La Moselle donne un sérieux coup de frein au développement des chaînes : la Commission Départementale d'Equipement Commercial (CDEC) a rejeté fin août à une large majorité (4 voix contre 1) le projet d'implantation d'un hôtel Ibis à Yutz, sur la zone commerciale des Carolingiens, en plein développement. Ibis présentait le premier dossier hôtelier en Moselle depuis la réouverture des CDEC induite par la loi Raffarin. Celui-ci prévoyait de créer un établissement de 72 chambres accompagné d'un restaurant de 50 couverts, de type brasserie. Située le long de l'autoroute Metz-Thionville, la zone commerciale de Yutz avait retenu l'attention de la filiale d'Accor du fait de sa position frontalière : la chaîne prévoyait d'appliquer le concept Ibis 2003, particulièrement bien adapté au marché allemand.
Le sort de ce projet s'est en fait joué dès le 8 juillet, lors de la réunion de la Commission Départementale d'Action Touristique (CDAT), la nouvelle instance de consultation où siègent les chambres consulaires, les offices et comités du tourisme, les représentants de la profession hôtelière et les associations de consommateurs. La CDAT s'est prononcée, à 9 voix sur 10, contre l'implantation. «Le plaidoyer de la profession pour l'équilibre entre centre-ville et périphérie a été particulièrement convaincant», relate un membre de la commission.
Le cas de l'Ibis d'Yutz revêt en effet une valeur d'exemple. La chaîne voulait s'installer sur une zone commerciale de périphérie, qui regroupe déjà à elle seule 40 % du parc hôtelier de l'ensemble formé par les communes de Yutz et Thionville.
La création du nouvel établissement aurait porté ce taux à 50%, dont 40% pour le seul groupe Accor, déjà présent sur les Carolingiens à travers Formule 1 et Etap Hôtel. La CDAT a également «élargi» la zone d'étude : alors qu'Ibis se limitait à quatre communes, elle a estimé que le projet aurait des incidences sur l'ensemble d'un secteur compris entre le nord de Metz et la frontière luxembourgeoise, compte tenu des facilités de déplacement qu'en-gendre l'autouroute. Selon elle, le développement d'Ibis n'aurait pu se faire qu'au détriment de l'hôtellerie indépendante du centre-ville. Le conseil général de la Moselle a d'ailleurs supprimé en 1994 les subventions à la création d'établissements deux étoiles sur l'axe Metz-Thionville «en raison des surcapacités». De plus, la CDAT a relevé dans l'étude de marché que «les établissements de chaîne affichent un taux d'occupation de 84 %, soit 20 à 35% de mieux que les indépendants».
L'ensemble des arguments a rallié aux opposants deux voix «sensibles» lors du vote en CDEC : celles du représentant des consommateurs et du maire de Thionville.
La CDEC de la Moselle adoptera-t-elle la même attitude dans le futur ? La réponse ne viendra pas dans l'immédiat : le département n'a enregistré pour l'instant aucun autre dossier émanant d'une chaîne.
M. Nussbaum
L'HÔTELLERIE n°
2527 Hebdo 18 septembre 1997