Roland Mesnier, originaire de Besançon, a roulé sa bosse dans quelques palaces
européens avant de partir vers le Nouveau Monde. Les grands hôtels des Bermudes d'abord,
puis ceux de la Virginie, l'Etat limitrophe du district de la ville de Washington. Enfin,
la Maison Blanche. Depuis plus de vingt ans, le bisontin rythme les réceptions, fêtes et
anniversaires des Reagan, Bush et Carter, et des Clinton, avec ses mousses, sucres filés
ou gâteaux à étages. Une façon de partager l'intimité des grands, qui savent
apprécier sa loyauté et lui rendent bien son amitié.
C'est ainsi qu'Hillary Clinton, avant de partir tôt le matin au premier rendez-vous d'une
journée chargée, a bien voulu recevoir pendant quelques minutes les jeunes protégés de
son chef. Moment d'amabilité très détendue après une visite admirative des lieux. La
maîtresse de maison remercie pour le vin envoyé précédemment par l'école ; elle avait
beaucoup aimé et en avait recommandé. Il était question de jeter un oeil sur les
cuisines, mais le retard de la «first lady» a annulé le projet. Ils sont néanmoins
repartis avec la notion de la grandeur de leur futur métier. Et maints conseils avisés
de leur parrain.
Des cuisines, les futurs cuisiniers et traiteurs allaient en voir bien d'autres. Avec l'introduction de Roland Mesnier, dont les amis français et américains occupent les coulisses de bien des restaurants de cette région Est de l'Amérique, ils allaient passer de surprise en surprise. La visite de deux grands palaces de Virginie, le Homestead et le Greenbrier, leur feront toucher du doigt le gigantisme. Construits sur des sources sulfureuses, les deux établissements offrent des séjours «tout sur place» grâce à des équipements complets en golfs, tennis, piscines, cinéma. Ils peuvent organiser, dans des salons luxueusement décorés ou sur les pelouses, des réceptions pour plus de 1.000 convives qui auraient probablement satisfait le richissime J.R. de Dallas. Cuisines informatisées pour afficher les commandes de la salle. Chef français aux fourneaux du Homestead, Michel Finel. Au Greenbrier, la soirée du nouvel an 2000 est complète depuis 5 ans. La tournée des chefs passait par le «Café Michel», un petit restaurant à la française, tenu par un originaire de l'Ain, Michel Galand. Installé dans une petite ville, il draine une clientèle d'amateurs qui n'hésite pas à parcourir des kilomètres pour manger autrement. Les jeunes y ont consommé un saumon à l'aneth pas trop dépaysant.
Mais on ne connaît pas vraiment l'Amérique sans passer par New York. Ce qui fut fait.
Visite d'un des plus grands restaurants de Manhattan, superbe endroit, le Cirque, dont le
chef, Jacques Torres... est français. Français aussi, Jean-Claude Perrenou le Breton et
Laurent Gras venu de chez Ducasse, les jeunes chefs de deux nombreux services du Waldorf
Astoria, à la cuisine française et à la pâtisserie. Partout, l'accueil de ces grands
entre les grands a été des plus chaleureux. On y a ressenti le plaisir de montrer à des
jeunes où peuvent conduire le goût du travail et la volonté opiniâtre de réussir.
Au programme figurait également la visite d'écoles culinaires. Celle de Washington,
l'Académie de cuisine, tenue par François Dionot, un Rémois qui a passé son enfance en
Franche-Comté. Les futurs bacheliers y ont utilisé les marmites pour y concocter
quelques spécialités du pays, avec des produits emportés sous vide dans des valises :
croustades de morilles au vin jaune et poulets sautés au poulsard gratinés au comté et
noisettes, réalisés sous la direction de leurs deux professeurs, Christian Paccard et
Michel Noir. Pendant ce temps, Alain Koenig, professeur de sommellerie, procédait à une
dégustation des Jura offerts par la fruitière vinicole de Pupillin et Henri Maire.
A New York, la CIA (Culinary Institut of America), la plus grande école des Etats-Unis
avec ses 2.000 élèves, leur a ouvert ses portes, montré ses 35 cuisines, présenté ses
quatre chefs français. Le fils de Bocuse y a «gradué» comme on dit là-bas.
Qui dit mieux pour motiver une petite bande de jeunes Franc-comtois ? Voilà de quoi
fournir à l'Amérique encore quelques représentants de l'hôtellerie française.
D. Robert
Parrainés par le pâtissier en chef de la Maison Blanche, ils sont allés saluer
Hillary Clinton.
L'amitié qui lie Roland Mesnier (à gauche) et Christian Paccard (au milieu) est à
l'origine de ce voyage.
L'HÔTELLERIE n° 2569 Hebdo 9 Juillet 1998