure, elle peut venir acheter des pâtisseries à la boutique du Brach (XVI e ), commander un panier apéro, un panier prêt à cuisiner avec vidéo du chef pour réussir la recette, ou encore suivre, sur Instagram, les concerts organisés trois fois par semaine au Nolinski (I er ). À l’heure du port dumasque et du gel hydro-al- coolique, les hôteliers encore sur le pont agissent pour qu’une chambre, une suite, un lobby ne soient ni anxiogènes, ni semblables à un hôpital. Cyril Aouizerate, défenseur des circuits courts et d’une écologie sociale, sug- gère en plus de “confiner les chaînes d’info en continu et de rouvrir les librairies : ça fera du bien au pays !” À l’heure des nouvelles restrictions sanitaires, tous les hôtels n’ont pas fermé leurs portes. Certains profitent de la période pour expérimenter de nouvelles prestations, voire les personnaliser jusqu’à les rendre exclusives. Le tout dans un climat d’incertitude, régi par des protocoles renforcés. Laurent Duc , président d’Umih hôtellerie, ne comprend pas pourquoi les restaurants d’hôtels doivent fermer alors qu’une partie de la restauration collective reste en activité. “Cette décision hors sol met en péril encore plus notre activité déjà très très réduite par ce deuxième confinement. Cette décision ne se justifie en rien par des raisons sanitaires et c’est encore une stigmatisation de notre profession puisque les cantines des écoles, des internats et des prisons, notamment, peuvent, elles, rester ouvertes.” L’organisation professionnelle estime que le maintien de l’activité restauration au sein des hôtels, destinée à la clientèle des hôtels uniquement, serait plus judicieux. “En effet, en faisant déjeuner ou diner notre clientèle au sein des établissements, la clientèle n’a pas besoin se déplacer dans la rue et n’a qu’à reprendre un escalier ou un ascenseur pour rejoindre sa chambre.” Les arguments de l’Umih • L’enjeu absolu est le respect du confinement. Or, ce dernier est parfaitement respecté avec le maintien des ouvertures des espaces de restauration des hôtels. • Peu d’hôtels disposent des moyens de mettre en place l’activité de room service qui est loin d’être la norme dans les hôtels, d’autant qu’elle n’est obligatoire qu’à compter du 5 étoiles dans le classement hôtelier. • Contrairement au service en chambre, le service dans les salles de restauration permet d’appliquer pleinement le protocole sanitaire en vigueur pour les restaurants. Ce protocole a fait ses preuves puisqu’aucun cluster n’a été identifié dans les établissements. “Le coût d’une fermeture et d’une ouverture est considérable, en termes de management et de logistique”, explique Cyril Aouizerate , fondateur du concept MOB Hotel. Poser une question, ajouter un commentaire Anne Eveillard > www.lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR065223

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