L'Hôtellerie Restauration No 3755
6 L’Hôtellerie Restauration N° 3755 - 17 septembre 2021 LES TEMPS FORTS DE LA QUINZAINE Étendu aux salariés d’établissements qui reçoivent du public, le pass sanitaire fait son entrée au sein des équipes hôtelières et de restauration. Directeurs et gérants doivent faire preuve de pédagogie. Certains se préparent depuis longtemps, d’autres se calent au gré des annonces du Gouvernement. Ils racontent. Pass sanitaire : comment les salariés l’adoptent et s’adaptent T ous les cas de figure sont pos- sibles. Entre ceux qui se séparent d’un collaborateur récalcitrant et ceux qui expliquent, écoutent et prennent le temps, l’extension du pass sanitaire aux salariés du secteur de l’hôtellerie et de la restauration se met en place. La phase de rodage et de tolé- rance a pris fin et, d’un établissement à l’autre, on fait face. Alexis Memmi , gérant du restaurant Mabrouk, à Paris (III e ), se félicite : ses sept salariés se sont tous fait vacciner, de façon spon- tanée. “J’ai créé un groupe WhatsApp et tout le monde a envoyé son pass sani- taire. Je les ai vérifiés. C’était simple et efficace.” Toutefois, lorsque son manager a refusé de se faire injecter les deux doses, Alexis Memmi a préféré “la séparation d’un commun accord” . Certes, les tests toutes les 72 heures permettent d’échapper aux piqûres, mais ils sont contraignants pour les salariés et nécessitent d’être contrôlés au sein de l’hôtel ou du restaurant. Catherine Pasquet en sait quelque chose : cogérante du restaurant Osé, à Angers (Maine-et-Loire), elle doit faire avec deux salariés non vaccinés, sur les onze que compte son établissement. “Ils sont prêts à perdre leur travail pour échapper au vaccin. Pour le moment, ils renouvellent leur test tous les trois jours. Mais que va-t-il se passer, mi-octobre, lorsque les tests seront payants ?” Même interrogation de la part de Nathaniel Beaulieu , directeur du restaurant de l’hôtel Maison Bréguet, à Paris (XI e ), où trois salariés – sur 40 au total - renouvellent, eux aussi, leur test toutes les 72 heures. “Nous avons informé, expliqué, mais jamais rien forcé”, souligne Emmanuelle Le Vaillant , directrice de Maison Bréguet. Q L’un des salons du Grand Véfour transformé en salle de vaccination La majorité des hôteliers et restaurateurs ont anti- cipé la nouvelle contrainte, dès les annonces d’ Em- manuel Macron, fin juillet. Cela leur a permis dans un premier temps de faire preuve de pédagogie avec les équipes, puis de s’organiser. Au Grand Véfour, à Paris (I er ), le premier maître d’hôtel, Flavien Develet , a contacté une pharmacie et un médecin. Les salariés qui n’avaient reçu encore aucune dose pouvaient se rendre à leur convenance dans la première. Quant au second, il a transformé l’un des salons du Grand Véfour en salle de vaccination pour pratiquer la deuxième injection. Résultat : la cinquantaine de personnes qui travaillent aujourd’hui au Grand Véfour, métamorphosé depuis le prin- temps en brasserie chic avec terrasse XXL, dispose d’un pass sanitaire, y compris les cuisiniers. Car s’ils ne sont pas tous au contact de la clientèle, “ils peuvent être amenés à voyager, à se déplacer dans des lieux publics, notamment dans le cadre de leur travail”. Même logique au Château de Fonscolombe, près d’Aix-en-Provence (Bouches-du- Rhône), où la cuisine est “un lieu de passage pour les équipes F&B” , détaille Vincent Bergmann , directeur de l’établissement. “On contrôle aussi le pass pour celles et ceux qui travaillent derrière les fourneaux. Mais je reste à l’écoute pour éviter tout mécontentement.” Q “Nous n’avons pas eu de front antivax” “En proposant la vaccination, nous sommes entrés dans une forme d’intimité avec nos salariés.” Jérôme Tourbier , directeur des Sources de Caudalie, a ainsi ouvert à ses équipes deux cessions de vaccination, de 22 créneaux chacune. Celles-ci ont fait carton plein. Avec une vague de premiers volontaires, tous issus du back-office et donc pas au contact direct avec la clientèle. “Nous n’avons pas eu de front antivax” , poursuit-il. Pas de conflit non plus ou de résistance au sein du groupe Maison Albar Hotels. Son patron, Grégory Pourrin , parle d’anticipation, de “très bonnes réactions de la part des salariés” et d’un esprit d’équipe “renforcé” . “Nous avons désormais la possibilité de redémarrer et le personnel y est très sensible” , souligne-t-il. Car les périodes de fer- meture ont laissé des traces et des angoisses. Et comme le rappelle Grégory Pourrin, “le pass sanitaire, ce n’est pas la vaccination obligatoire”. “Mais on a vu qu’il allait permettre de prendre soin des autres, collègues et clients, et cela en a encouragé plus d’un à se faire vacciner.” Jérôme Tourbier, quant à lui, parle du “bout du tunnel” et d’endroits “sûrs” dans les hôtels et restaurants, “à l’image du respect de la chaîne du froid” . Poser une question, ajouter un commentaire Anne Eveillard > www.lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR668424 En proposant la vaccination, nous sommes entrés dans une forme d’intimité avec nos salariés.” Lire aussi les questions-réponses sur le pass sanitaire en entreprise p. 26 Jérôme Tourbier, directeur des Sources de Caudalie La vaccination rassure les recruteurs “Certains candidats à des postes dans l’hôtellerie ou la restauration refusent la vaccination. Une fois recrutés, ils présentent un test toutes les 72 heures, ce qui est compliqué pour leurs employeurs, qui ont parfois l’impression de ‘fliquer’ leurs salariés. En outre, cela peut complexifier l’organisation des équipes, le planning, les ressources humaines… Si bien que certains employeurs comptent procéder aux sanctions très bientôt.” C’est le constat récent de Julia Rousseau , consultante en ressources humaines au sein d’Ethique RH. Spécialiste du secteur des CHR, elle reconnaît que “certains employeurs préfèrent recruter d’autres profils pour des questions organisationnelles et pour limiter les risques”. Elle raconte : “L’un de mes candidats a été fortement pressenti par une très belle enseigne. Lorsqu’il a reçu sa promesse d’embauche, il avait pour obligation d’être vacciné. Malheureusement, le candidat a eu quelques soucis de santé par le passé et son médecin traitant reste prudent sur cette vaccination par rapport à ses antécédents médicaux. Résultat : il n’a pas eu le poste.” Pas de réfractaire au pass sanitaire parmi les salariés du Maison Albar Hotels Le Vendome, à Paris (IX e ). © DR © DR E N V I D É O
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