L’une des principales difficultés des locataires-gérants est la non-conformité de l’établissement ou de l’un de ses éléments lors de leur entrée dans les lieux. Un état des lieux des locaux, du matériel et des installations doit être dressé à l’entrée dans les lieux. Le locataire-gérant devra également faire attention aux clauses du contrat qui déresponsabilisent le propriétaire du CHR. La clause selon laquelle le locataire-gérant prend le fonds dans l’état où il se trouve n’exonère pas le bailleur de son obligation de respecter les dispositions et obligations légales, à savoir d’assurer une délivrance de la chose conforme d’une part, mais également un caractère paisible de la chose conformément à la loi et aux dispositions du bail. C’est en principe le cas, par exemple, d’un restaurant qui dispose d’une hotte sans évacuation de l’air conforme aux règles et qui trouble la bonne exécution du service. Il en va de même pour la non-conformité d’autres éléments (chambre froide, installations électriques et de chauffage…). Parfois, le locataire gérant se dispense seul de régler les redevances du fait de la non-conformité des locaux. Il peut décider de quitter les locaux en laissant une dette de redevances à régler. Cette attitude est cependant une solution d’échec, débouchant sur un contentieux devant les juges. Il est bien sûr préférable que le locataire-gérant reste et puisse exploiter correctement le fonds. Il pourra contraindre le propriétaire du fonds à réaliser à sa charge les travaux de conformité qui lui incombent. Soit une clause le prévoit dans le contrat de gérance soit, en l’absence de clause, le propriétaire reste tenu d’une obligation de délivrer une chose conforme et de lui assurer le caractère paisible de sa jouissance. Pour se défendre, le locataire-gérant peut obtenir amiablement du propriétaire la mise en conformité du fonds. S’il ne réussit pas, il peut agir en référé pour obtenir la réalisation des travaux, avec au besoin préalablement la désignation d’un expert, l’autorisation de consigner les redevances et la réduction provisoire de leur montant en attendant le rapport de l’expert et la décision judiciaire. MAÎTRE SOPHIE PETROUSSENKO ‘Fonds de commerce : création, achat, reprise et vente’ 13 novembre 2021 - N° 3759 L’Hôtellerie Restauration 73 NON CONFORMITÉ DES LOCAUX COMMENT AGIR ? Après, le cas échéant, dépôt du rapport d’expertise concluant à la non-conformité des matériels et installations destinés à l’exploitation du fonds qui ne répondaient pas aux normes de sécurité devant être respectées par un établissement recevant du public, le locataire-gérant peut : • assigner en justice dans un délai très rapide, quelques mois, le propriétaire en nullité ou en résolution du contrat de location-gérance, en restitution du dépôt de garantie et du trop-perçu de redevances ainsi qu’en paiement de dommages-intérêts pour manque à gagner et préjudices subis ; • ou simplement solliciter la mise en conformité de l’établissement ou de l’un de ses éléments, ou des dommages-intérêts pour préjudices dont celui d’exploitation. Ces possibilités d’actions et de recours, qui peuvent être exercées dans un délai de droit commun de cinq ans (CA Poitiers, 5 juin 2018, n° 17/03645), sont donc de nature à dissuader les propriétaires de mettre en location-gérance, même par imprudence, des fonds non conformes. Attention toutefois à bien analyser l’origine de la non-conformité de l’établissement aux réglementations applicables ! Si le locataire-gérant arrête de régler ses redevances alors qu’il est responsable des manquements, il s’expose à un commandement de payer ses redevances et charges visant la clause résolutoire ou en résiliation du contrat, et son expulsion. Ainsi, un locataire-gérant ne peut pas opposer au propriétaire du CHR un arrêté de fermeture administrative pour ne pas avoir à payer ses redevances et charges, dès lors que l’arrêté a été rendu en raison de risques sanitaires qui lui sont imputables. Il est donc indispensable de bien rédiger les clauses du bail relatives aux charges et travaux imputables au locatairegérant. Celui-ci comme le propriétaire du fonds de commerce devront être vigilants à ce sujet et, si possible, confier la rédaction de leur contrat à un avocat spécialiste des CHR.
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