L'Hôtellerie Restauration No 3790

Pascal Barbot : “Le plus compliqué, c’était de ne pas savoir quand on pourrait rouvrir” PARIS L’Astrance a quitté la rue Beethoven pour la rue de Longchamp, en lieu et place du Jamin. L’ambitieux projet initié en 2019 a multiplié les contretemps et l’ouverture officielle n’a eu lieu que le 31 décembre 2022, avec un menu qui reprenait des plats de l’ancien restaurant doublement étoilé et des assiettes inédites. Pascal Barbot, en cuisine, et Christophe Rohat, en salle, peuvent enfin reprendre le fil de leur histoire. L’Hôtellerie Restauration : Pourquoi avoir déménagé ? Pascal Barbot : J’avais passé vingt ans dans une petite cuisine de 16 m² et je ne me voyais pas repartir pour encore vingt ans alors que je me sentais un peu limité. L’idée était d’avoir plus de confort pour les clients et d’apporter aussi de meilleures conditions de travail pour nos équipes. C’était très important. Aujourd’hui, la cuisine fait 70 m². On a tout ce qu’il faut. Tout est électrique, la température est confortable pour travailler, c’est ergonomique... On était quinze et quasiment trente aujourd’hui : douze cuisiniers, cinq officiers, douze personnes en salle et on est passé de 24 couverts à 40-45. On a aussi un petit salon privé sublime avec cuisine attenante qui peut accueillir entre 6 et 14 personnes. C’est enthousiasmant parce que l’on voit que le restaurant que l’on a imaginé et réalisé a un très joli potentiel et nous avons de bons retours. Avez-vous changé l’offre ? On a toujours les deux menus Astrance surprise au déjeuner [125 € ou 175 € avec vin surprise] et au dîner [285 € ou 395 € avec vin surprise] et on a ajouté la carte, car aujourd’hui, on a les équipes et l’outil pour proposer cette alternative, qui répond à une demande des clients. Il y a très peu de plats que l’on faisait avant hormis la Saint-Jacques, moelle, huître tiède et beurre de kombu ou encore la Soupe au pain très grillé. Je n’ai pas mis la Tarte foie gras mais les clients la demandent. Pour l’instant, 80 % des clients prennent le menu. C’est encore un peu trop tôt pour avoir du recul. En ce moment, je suis très porté sur le plateau de fruits de mer, que je revisite selon les arrivages : bulot aux algues, praire avec un jus d’agrume et piment… Ce sont des choses que l’on peut faire aujourd’hui, car j’attache une grande importance à la température de service des plats. Les fruits de mer sont servis sur de la glace, très frais, et c’était impossible rue Beethoven. Il y a beaucoup de choses que je vais pouvoir faire maintenant ! C’est l’un des moteurs du déménagement. Avez-vous rencontré des problèmes de recrutement ? On a la chance d’avoir une équipe extrêmement soudée et motivée avec nous. Ils se sont organisés avec des collègues restaurateurs ou ont accepté de travailler différemment pour pouvoir nous rejoindre le jour où le restaurant allait ouvrir. On a cette chance d’avoir des jeunes avec nous mais aussi de retrouver des gens qui nous accompagnent depuis dix-neuf ans. L’Astrance, c’est une grande famille. Avez-vous souffert de la hausse du coût de l’énergie et des matières premières ? Nous connaissons les mêmes problèmes que nos confrères. Est-ce que cela va changer notre façon de cuisiner ? Nous réfléchissons. Par rapport à la rue Beethoven, entre le coût de l’énergie et l’inflation, on a dû augmenter les prix. On n’a pas eu le choix. Une question, un commentaire sur cet article ? lhotellerie-restauration.fr/QR/RTR873263 Nadine Lemoine Christophe Rohat et Pascal Barbot, le duo de l’Astrance soudé depuis vingt-cinq ans. Fermeture en 2019, réouverture en 2022 : et pendant ce temps ? Pascal Barbot raconte : “L’établissement date de 1970. Le restaurant Le Jamin existait dès l’inauguration du bâtiment. Joël Robuchon l’a racheté en 1982 et il a écrit une grande partie de son histoire ici, jusqu’en 1996. Il avait créé un restaurant extraordinaire à l’époque, au niveau des normes, mais en quarante ans, il n’y avait jamais eu de gros travaux. Il a fallu vider et curer le restaurant : 34 tonnes de gravats ont été sortis. On a eu des complications pendant les travaux et il a fallu trouver des solutions : le manque de matériaux, des cas de Covid… qui ont paralysé le chantier. Le plus compliqué, c’était de ne pas savoir quand on pourrait rouvrir. L’incertitude est ce qu’il y a de plus difficile à vivre. On l’a vécue pendant trois ans mais on n’a pas baissé les bras. Il fallait survivre car on a une entreprise. On a fait de la vente à emporter, des démonstrations comme à Taste of Paris, plus d’un mois au Japon pour un restaurant, pour une marque de luxe française, un petit restaurant au Maldives, des actions avec les gouvernements japonais et sud-coréen... Puis il y a eu l’année en résidence au restaurant parisien Cèna, qui a été une très belle aventure. Je n’avais plus fait de carte depuis vingt ans. C’était un joli challenge et ça m’a permis de réfléchir et d’avoir des idées pour la réouverture. Un très bel exercice.” “On a vécu dans l’incertitude pendant trois ans, mais on n’a pas baissé les bras” © ANNE-EMMANUELLE THION La capacité de l’Astrance a doublé, et peut accueillir jusqu’à 45 couverts. LES TEMPS FORTS DE LA QUINZAINE

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