L'Hôtellerie Restauration No 3756
9 1 er octobre 2021 - N° 3756 L’Hôtellerie Restauration Depuis le confinement, les initiatives locales proposant la livraison de repas à vélo ont essaimé. Ces plateformes alternatives, souvent créées par des coursiers ayant auparavant travaillé pour les géants du secteur, se veulent plus éthiques et plus respectueuses, tant pour les livreurs que pour les restaurateurs. R esto.Paris, Eatic, Bicloo, Breizh Vélo, Beefast, les Frères Toques, Sacré Armand, Sicklo, Traboulotte… partout en France, des coursiers à vélo s’organisent pour proposer une alternative aux grandes plateformes de livraison de repas. “J’ai travaillé pour Uber Eats et Deliveroo, et cela ne me ressemblait pas. Tout le monde est perdant : les clients, la planète, les coursiers, les restaurants”, résume Guillaume Blanchet , fondateur de Naofood à Nantes (Loire-Atlantique), créé fin 2019. Comme lui, beaucoup dénoncent le manque de transparence de ces géants, les conditions de travail dégradées, les agressions, la concurrence entre les coursiers. Ces entrepreneurs, trentenaires pour la plupart, inventent donc les modèles qui leur conviennent, basés sur le respect de l’environnement et de l’humain, la solidarité, la qualité. Reflet de ces valeurs, ils ont choisi (ou visent) le statut de Scop (société coopérative et participative). “Nous voulions un système plus sain et plus vertueux, en favorisant des coursiers qui connaissent leur métier, et des restaurants de qualité”, raconte Valentin Campana , cofondateur de Kooglof à Strasbourg (Bas-Rhin), lancé en novembre 2020. Kooglof collabore avec une vingtaine de commerçants (restaurants et commerces de bouche). “Ceux qui nous contactent partagent nos valeurs. Notre offre recense une majorité de restaurants indépendants, elle est différente de celle des grandes plateformes”, ajoute-t-il. Naofood référence de son côté une cinquantaine de restaurants. “Nous ne voulons pas un gros décalage entre le nombre de clients et le nombre de restau- rants proposés, afin qu’ils restent visibles dans notre offre. La plu- part sont venus vers nous. Nous choisissons nos restaurants par- tenaires selon plusieurs critères : être dans la bonne zone, sympa, local. L’humain compte beaucoup. Et nous goûtons leurs plats en mode livraison !”, sourit Guillaume Blanchet. Un fort développement lors des confinements Lors du second confinement, Naofood enregistrait en moyenne 220 commandes à la journée, avec un pic à 360. De 9 coursiers, l’association est passée à 60. Aujourd’hui, entre 20 et 30 cour- siers roulent chaque semaine, pour livrer 100 commandes à la journée dans un rayon de 3,5 km. Pendant le confinement, par solidarité avec les restaurateurs, Naofood a réduit sa commission de 24 % à 15 %. Sur chaque commande, 2 % du montant sont reversés à une association. Chez Kooglof, la com- mission est dégressive : pour un panier moyen à 35 €, elle sera de 23 % ; pour un panier à plus de 70 €, à 17 %. C’est moins que les grandes plateformes (25-35 %). La livraison coûtera au consommateur 4 € (dans un rayon de 10-15 minutes autour du restaurant) ou 6 € (dans un rayon de 20 minutes). “Nous privilégions la qualité “Un acteur local et moins cher !” Antoine Delahaye, gérant du restaurant Fuso à Nantes, est l’un des premiers à avoir travaillé avec le livreur Naofood. “Avec eux, l’avantage, c’est l’humain. Nous connaissons tous les livreurs, et ils sont 100 % à vélo. Un temps, nous avons arrêté de travailler avec Uber Eats car les livreurs, à scooter, ne respectaient pas les consignes de sécurité dans notre petite rue, remplie de terrasses. Nous continuons d’utiliser les plateformes d’Uber Eats, Deliveroo et Just Eat pour la visibilité qu’elles nous apportent, mais sur ma devanture, j’ai uniquement mis Naofood en avant. Toutes nos commandes en interne - pour des entreprises, par exemple - passent par cet acteur local, qui est en outre moins cher ! Lors du troisième confinement, il représentait 50 % de notre chiffre pour la vente en livraison. Nous échangeons régulièrement. Nous avons par exemple participé au développement de l’application de Naofood, en apportant notre regard de restaurateurs. Nous avons ouvert un autre restaurant à Angers et nous passons par les Frères Toques, un acteur local également. Pour moi, c’est un vrai plus !” Poser une question, ajouter un commentaire Laetita Bonnet Mundschau > www.lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR968180 J’ai travaillé pour Uber Eats et Deliveroo, et cela ne me ressemblait pas. Tout le monde est perdant : les clients, la planète, les coursiers, les restaurants.” Guillaume Blanchet du service avec des plats livrés chauds, donc on ne va pas plus loin”, justifie Valentin Campana. Kooglof, comme de nombreux autres, utilise l’application développée par CoopCycle, une fédération de coopératives de livraison à vélo. Les Coursiers bordelais, eux, facturent aux restaurateurs la course à 7 € HT. À eux ensuite de répercuter - ou pas - le prix de la course à leurs clients. Quant aux coursiers, ils sont auto- entrepreneurs – payés à la course ou à l’heure (15 € brut de l’heure chez Kooglof) - ou bien salariés lorsque c’est possible (au smic, avec quelques avantages et, par exemple, huit semaines de congés payés chez les Coursiers bordelais). Un modèle loin des pra- tiques d’Uber Eats et consorts, qui surveillent du coin de l’œil ces petits nouveaux, encore modestes, mais ouvrant d’autres perspectives. Les coursiers de Kooglof, à Strasbourg. Guillaume Blanchet et d’autres coursiers de Naofood, en pleine action. Livraison à vélo : des alternatives locales plus éthiques
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