Avec Cyril Attrazic, 24 ans, aux commandes des cuisines du restaurant-brasserie «Chez Camillou», c'est à Aumont-Aubrac, en Lozère, une tradition familiale qui se perpétue. Une quatrième génération qui marche sur les traces de Camille Boulet créateur, en 1932, d'un petit bar-restaurant. Il donnait alors le virus à sa famille puisque Céline sa fille, puis Francis son petit-fils ont pris tour à tour la suite.
Mais entre temps, bien sûr, la maison a changé. Avec le déplacement puis l'agrandissement du restaurant d'une part, la création d'un hôtel de 44 chambres géré par la soeur de Francis d'autre part, l'affaire a pris une toute autre dimension. Et c'est dans cet environnement que Cyril a, dès 14 ans, montré son intérêt pour les métiers de la restauration. «J'ai commencé par le service, en aidant ma mère pendant les vacances. Puis, après le BEPC je suis rentré au Lycée professionnel de Saint-Chély d'Apcher où j'ai obtenu CAP, BEP et BTH en cuisine.»
Mais il n'était pas prêt alors à rejoindre son père, ancien de l'école hôtelière de Clermont-Ferrand et syndicaliste motivé au sein de la FNIH. «Je crois que j'ai ressenti un déclic lors du service militaire au mess des officiers à Clermont, explique encore le fils. Il y avait des gars qui se débrouillaient vraiment bien et j'étais encore loin de leur niveau. J'ai donc effectué les démarches pour entrer à l'Ecole supérieure de cuisine française, à Paris, en 1995.» La formation mais surtout les stages suivis à Versailles («Les trois marches») puis à Paris chez Alain Ducasse ont permis au jeune cuisinier de s'affirmer. Quatre mois comme chef de partie, à Londres chez «Le Monte's» ont fini de lui donner cette assurance nécessaire pour aller plus loin.
C'est-à-dire revenir dans le giron familial. Un retour aux sources qui va bien entendu modifier le décor de la maison. Mais en souplesse. Car pendant les sept mois d'activité, on ne veut pas bousculer, d'un seul coup d'un seul, les habitudes. Pourtant, il y a déjà eu du changement dans la cuisine. L'adaptation à de nouvelles techniques via des équipements plus modernes s'est traduite par 250.000 F d'investissements. Quant à la carte désormais proposée aux clients du restaurant gastronomique, elle est l'oeuvre de Cyril. «Il apporte bien entendu de la nouveauté mais il lui faut aussi ne pas trop choquer une clientèle d'habitués. Cette transition doit s'effectuer en douceur, tant au niveau des nouveaux produits que Cyril peut utiliser qu'au niveau des prix. Ce sont ses compétences professionnelles qui pousseront les clients à accélérer ensuite l'évolution.» Côté tarif, effectivement, l'arrivée du «Parisien» ne se traduit pas par une flambée. Si avant les prix des quatre menus s'échelonnaient de 95 F à 230 F, désormais, ils vont de 98 F à 260 F. Avec un but clairement avoué : «que la qualité de la cuisine incite les clients à préférer le second de la gamme plutôt que le premier jusqu'alors le plus demandé».
Un projet dont Francis Attrazic suivra de près la réalisation. En parallèle toujours
avec une mission syndicale très prenante, même si au plan départemental, il a passé la
main. «Elle représente déjà aujourd'hui 70% de mon activité, cela ne peut aller
qu'en augmentant. Car il est très sécurisant que le relais soit pris à la maison. Pour
moi, bien sûr, qui dois encore beaucoup travailler sur le dossier des «Restaurants de
France» mais pour Françoise mon épouse, surtout, qui a beaucoup assumé cette maison
toute seule. Désormais, elle pourra m'accompagner plus souvent...»
Une succession en douceur, comme celle-là, n'a vraiment que du bon !
J. Bernard
La famille Attrazic dans l'établissement familial d'Aumont-Aubrac : «Chez
Camillou».
L'HÔTELLERIE n° 2561 Hebdo 14 Mai 1998