L'Hôtellerie Restauration No 3819

Le locataire-gérant devra faire attention aux clauses du contrat qui déresponsabilisent le propriétaire du commerce. Compte-tenu du nombre croissant de contentieux portés devant les juridictions au sujet des travaux de mise en conformité, il est nécessaire d’avoir recours à un avocat spécialiste pour rédiger le contrat, éviter les risques et optimiser les investissements. Q Comment agir en cas de non-conformité des locaux ? et sans pouvoir prétendre à aucune indemnité ni diminution de la redevance ci-après fixée.” La clause selon laquelle le locataire-gérant prend le fonds dans l’état où il se trouve n’interdit pas au locataire-gérant de demander certains travaux au propriétaire du commerce (dit “locataire commerçant”). Ce dernier doit assurer la délivrance d’un fonds de commerce conforme à l’usage pour lequel il est destiné. Ainsi, si le locataire gérant n’a pas vu à l’entrée dans les lieux qu’il y avait, par exemple, du matériel non conforme, il a toujours la possibilité de réclamer au bailleur du commerce du nouveau matériel. Il en va de même en principe pour la non-conformité d’autres éléments (chambre froide, installations électriques et Parfois, le locataire-gérant se dispense seul de régler les redevances du fait de la non-conformité des locaux, sans fournir plus d’explication au locataire commerçant. Parfois, le locataire-gérant quitte même les locaux en laissant une dette de redevances à régler. Il est bien sûr préférable que le locataire-gérant reste et puisse exploiter correctement le fonds de commerce, au besoin en faisant consigner le montant des redevances jusqu’à la réalisation complète des travaux de mise en conformité par le bailleur du fonds. S’il n’obtient pas une solution amiable, il peut agir en référé pour obtenir : • la réalisation des travaux, notamment de mise en conformité (avec au besoin préalablement la de chauffage présentées comme en parfait état…). De même, il a la possibilité de réclamer à son bailleur la mise en conformité des locaux (article 1719 du code civil : obligation de délivrance du bailleur du commerce). C’est le cas, par exemple, lorsqu’un restaurant dispose d’une hotte sans évacuation de l’air conforme aux règles. Les travaux de la hotte pour la mise en place d’un conduit de cheminée conforme seront à la charge du locataire commerçant. Le locataire commerçant doit enfin, assurer une jouissance paisible du fonds de commerce. Cependant, il ne faut pas que le locataire-gérant soit fautif, c’est-à-dire qu’il soit à l’origine de la dégradation du matériel, d’un autre élément du fonds de commerce ou des locaux. Il sera responsable, par exemple, en cas d’incendie s’il n’a pas assuré le fonds de commerce (CA Aixen-Provence, Chambre 3-2, 1er juillet 2021, n° 19/02512). désignation d’un expert constatant les défauts de conformité) ; • et l’autorisation de consigner les redevances dues, avec réduction provisoire de leur montant, en attendant le rapport de l’expert et la décision judiciaire. S’il ne souhaite pas rester dans les lieux, il peut assigner en justice dans un délai très rapide le locataire commerçant pour voir annuler ou résilier le contrat de location-gérance, se voir restituer le montant de son dépôt de garantie et le trop-perçu des redevances. Il pourra aussi demander des dommages-intérêts pour manque à gagner et préjudices subis. Ces possibilités d’actions et de recours peuvent être exercées dans un délai de cinq ans (CA Poitiers, 5 juin 2018, n° 17/03645), et sont donc de nature à dissuader les propriétaires de mettre en location-gérance, même par imprudence, des fonds non conformes. 35 1er mars 2024 - N° 3819 L’Hôtellerie Restauration ••• Arrêté de fermeture administrative Un locataire-gérant ne peut pas opposer au locataire commerçant un arrêté de fermeture administrative pour ne pas avoir à payer ses redevances et charges, dès lors que l’arrêté a été rendu en raison de risques sanitaires qui lui sont imputables. Maintenir les lieux et le matériel en bon état Dans un autre exemple, le contrat de location-gérance d’un hôtel stipulait que le locataire-gérant devait “jouir du fonds et l’exploiter en bon père de famille, satisfaire à toutes les charges de ville et de police, et veiller à ne rien faire qui puisse avoir pour conséquence d’entraîner une dépréciation du fonds de commerce ou une cessation d’exploitationmême provisoire.” Les juges ont indiqué que l’obligation du locataire-gérant de maintenir les lieux dans un bon état permettant une activité normale (sans aucun recours contre le bailleur), ne se limite pas au matériel mis à sa disposition mais concerne aussi les lieux. Etat des lieux d’entrée et de sortie Le constat des lieux de sortie indiquait que les lieux étaient dans un état de vétusté avancée. La locataire-gérante n’a donc pas exécuté son obligation de maintenir les lieux dans un état correct permettant leur exploitation. Elle n’est donc pas légitime à solliciter le remboursement des travaux d’entretien et de remise aux normes des locaux, puisque ceux-ci s’inscrivaient dans le cadre de son obligation. Le propriétaire du fonds a pu demander le remboursement des factures liées à la pose de châssis de désenfumage, obligation imposée par la mairie (CA Grenoble, chambre commerciale, 28 janvier 2021 n° 19/01567). Plus récemment, le loueur d’un fonds a consenti à la location-gérance une branche de son activité d’hôtel. Ensuite, il a notifié au locataire-gérant sa décision de ne pas renouveler le contrat. Arguant de dégradations commises par son locataire-gérant à la sortie, le loueur a demandé la réfection de la moquette, papiers peints, peintures des plafonds de l’hôtel. Selon la Cour, il appartient au loueur de faire l’état des lieux des locaux (les articles 1731 et 1732 du code civil ne se sont pas applicables entre loueurs et locataires-gérants). Le locataire ne répond pas des dégradations ou pertes produites pendant la jouissance, sous réserve d’une faute de sa part. Or, il n’y avait pas de faute prouvée du locataire-gérant, car le loueur ne pouvait pas produire l’état des lieux d’entrée et l’inventaire du fonds à l’entrée (CA Aix-en-Provence, chambre 3 1, 22 septembre 2022, n° 19/06142). Exemples Attention ! Il faut bien analyser l’origine de la non-conformité de l’établissement aux réglementa tions applicables. Si le locatairegérant arrête de régler ses redevances alors qu’il est responsable des manquements, il s’expose à un commandement de payer ses redevances et charges visant la clause résolutoire ou en résiliation du contrat, et son expulsion. Un conseil 1

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