L'Hôtellerie Restauration No 3785

Dans la bâtisse principale du XVIIe siècle, une première salle à l’univers tamisé et cosy, puis une seconde, extension moderne suggérée par Mario Botta, s’intégrant parfaitement dans les vignes grâce à sa verrière. © AGISIMOES&RETOGUNTLI SECRETS DE CHEF Jérôme Schilling : “Je suis un cuisinier-vigneron” L’Hôtellerie Restauration : Quand avez-vous su que vous vouliez devenir cuisinier ? Jérôme Schilling : J’ai toujours été attiré par la nourriture. Enfant, dès le déjeuner, je m’inquiétais de savoir ce qu’on allait manger le soir. Quand je rentrais de l’école, j’allais directement dans la cuisine. J’aidais ma mère. J’allais aussi dans le jardin cueillir les légumes. J’ai toujours aimé ça. Dès la fin de la troisième, à 14 ans et demi, je suis parti en apprentissage dans un restaurant près de chez moi où mes parents allaient régulièrement manger le plat du jour le midi. J’y avais fait mon stage de troisième. Le chef m’avait prévenu que je ne verrai plus mes copains et copines le samedi et le dimanche. Je lui ai répondu que suite page 36 BOMMES La cuisine du chef s’épanouit dans le domaine viticole Lafaurie-Peyraguey. Une osmose entre le vin et la cuisine gratifiée de 2 étoiles Michelin, dans un écrin à la hauteur de son nom : le restaurant Lalique. Nadine Lemoine cela ne changeait pas ma décision. J’étais déterminé. Mes parents l’ont tout de suite accepté. Mon apprentissage s’est très bien passé, dans une petite équipe où l’on m’a vite fait confiance. Comment définiriez-vous votre cuisine ? C’est une cuisine sensible, délicate dans ses formes, couleurs, saveurs et parfums, dans le respect du produit. J’aime beaucoup l’art, les tableaux avec des couleurs, des formes géométriques, des parallèles, des perpendiculaires. On crée la carte en équipe, avec mon chef adjoint et mes deux sous-chefs, pour les associations de goûts et les assemblages. Quand on a tous les produits, l’alchimie prend forme lors du dressage. J’aime que chaque chose ait sa place selon sa forme et son angle de vue. Quelle est l’influence du domaine viticole et de ses vins sur votre cuisine ? Depuis que je suis au Château Lafaurie-Peyraguey, je suis cuisinier-vigneron. Nous sommes dans un domaine viticole, premier grand cru classé de sauternes. Nous sommes le seul château du Bordelais à être clos de murs avec ses 10 hectares. Nous sommes plongés dans les vignes. Dès mon arrivée, j’ai participé aux vendanges, aux assemblages et aux dégustations. Cela m’a permis de mieux comprendre le vin que l’on produit afin de créer une osmose avec ma cuisine. Je réalise mes assiettes comme si on réalisait un grand vin de sauternes, avec la même exigence et lamêmemaîtrise technique. Un vigneron cherche toujours à retranscrire la typicité et le terroir. En tant que cuisinier, on retranscrit la qualité et la complexité du produit dans l’assiette. Dans un autre endroit, je ne ferais pas la même cuisine. Je me suis imprégné du château et du lieu. 34 L’Hôtellerie Restauration N° 3785 - 12 novembre 2022

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