L'Hôtellerie Restauration No 3740

Avec les périodes de restriction, voire de fermeture complète, nombreux sont les exploitants qui se retrouvent dans l’impossibilité de payer la totalité de leur loyer commercial. Risquent-ils l’expulsion ou la saisie-attribution des loyers si le bailleur le demande ? Risque-t-on l’expulsion pour non-paiement du loyer commercial ? Une expulsion demandée par le bailleur d’un CHR qui n’a pas payé son loyer pendant le premier et le second confinements ne devrait pas aboutir. En effet, elle devrait être neutralisée par l’effet de plusieurs mesures législatives. Si l’ordonnance n° 2020-316 du 25mars 2020 ne règle pas le sort des loyers et des charges pendant la période du premier confinement, elle paralyse toutefois le pouvoir de sanction des bailleurs en cas défaut de paiement pendant la En cas de difficulté de paiement du loyer, il importe de se rapprocher de son bailleur pour échanger sur les difficultés rencontrées – et d’en justifier même si elles sont d’évidence – avant d’en suspendre le paiement. En ne réglant pas le sort des loyers et charges pendant la période de fermeture administrative – à l’exception des mesures fiscales prises pour encourager les bailleurs à consentir des franchises – le Gouvernement a entendu privilégier la médiation, en ayant le cas échéant recours au médiateur des entreprises. Qu’elle aboutisse ou non, une telle démarche est importante puisque, au-delà des divergences sur les moyens juridiques avancés au soutien de la contestation des loyers (force majeure, imprévision, perte partielle de la chose louée, exception d’inexécution en raison du manquement du bailleur à l’obligation de délivrance), elle semble communément prise période allant du 12mars 2020 à la fin de l’état d’urgence sanitaire (fixée au 10 juillet 2020), augmentée de deux mois pour les entreprises éligibles au fond de solidarité (soit jusqu’au 10 septembre 2020). Pour celles qui ne le seraient pas, elles pourraient chercher à se prévaloir d’une ordonnance distincte du 25mars 2020 (n° 2020-306), mais son applicabilité demeure contestée et l’issue incertaine. Un dispositif de protection À la suite du second confinement, la loi n° 2020- 1379 du 14 novembre 2020 a pris le relai en prévoyant pour toutes“ personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique [critères d’éligibilité prévus par décret NDLR*] affectée par unemesure de police administrative [une fermeture administrative par exemple]”, qu’elles seront encore protégées des initiatives de leurs bailleurs, dont les plus graves conduisant à l’expulsion. en considération par les juges sur le terrain de la bonne foi au point de faire échec à la demande en paiement des bailleurs qui en aurait manqué. Sur le fondement de ce principe d’ordre public prévu à l’article 1104 du Code civil, les juges ont pu rappeler au bailleur que “ les parties sont tenues, en cas de circonstances exceptionnelles, de vérifier si ces circonstances ne rendent pas nécessaire une adaptation des modalités d’exécution de leurs obligations respectives” (voir par exemple les deux décisions du tribunal judiciaire de Paris du 26 octobre 2020). La procédure de conciliation demeure confidentielle Si les locataires doivent souffrir de bailleurs récalcitrants, ils peuvent encore se placer sous la protection du tribunal de commerce – ils y Ce dispositif est entré en vigueur rétroactivement à compter du 17 octobre 2020 et le restera jusqu’à deux mois à compter du jour où la mesure de police administrative aura pris fin, soit deux mois après la réouverture des commerces. Pour les loyers et charges qui échapperaient aux périodes ainsi protégées, le juge pourra toujours suspendre les effets de la clause résolutoire délivrée par le bailleur pour obtenir l’expulsion de son locataire, en accordant des délais de paiement pouvant aller jusqu’à 24mois, conformément aux articles L145-41 du code de commerce et 1343-5 du code civil. * Dont le dernier n° 2020-1620 du 19 décembre 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation. sont d’ailleurs vivement invités par les pouvoirs publics – qui, dans le cadre d’une procédure de sauvegarde ou de de redressement judiciaire, viendra geler la dette locative. Conscient que les commerçants pourraient être réticents à recourir à une telle procédure publique (inscrite au KBis), le législateur en a étendu le bénéfice à la procédure de conciliation qui, ouverte sur simple requête du dirigeant au tribunal de commerce, demeure quant à elle confidentielle. La meilleure stratégie est à rechercher d’abord dans la négociation, amiable (directement ou par l’intermédiaire d’un conseil ou d’un médiateur) ou contrainte (procédure de conciliation), le cas échéant dans une procédure collective (sauvegarde ou redressement) et enfin, dans le contentieux, dont l’issue comme la durée peut inviter le bailleur à concéder pour mieux recouvrer. Face au non-paiement du loyer commercial, le bailleur peut vouloir faire jouer la clause résolutoire et introduire une action en justice pour obtenir l’expulsion ou la saisie-attribution des loyers. Que faire pour éviter d’en arriver là ? En cas d’impossibilité de payer son loyer commercial, quelle est la meilleure stratégie ? 3 19 février 2021 - N° 3740 L’Hôtellerie Restauration Tiphaine Beausseron avec Alexandra Marinakis, Made Avocats (amarinakis@madeavocats.com) © GETTYIMAGES Loyer et impayés : comment se défendre auprès de son bailleur ? Téléchargez un modèle de lettre (format PDF) rédigé par Baptiste Robelin , avocat chez Novlaw :

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