La vente à emporter s’impose comme un nouveau mode de consommation, qui plaît à une clientèle de proximité : des travailleurs cherchant un repas prêt rapidement, des habitués résidant dans le quartier... Pour certains restaurateurs, la vente à emporter ne représente qu’une part minime de leur chiffre d’affaires, mais ils tiennent à garder ce service. Dans les enseignes vegan Vélicious Burger et Vegeman, fondées par Cédric Mincato à Strasbourg (Bas-Rhin), le click & collect compte pour 3 à 5 % des ventes. “C’est peu mais ce sont souvent des habitués. Nous aimerions développer ce service qui permet d’économiser le temps de prise de commande, notamment quand elles sont groupées, pour un bureau. Cela soulage l’équipe”, constatet-il. À Bordeaux (Gironde), dans son restaurant bistronomique Satine & Bodandy, Julien Cruège honore une quinzaine de commandes par semaine. Il estime que “ce complément permet de faire tourner les produits et élargit la clientèle. Parmi les clients du click & collect, certains ne sont jamais venus au restaurant. En période calme, c’est intéressant. Si la charge de travail est importante en revanche, cela devient vite compliqué, car la mise en boîte prend du temps.” Adapter son offre Le chef a modifié son offre pour l’adapter au transport. “Le menu du jour est élaboré en fonction. On ne peut pas réaliser des détails de décoration ou proposer des fritures à emporter. Il faut aussi penser au réchauffage des plats”, souligne Julien Cruège. La formule complète est à 27 € (contre 31 € sur place) car “la TVA est différente à emporter, et les plats aussi”. Les brasseries Bouillon Pigalle et Bouillon République, à Paris, ont une carte dédiée à la vente à emporter et aux livraisons, sous l’appellation Bouillon Service. “Nous avons ajouté des plats plus légers, comme des quiches ou des buns, pour répondre aux demandes des clients de bureau. Chaque semaine, nous créons un menu complet à 10 €, uniquement à emporter : cela apporte de la variété à nos habitués, et de la stimulation sur l’offre culinaire et la recherche de circuit court. Nous testons aussi des produits avant de les mettre en livraison”, détaille Emmanuel Coussen, directeur des restaurants et de Bouillon Service. Les prix à emporter sont environ 8 % moins chers que ceux sur place, en raison de la TVA. La notion de service ne doit pas être oubliée. Cela passe par des emballages adaptés et cohérents avec le concept (les contenants de Vélicious Burger sont compostables). Chez Bouillon, un flyer illustré façon BD est glissé dans chaque sac, avec les conseils du chef pour réchauffer les différents plats. S’organiser “Pour faire du volume, il faut s’organiser”, résume Emmanuel Coussen. Le click & collect représente 30 % du chiffre, et le menu est très demandé. Le restaurant Bouillon République abrite une grande cuisine avec plusieurs laboratoires, et une boutique pour Bouillon Service. Celui de Pigalle est doté d’un corner service. “Nous avons beaucoup de commandes sur internet, mais aussi beaucoup de passage, avec des clients commandant sur place pour emporter. Parfois, la queue fait 40 mètres ! Mais les équipes sont rapides, car tout est produit la nuit ou le matin. Le contact avec les clients permet d’avoir leurs retours et des axes d’amélioration”, assure-t-il. Au total, 55 salariés travaillent pour Bouillon Service. Tout est compartimenté : cuisine, assemblage, préparation du packaging, mise en contenant, ventes... Chez Vélicious Burger, l’organisation était déjà en place pour les livraisons. L’activité à emporter s’y est fondue. À Lyon, l’enseigne Toké est spécialisée dans les empenadas (chaussons salés et sucrés), bien adaptés à la vente à emporter. “La commande prend peu de temps car notre carte est compacte. Elle est récupérable entre 15 et 20 minutes après validation”, explique Axelle Kibodi, De nombreux restaurateurs ont adopté le service click & collect lors des confinements successifs. Certains ont décidé de continuer à le proposer pour diverses raisons : satisfaire les habitués, élargir la clientèle, apporter du chiffre, améliorer sa visibilité… Si la vente à emporter a des atouts, elle génère aussi des contraintes. Retours d’expériences de quelques restaurateurs. Cédric Mincato, fondateur de l’enseigne vegan Vélicious Burger, veut développer le service à emporter, pour ses clients et la visibilité. Les restaurants Bouillon ont créé Bouillon Service pour gérer le click & collect et les livraisons. La vente à emporter : s’y (re)mettre, ou pas ? © GETTYIMAGES © BENOIT LINERO © DR 12 L’Hôtellerie Restauration N° 3795 - 31 mars 2023 Un podcast à retrouver sur Spotify, Apple Podcast ou sur www.lhotellerie-restauration.fr CLICK & COLLECT > Podcast : click and collect, livraison… où en est-on ? “En 2019, avant la crise du Covid, la livraison pesait 4 % du chiffre d’affaires de la restauration. Post-Covid, il est monté à 10 %.” Bernard Boutboul, directeur de Gira et auteur sur notre plateforme SOS Experts, constate que le boom de la livraison n’est pas significatif, notamment à cause du dérapage énorme des frais supplémentaires qui apparaissent sur la facture. “Les Français préfèrent le click & collect à la livraison”, affirme l’expert. Selon lui, les restaurateurs ont un double intérêt à s’y mettre : le gain de chiffre d’affaires et la publicité auprès d’une nouvelle clientèle. Il conseille toutefois de ne pas dépasser 30 % de son chiffre d’affaires pour la livraison, car l’augmentation du chiffre d’affaires est dégradée, et de bien négocier ses taux de commission. Au-delà du click & collect et de la livraison, il existe d’autres leviers de développement du chiffre d’affaires pour un restaurant : les dark kitchen, les host kitchen, le drive sans drive, le développement des plats dans les hôtels ou les commerces de proximité, et les grandes et moyennes surfaces… Laetitia Bonnet-Mundschau
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