L'Hôtellerie Restauration No 3811

développement aromatique qui va se créer, au fur et à mesure du réchauffement, l’amplitude des goûts va être décuplée… C’est pareil pour un plat. Une première cuillère, puis une deuxième… S’il n’y avait pas de goûts associés, il n’y aurait pas un déploiement aromatique. L’imprégnation crée ce déploiement et suscite le séquençage. C’est pour cela qu’il est très important de comprendre que la trame aromatique est tissée de telle façon que cela va ressortir à la dégustation, mais pas n’importe comment. Il y a un premier goût, un deuxième, un troisième, dans un ordre bien défini. C’est aussi souvent à travers la sauce que le séquençage va s’opérer. Après l’imprégnation qui mène à la conception de trames aromatiques, comment se passe la création du plat ? Construire un plat, c’est un cheminement. On doit déterminer sur quoi on pose telle trame aromatique. Cela peut être sur un champignon, sur un poisson, sur une viande… Ensuite, il faut construire le plat. En général, je réalise rapidement ma sauce qui fait le liant avec les ingrédients. C’est un processus assez long mais qui doit aussi être rapide et vif, car on peut perdre très vite le fil d’un plat. Aujourd’hui, je suis la majeure partie du temps dans ma cuisine d’essai, parce que j’ai une équipe dédiée dans la cuisine blanche (du restaurant gastronomique) et je dois pouvoir m’en extraire pour travailler à la création. Sinon, les plats ne changeront jamais. Le processus créatif, c’est se mettre en état d’être inspiré. C’est observer la nature et l’aimer. Être aux aguets tout le temps. Se laisser aussi porter par cette inspiration et par la compréhension de l’ingrédient qui induit beaucoup de choses. Vous avez mis en place un menu unique en dix étapes. Pourquoi ce choix ? Après la crise du Covid, j’ai pris le parti d’avoir un menu unique mais qui change tout le temps. C’est beaucoup de travail, mais c’est génial ! J’ai choisi ce que je voulais : la création ! Je veux que ça change et que le client soit ému. Valence, c’est un voyage en dix haltes. On pensait que c’était important de pouvoir le faire. Pour le déjeuner, le client peut passer à sept haltes. L’équipe s’adapte à la temporalité du client, mais il faut compter 2 h 30 au minimum. Il ne faut pas expédier le repas et il y a beaucoup d’interactions avec la salle parce qu’il y a le service des boissons, du thé… la table est un lieu de culture. 10 novembre 2023 - N° 3811 L’Hôtellerie Restauration 63 © EMMANUELLE THION Le restaurant Anne-Sophie Pic à Valence, 3 étoiles Michelin. Équipe Cheffe de cuisine : Tamaki Kobayashi Chef pâtissier : Cédric Barrère Chef exécutif pâtisserie : Éric Verbauwhede Directrice de salle : Margaux Dias Martins Chef sommelier : Edmond Gasser Cheffe exécutive sommellerie : Paz Levinson

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