CENTURY 21 À BORDEAUX
Immobilier : les prix nuisent aux affaires
À Bordeaux, le marché de ventes de fonds est dynamique
mais se heurte à la frilosité des banques. Explications avec Philippe
Platon, d.g. de Century 21 Immo Pro Commerce.
Propos
recueillis par Tiphaine Beausseron
L'Hôtellerie
Restauration : Pouvez-vous nous
présenter votre agence et votre coeur de cible ?
Philippe Platon :
Nous avons créé l'agence en 2003, et notre équipe se compose aujourd'hui
de 7 personnes. Les ventes de fonds de commerce de CHR représentent 70 % de
notre activité, sachant que notre secteur géographique comprend la Gironde,
la Dordogne, et le Lot-et-Garonne. Nous vendons en majorité des restaurants,
bar-brasseries et bar-restaurants.
Comment se porte le marché des fonds de commerce
dans votre région ?
Il est plutôt dynamique. Le taux de rotation
des affaires est compris entre 3 et 5 ans, surtout pour la restauration rapide et
à emporter, les bar-brasseries de centre-ville, et les fonds de bar-restaurants
situés dans les villages et proposant une cuisine régionale moyenne gamme.
Quelle est, en moyenne, les prix de ventes des bar-restaurants
et bar-brasseries ?
Pour ces deux produits, les prix s'établissent
aux alentours de 80 % du chiffre d'affaires.
Le durcissement des sanctions pénales en cas
d'abus d'alcool a-t-il eu, selon vous, une influence sur la valeur des bars
?
Pas vraiment sur la valeur de l'affaire, qui est
plutôt constante. Cependant, lorsqu'on analyse la rentabilité du fonds,
il semblerait qu'il y ait un renversement de situation quant à l'origine
du chiffre d'affaires dégagé par l'activité. Avant, le CA d'un bar-restaurant
se répartissait entre 60 % pour le bar, et 40 % pour le restaurant. Aujourd'hui,
la tendance est plutôt de 30 % de CA généré par le bar et 70
% par le restaurant.
Qu'en est-il des hôtels ?
L'avenir de ce segment de marché
risque de nous réserver des surprises. D'un côté, il y a toujours
une forte demande pour les hôtels bureaux et les prix de vente sont souvent
disproportionnés en regard de la qualité du produit. D'un autre côté,
les banques sont de plus en plus frileuses à financer l'acquisition de tels
biens, surtout avec les normes de sécurité qui induisent de lourdes dépenses
de rénovation. Si les banques ne soutiennent plus les acheteurs, les propriétaires
auront bien du mal à vendre, ce qui risque de geler le marché.
Quelle est votre méthode pour estimer la valeur
des murs quand une affaire est vendue murs et fonds ?
C'est évidemment assez compliqué car
beaucoup de facteurs entrent en ligne de compte. Pour résumer, on peut dire
que, d'un côté, on part du principe théorique que la valeur des
murs est égale au loyer annuel multiplié par 10, sachant que le loyer
annuel doit en principe être compris entre 5 et 10 % du CA annuel du fonds
quand il s'agit d'une activité restauration ou débit de boissons. Il tourne
aux alentours de 15 % du CA annuel du fonds pour les hôtels ou hôtel-restaurants.
D'un autre côté, on estime le bien sur la base d'un prix au mètre
carré par référence aux prix de l'immobilier d'habitation, auquel
on applique un abattement d'environ 40 %. On compare les 2 résultats, et on
complète notre estimation avec des éléments d'appréciation concrets
tels que l'emplacement du bien, l'environnement commercial, la qualité du bâtiment
et de son architecture, etc. C'est grâce à la combinaison de tous ces
éléments que nous parvenons à donner notre estimation.
Il arrive que les propriétaires 'murs et fonds'
surévaluent leurs murs commerciaux parce qu'ils se basent uniquement sur les
prix de l'immobilier d'habitation au m2. Quelles sont les conséquences
?
Cela peut dans ce cas freiner la vente, ou en
tout cas, rendre plus difficile son financement par une banque. Il ne faut pas oublier
que l'un des principaux critères dans l'évaluation des murs est le rendement
locatif, c'est-à-dire la capacité du fonds de commerce à payer
les loyers. Et le banquier est particulièrement attentif à l'équilibre
entre rentabilité du fonds et poids
du
foncier dans le crédit bancaire. Plus un propriétaire murs et fonds surévalue
la valeur foncière de son bien, plus le prix global de la vente est haut, plus
la somme que l'acquéreur devra emprunter sera élevé ou plus son apport
devra être important. La rentabilité du fonds devra être suffisamment
conséquente pour absorber à la fois le crédit bancaire sur les
murs et le fonds de commerce. Or, tous les fonds de commerce n'ont pas la capacité
d'être aussi rentables (sauf cas d'emplacements exceptionnellement bons).
Si le bien ne remplit pas les critères de rentabilité exigés par
la banque, l'acquéreur n'obtiendra pas son crédit, ou il n'obtiendra un
crédit que sur le fonds sans les murs. Ainsi, le vendeur est coincé :
soit il vend le fonds sans les murs, soit il ne vend rien du tout, ou en dernier
recours il signe une promesse dans laquelle la vente des murs est différée
à quelques années. Au final, des murs surévalués n'apparaissent
plus comme un avantage dont il peut tirer profit, mais comme un inconvénient
pouvant faire capoter une vente.
Bordeaux en chiffres
6e ville de France, capitale
de la région Aquitaine 5e aéroport de France
4e gare de France 230 000 habitants Ville classée
au patrimoine mondial de l'Unesco depuis le 28 juin 2007 2,5 millions
de touristes 152 hôtels et résidences hôtelières toutes
catégories confondues 1 000 restaurants
(Source : office de tourisme de Bordeaux.)1
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