Jean-François Piège
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Restauration
Retrouvez la recette de Jean-François Piège : Turbot sauvage cuit au beurre
demi-sel, légumes de chez Didier Pil, curry-citron vert sur
Une approche personnelle de l’art de manger
Paris
Cela faisait six ans que le chef-patron de Thoumieux n’avait pas sorti d’ouvrage de gastronomie. Son dernier opus, intitulé
Jean-François Piège
,
présente sa cuisine d’aujourd’hui, qui a beaucoup évolué.
Jean-François Piège se livre
“
P
eu de gens savent à quoi
ressemble ma cuisine en 2013,
parce que le restaurant est petit
et ne peut recevoir de nombreux clients.
Or, j’avais besoin de montrer comment
ma cuisine a évolué. C’est une synthèse
de mon travail pendant ces trois
dernières années, depuis l’ouverture du
restaurant le 31 octobre 2010”,
explique
Jean-François Piège
.
Depuis son installation chez lui, rue
Saint-Dominique à Paris (VII
e
),
Jean-
François Piège a entamé un nouveau
cycle. Loin des palaces, le jeune chef
s’est offert un cocon de 20 couverts
(9
tables), dans un environnement
qui lui correspond, contemporain et
cosy. Ce restaurant doublement étoilé
en 2011 (menu à 99 € le midi avec
les vins) lui a permis de concevoir sa
propre approche de l’art de manger, à
commencer par la ‘Règle du Je(u)’ : le
client choisit un ou deux ingrédients et
aura la surprise de leur traitement. Le
menu comprend systématiquement des
hors-d’œuvre froids et chauds, un choix
de fromages et une sélection de desserts.
De la même façon, le livre se compose
de quatre Règles du Je(u), soit quatre
menus proches de la saisonnalité,
“
car
ma priorité est d’utiliser les produits
au summum de leur qualité”
,
explique
Jean-François Piège. Pour chacun,
les éléments
rituels, entrées,
plats, desserts,
mais aussi
les produits,
magistralement
photographiés
par
Stéphane
de Bourgies
.
À la fin du menu, les recettes viennent
conclure les propositions culinaires.
PLUS DE 300 RECETTES
Le livre
Jean-François Piège
dévoile
85
créations inédites et
présente plus de 300
recettes.
“
Une recette ne
doit pas être une prison.
J’ai découpé chaque plat
en donnant les recettes
de chaque élément qui le
compose. Chacun peut
reproduire comme il
lui plaît l’intégralité de
la recette ou l’un de ses
éléments, qu’il peut alors associer à
d’autres en fonction de ses envies”,
explique-t-il.
Le chef y joint ses ‘signatures’,
créations incontournables dont il
révèle ici leur version 2013 (Blanc-
manger, Spaghetti carbonara, De la
pâte soufflée comme une pizza…).
Sans oublier les ‘essentiels’, composés
des gestes fondamentaux du chef au
quotidien.
“
Plus que des recettes, la
cuisine est aussi une transmission de
sentiments. Le sentiment lorsque l’on
imagine le goût, lorsqu’on le crée et
lorsqu’on le déguste. Je fais une
cuisine d’auteur, technique,
mais qui est dans l’émotion.
Une cuisine de vérité qui
pense aux sentiments de
ceux qui viennent dans mon
restaurant. C’est un moment
de partage que je leur propose.”
Ce très beau livre en est
également un.
NADINE LEMOINE
Jean-François Piège
:
“
Cristalliser un moment
de perfection de l’ingrédient, le rendre beau et
appétissant, révéler toutes ses saveurs, tel est,
à mon avis, le travail et l’art d’un chef.”
Un thème très actuel
Tours
Du 7 au 9 novembre, l’Institut européen d’histoire et des cultures de l’alimentation a réuni chefs, chercheurs, universitaires
ou entreprises venus s’interroger sur les grandes tendances en restauration.
Le fait maison s’impose aux Rencontres François Rabelais
L
’
Institut européen d’histoire et des cultures de
l’alimentation (IEHCA), agence scientifique créée
en 2001 et associée à l’université de Tours (37), a
organisé, pour la 9
e
année, son
“
université ouverte”
à
Tours du 7 au 9 novembre. Pour montrer que “
cuisine
rime avec culture”
,
les Rencontres François Rabelais
réunissent tout un aréopage de chefs, chercheurs,
universitaires ou entreprises venus analyser les
nouvelles tendances de la gastronomie. Cette année,
l’IEHCA a choisi un thème très actuel, ‘
Fait maison
ou pas
?’,
en s’interrogeant : “
le fait maison va-t-il se
substituer progressivement au prêt à manger ?
”
Le
forum a abordé la question de la réappropriation du
fait maison dans les restaurants, ainsi que le retour
de la ‘vraie’ cuisine dans les familles, portée par la
télé-réalité, l’implication des enfants dans nombre de
programmes pédagogiques, etc.
UN OUTIL DE VALORISATION
“
Cette évolution récente développe aussi une curiosité
et une exigence qui questionnent la réalité des
pratiques actuelles
”,
explique ainsi
Laurent Aron
,
professeur associé à Ferrandi (Paris, VI
e
).
Alors que
le Gouvernement souhaite développer un label ‘fait
maison’, la définition du restaurant évolue. “
Elle n’est
pas sans poser problème dès que l’on tente d’en saisir les
limites : où commence, où
s’arrête le métier de cuisinier ?
Le fait maison a-t-il un
goût ?”
,
se demande l’IEHCA.
Assurément, répondent les
professionnels présents. Des
mouvements se développent
d’ailleurs comme la charte
‘
viennoiseries 100 %maison’
lancée par les professionnels
du Loir-et-Cher. Même
chose en restauration
collective ou dans l’industrie
des plats préparés.
“
Les
industriels et les distributeurs
s’adaptent et offrent de
plus en plus de produits
faits maison : argument
marketing ou véritable
mouvement de fond
?”,
se demande
Nathalie Avalonne
,
universitaire à
Tours. L’irruption du fait maison interpelle aussi la
profession avec le développement des chefs à domicile
ou de l’apprentissage qui passe par
de multiples canaux : télé, internet,
ateliers. Les restaurateurs doivent donc
se réapproprier le fait maison comme
pratique, comme image et comme outil
de valorisation. Faut-il pour autant
aller vers une “
gastronomie autarcique”
où les chefs, comme
Alain Passard
,
cultivent une grande partie de leurs
légumes ou élèvent leurs animaux
à viande ? Ces questions seront à
nouveau posées l’an prochain, pour
le 10
e
anniversaire des Rencontres
François Rabelais, avec la création
annoncée par
Marc de Ferrière
,
président de l’IEHCA, d’un “
festival
international des cours de cuisine”
afin
de “
diffuser et de transmettre la culture
de l’alimentation
”.
JEAN-JACQUES TALPIN