Est-il prévu de rémunérer les astreintes de nuit selon les modalités légales ?

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Anonyme

vendredi 18 octobre 2024

Bonjour Madame, J'ai 25 ans et j'ai une - grosse - difficulté en matière de règlement d'astreinte que je vous soumets. En 2023-2024, j'étais étudiante en 4ème année de MBA a Montpellier (34) et j'ai signé un contrat d'alternance théoriquement pour 2 ans avec un hôtel 4 étoiles dans le Gard (30). L'hôtel a mis à ma disposition une chambre dans l'hôtel où je travaillais, chambre que je partageais avec une autre alternante avec qui nous assurions la quasi-totalité des astreintes de nuit car il n'y avait pas de veilleur de nuit. Il n'a jamais été mentionné ni sur mon contrat de travail ni sur mes bulletins de salaire que je bénéficiais d'un avantage en nature logement. J'ai résilié mon contrat d'alternance d'un commun accord en août 2024 mais mes astreintes ne sont pas réglées. L'hôtel me propose de régler : * pour le temps de travail effectif, « à raison de 10 minutes par client » la somme dérisoire de 30,50€ brut correspondant à 26 arrivées tardives ; * pour les temps d’astreinte proprement dits, temps d'attente, une double contrepartie : -un avantage en nature logement à concurrence de 77,30€ par mois soit 850,30€ brut pour l'ensemble de la relation correspondant « à la mise à disposition d’un logement au sein de notre hôtel » ; -un avantage en nature repas les soirs d'astreinte, un repas par soir d'astreinte, soit 522,80€ brut pour 126 astreintes ; -ce qui représente un solde financier nul (la même somme étant portée en débit et en crédit sur le bulletin de salaire). Qu'en pensez-vous ? * Les temps d'astreinte, temps d'attente ne doivent-ils pas être rémunérés ? Et selon quelles modalités ? Ne doivent-ils pas être rémunérés en temps de travail ? * Est-il juste de limiter à 10 minutes le temps de travail effectif relatif à chaque arrivée tardive ? Je vous précise aussi que l'autre alternante est partie courant juin 2024 et que si j'avais connu ces conditions, je n'aurais jamais accepté car pour m'être levée la nuit, plus d'une fois, le repos quotidien n'a pas été respecté. Savez-vous aussi comment on indemnise le repos quotidien non respecté dans ce cas là ? Je suis maintenant en 5ème année de MBA. Vous remerciant par avance de votre réponse, Cordialement,

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Pascale CARBILLET

lundi 21 octobre 2024

Il convient de savoir dans un premier temps, si vous bénéficiez d’une chambre à votre usage exclusif. Le temps d’astreinte doit être indemnisé (mais cela doit être définie au préalable). Quant à vos interventions, elles sont prises en compte dans le temps de travail effectif, et doivent donc être rémunérées en conséquence. Le fait qu’il n’y ait pas de veilleur de nuit dans l’établissement, montre que vous assuriez cette fonction.


À partir du moment où le salarié ne peut pas vaquer à ses occupations personnelles, il ne s'agit pas d'astreinte mais de travail effectif devant être payé comme tel (avec majoration pour heures supplémentaires et travail de nuit le cas échéant). 


La légalité de ces astreintes fait l’objet d’une jurisprudence foisonnante. Par exemple, un arrêt du14 juin 2016 de la Cour d'Appel de Nîmes a rappelé ces principes.


Dans cette affaire plusieurs salariés se voyaient confier chaque semaine plusieurs nuits « d’astreinte » en plus de leurs tâches quotidiennes. Ils devaient lors de ces nuits rester dans une chambre d’hôtel mise à leur disposition par l’employeur pour assurer la permanence de sécurité et intervenir en cas d’appel de clients ou d’incidents de sécurité.


L’employeur n’entendait régler que le temps d’intervention et considérait le reste de la nuit comme une « astreinte » pendant laquelle le salarié pouvait vaquer à ses occupations, et donc rémunérée forfaitairement à un montant dérisoire. Le salarié était donc tenu de rester sur son lieu de travail sans rémunération de ses heures de travail. 


La cour d’Appel a jugé :
"L'astreinte effectuée dans un local situé dans l'entreprise ne permettant pas au salarié de vaquer à des occupations personnelles doit être considérée comme du temps de travail effectif.
En l'espèce, la salariée indique qu'elle tétait contrainte de rester à l'hôtel afin d'accueillir les clients, de répondre à leur demande et de résoudre tous problèmes pouvant survenir, elle devait assurer la permanence légale de sécurité de l'hôtel pouvant accueillir 92 clients qui ne disposait pas de veilleur de nuit lui imposant une vigilance constante, que chaque nuit, une chambre d'hôtel était mise à sa disposition étant précisé qu'il lui était interdit d'y accueillir des tiers.
Ainsi, dès lors que les permanences étaient effectuées sur le lieu de travail dans un local consistant en une chambre d'hôtel, laquelle n'était pas attribuée de manière privative à la salariée, et que durant ces temps, la salariée était chargée de surveiller l'hôtel dans son ensemble et de veilleur à l'accueil de la clientèle à toute heure de la nuit, sans pouvoir vaquer à aucune occupation personnelle, continuant à se consacrer exclusivement au service de l'employeur, les premiers juges en ont déduit à juste titre que ces prétendues astreintes devaient être regardées comme du temps de travail effectif".


Le critère juridique de différenciation entre une astreinte et un temps de travail est la possibilité ou non qu’a le salarié de vaquer à ses occupations personnelles. Ce critère est apprécié par les juges au cas par cas et selon le dossier présenté.


La Cour de cassation considère également que la période d’astreinte devient du temps de travail effectif lorsqu’elle s’accompagne de fortes contraintes, affectant objectivement et très significativement la faculté du salarié de gérer librement son temps et de vaquer à des occupations personnelles. Un délai d’intervention très court peut contribuer à caractériser de telles contraintes. Cass. Soc., 26/10/22, n° 21-14.178 ; Cass. Soc., 21/06/23, n° 20-21.843.

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Anonyme

lundi 21 octobre 2024

Madame, je vous remercie de votre réponse.

Je partageais ma chambre avec une autre alternante et je suis restée seule à son départ jusqu'à l'arrivée de la nouvelle alternante remplaçant la première.
Donc, faut-il compter toutes les heures effectuées pour " l'astreinte " en heure supplémentaire (+10%, +20%, +50%) ?
Peu importe qu'il y ait eu intervention effective ou non ? Car à raison de 9h par astreinte et après le départ de la première alternante, pendant 5 jours sur 7, voire 6 jours sur 7 (3 jours en moyenne sur 7 avant son départ), cela va faire des sommes considérables sur 11 mois.

Merci d'avance

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