La Seine-Saint-Denis conjugue les paradoxes. Quarante communes dont dix limitrophes avec la capitale, un PIB équivalent à celui de l'Irlande (l'essentiel des équipements de l'aéroport de Roissy sont sur le département), un centre de congrès et d'expositions unique -Villepinte- qui fonctionne dix mois pas an et qui a recensé, en 1996, 1,3 million de visiteurs, 10.115 chambres d'hôtels dont une majorité date de moins de cinq ans (2 millions de nuitées en 1997), des pôles événementiels comme l'aéronautique (le salon du Bourget reçoit près d'un million de visiteurs et 6.000 exposants chaque année), les puces de St-Ouen (11 millions de visiteurs en moyenne), la basilique de St-Denis (150.000 visiteurs l'an dernier) et maintenant le stade de France : 80.000 places (105.000 places en configuration spectacle). Deux fois le parc des Princes. Mais à côté, il y a l'autre réalité du 93 : le deuxième département universitaire de France est en butte aux violences urbaines, sa jeunesse pousse de guingois. Quand la Courneuve ou la cité des 4.000 fait la une des journaux, c'est à coups de canifs. Quand les collèges sont sous les feux des projecteurs, c'est en grève et à bout de souffle. "Vous savez, s'insurge le patron du Sousceyrac qui est également propriétaire d'un restaurant à Bondy, tout le monde a peur de Bondy alors qu'il ne s'y passe rien. Moi, je suis à 5 minutes du Stade de France et je crois beaucoup dans ce qu'il va nous apporter. Notre problème, dans le département, c'est l'image. On parle toujours de ce qui ne va pas, jamais de ce qui va bien."
A Saint-Denis, la Coupe du Monde 98 est désormais
ressentie comme un challenge social. Même si, lors de la construction du grand stade, il
y a d'abord eu des grincements de dents. A tous les niveaux. Le coût de l'infrastructure
-2,6 milliards de francs- a fait peur. Et puis, la vie des habitants allait être
bouleversée.
En bien ? En mal ? Quand il a fallu déplacer la station du RER, ça a été une
mini-révolution dans le quartier.
"L'an dernier, se félicite le président de l'Office de tourisme de
Saint-Denis -dont les locaux ont été agrandis et l'équipe étoffée (plus 8 emplois
jeunes notamment)- nous avons dépassé les 100.000 visiteurs. Et notre objectif est de
mettre au service du développement local cette grande fête internationale du football
pour mieux faire connaître la ville, valoriser son patrimoine et les savoir-faire
locaux.»
Même démarche à l'échelon départemental. Le Stade de France est une fabuleuse
locomotive dans la bouche des institutionnels.
A 13 jours de l'ouverture de la Coupe du Monde, Saint-Denis semblait cependant perplexe. "Il
n'y a pas assez de drapeaux, de banderoles pour annoncer la manifestation" ,
s'inquiétait un restaurateur du centre-ville. Claire O'Petit, présidente du Collectif
des associations de commerçants et artisans des villes accueillant la Coupe du Monde
-elle est aussi présidente de la Maison du commerce et de l'artisanat de Saint-Denis-
vient à la rescousse. "Je conserve le très désagréable souvenir du mois de
juin dernier, lorsque le CFO a réuni au Méridien les partenaires et sponsors du Mondial.
Aucun représentant des commerçants d'aucune ville n'avait été invité. Et quand j'ai
demandé des explications, il m'a répondu : les commerçants ? mais pour quoi faire
?" (...) "Si le CFO occupera pendant 4 heures le public, les commerçants
seront les artisans d'un accueil réussi les 20 heures restantes.». Bien vrai. Quant
aux drapeaux, ils arriveront. Il y aura également des affiches et d'autres objets de
décoration mis à la disposition des commerçants, y compris des cafés et des
restaurants. Et c'est gratuit. Le Crédit Lyonnais, Décathlon, McDonald's et France
Télécom sont partenaires du Collectif.
"Jusqu'à quelle heure va-t-on pouvoir ouvrir ?", se sont aussi
inquiétés plusieurs cafetiers. Farid Ouallouche, maire-adjoint chargé du commerce et de
l'artisanat, a confirmé que les soirs de matches, l'autorisation d'ouverture passait de
minuit à une heure du matin. Pour avoir les 2 heures, restait à convaincre la
préfecture, le secrétariat d'Etat au tourisme, etc. Le 10 juin, personne n'a vraiment
vérifié l'heure à sa montre. Il y avait beaucoup trop de monde dans les rues.
"Nous, augmenter nos prix pendant la Coupe du Monde ? Vous n'y pensez pas. Il y a un après Mondial" s'exclame un restaurateur interrogé sur sa politique tarifaire. Ce professionnel est membre de la chartre Art de Vivre lancée voici trois ans et qui fédère aujourd'hui une quinzaine d'établissements dans le département. Pour eux, l'intérêt n'est pas dans le coup de massue, mais dans le coup de fourchette. Au menu du Mondial : prix stables, cuisine généreuse et dans chaque établissement une recette à base de coq. C'est de tradition française dont il s'agit. Ces établissements sont La Douelle (Aulnay-sous-Bois), Le restaurant de l'Hôtel de Ville (Aulnay-sous-Bois), Le Parisien (Le Blanc-Mesnil), La Campagne Lotoise (Bondy), Le Lapin Sauté (La Courneuve) Le Grill du Pêcheur (La Courneuve), Le Chalet du Golf (Rosny-sous-Bois), La Table Gourmande (Saint-Denis), Les Verdiots (Saint-Denis), Le Relais Gourmand (Tremblay-en-France), Le Cénacle (Tremblay-en-France), La Jument Verte (Tremblay-en -France), L'Ecurie (Villemomble), Le Relais de Vaujours (Vaujours), Le Coq de la Maison Blanche (Saint-Ouen).
Depuis le 11 juin et jusqu'au 12 juillet, une trentaine de
cafés et de restaurants de Saint-Denis proposent des expositions et des animations
spécifiques. Ces établissements ont bénéficié du soutien logistique de la société
Prismalion (c'est elle qui organise Bistrots en Fête) avec PLV et calicots. En outre, une
plaquette a été éditée en collaboration avec la ville, la radio Rire & Chansons et
Coca-Cola.
Au programme : soirées brésiliennes, orientales, paëlla, journées Vosnes Romanées,
vins de Bandol, Terroir de France, présence de musiciens, de comédiens, hommage à
Brassens ou aux pays participant à la Coupe du Monde...
LA CHARTE D'ACCUEIL DESCAFETIERS-RESTAURATEURSLe Collectif des commerçants a mis au point deux chartes de l'accueil dont une concerne les cafés et les restaurants de Saint-Denis. Cette charte en dix points parle de la qualité des services, de l'information, du bon affichage des prix, d'une carte nécessairement traduite en anglais, allemand et en espagnol, d'adapter les horaires en fonction des attentes et des demandes... Les établissements signataires sont listés sur un dépliant traduit en quatre langues et disponible dans tous les lieux publics de la ville. |
CALENDRIER DES MATCHESJeudi 18 juin : Pays-Bas/Belgique (21 h) * Deux matches ont déjà eu lieu dont celui d'ouverture. |
Les principales animations* Cafés et restaurants en fête : depuis le 10 juin et
jusqu'au 12 juillet, 30 établissements. * Banlieues du Monde 98 : du 1er au 12 juillet, stade Nelson
Mandela. |
Hôtellerie : résultats mitigésAu vue de leur première prestation, les onze tricolores pourraient bien accéder à la finale du Mondial 98. Il n'est pas certain en revanche que les hôteliers de la Seine-Saint-Denis soient eux cette année sacrés champion du monde de l'hébergement. Les hôtels sont en effet loin de faire un tabac. D'ailleurs, indicateur significatif, Mondiresa n'a vendu dans le 93 que 23.000 nuitées durant les festivités. "Nous établissons un état des disponibilités quotidien afin de répondre aux demandes de dernière minute. Les soirs de matches sont en général complets, il y a encore cependant dans certains cas des chambres disponibles. Y compris bien sûr la veille et entre les rencontres", indique ainsi Catherine Dragin de l'Office de tourisme de Saint-Denis. Une tendance corroborée par les propos des professionnels. "Nous avons une forte demande le soir des matches, en dehors il nous reste de la place", confie William Rouxel, gérant du Formule 1 de Saint-Denis. Et d'ajouter, "nous serons probablement complets, mais parce que nous avons décidé de privilégier nos clients habitués." Marc Herruy, président de la chambre syndicale de Seine-Saint-Denis, surenchérit : "La fréquentation est correcte en semaine, mais c'est la catastrophe les week-ends. On a l'impression que les gens n'osent plus venir chez nous". La peur de ne pas trouver de chambres libres a apparemment fait des siennes. "Nous devrions certes terminer juin entre 92% et 93% sur le Formule 1 et 78% sur l'Etap'Hôtel. Je note toutefois que nous avons moins de passage qu'à l'habitude", indique Daniel Vincent, patron du Formule 1/Etap'Hôtel Porte de Saint-Ouen. C.C. |
AAulnay-sous-Bois en Seine-Saint-Denis, le restaurant A L'Escargot se mobilise pour accueillir le monde entier entre le 10 juin et le 12 juillet. Déjà connu dans la région pour ses soirées musicales classiques et son répertoire de spécialités, notamment le menu fromages à 250 francs, les propriétaires de l'établissement, Bernard et Christine Cavalléro viennent de mettre en place un menu spécial "Bonjour la France" à 250 francs, composé d'une flûte de champagne, de trois plats, de fromages et d'un assortiment de desserts. Un menu destiné à faire découvrir ou redécouvrir des spécialités du terroir français du 9 juin au 19 juillet. Et pour les clients de proximité passionnés par le ballon rond, les Cavalléro ont imaginé un plateau-repas pour deux personnes au prix de 150 francs, à commander le matin pour l'emporter le soir. Il contient une salade composée de viandes ou poissons froids, de fromages et du dessert du stade.
Par ailleurs, l'établissement continue parallèlement d'offrir ses différents menus : le "Plaisir" à 180 F, le "Comme chez soi" à 130 F, le "Fromages" à 250 F et le "Retour en taxi conseillé" à 450 F qui allie fromages et vins.
Les Cavalléro ont réuni toutes ces offres sur un prospectus qu'ils ont conçu eux-mêmes, en français et en anglais, disponible à la Mairie d'Aulnay et à l'Office du tourisme de la Seine-Saint-Denis. B.T.
Cette institution de la Plaine-Saint-Denis édite, à l'occasion de la Coupe du Monde, une carte axée sur les plats traditionnels et de terroir. "Les étrangers qui viennent chez moi veulent goûter des plats typiques et je vais accentuer l'offre pendant le Mondial", remarque Alain François, propriétaire de l'établissement. Sur les prix ? De l'avis général : "non, ce serait stupide de faire grimper les prix. L'important, c'est de faire plaisir à tout le monde : à notre clientèle habituelle et à celle que nous allons capter grâce à l'événement." Quant à la déco, le style années 50 de la salle se suffit à lui-même. Seul Footix, la peluche, est installé sur une desserte à l'entrée.
Alain François, patron d'une institution gourmande du département.
Sur le vif...La Brasserie de la Poste, dans la Zac Montjoie, à 5 minutes à pied du grand stade, est ouverte 7 jours sur 7 pour la Coupe du Monde. Pour cet établissement, la grosse difficulté : se faire connaître. L'établissement n'est pas sur le passage. Jacques Duvelleroy a donc décidé de flécher l'emplacement. Des comédiens, des musiciens qui partent du RER, conduisent également les pas des promeneurs jusqu'à l'établissement. A table, place aux plats typiques des pays en lice. Au moins deux plats à chaque fois. Le Buf est au Vin, rue Gabriel Peri. Bruno, le patron, est originaire de Béziers et les 40 places du restaurant ont été prises d'assaut les soirs de rugby. En ce qui concerne le ballon rond, une semaine avant le début de la Coupe du Monde, seulement deux tables étaient réservées pour le 10 au soir et une pour la finale. "Moi, j'y crois, lance cependant l'épouse de Bruno. La Coupe du Monde, il n'y en a qu'une et nous ne devons pas la rater. Nous devons aussi penser que cela va nous amener une clientèle parisienne que nous n'avons pas le reste du temps. Si on augmentait nos prix, nous pénaliserions notre clientèle habituelle et nous décevrions des clients potentiels". Pas de décoration spéciale. On mise sur la qualité de l'accueil et de la cuisine. |
Sous l'impulsion de la Coupe du Monde de Football, la chaîne
de restauration rapide Quick a ouvert son 277ème restaurant en France sur l'esplanade du
Stade de France à Saint-Denis. Inaugurée le 11 mai dernier par son directeur Patrick
Dueso, en présence du président de la chaîne, Jean-Pierre Granié et d'un invité
exceptionnel, Jean-Pierre Papin.
Une unité atypique pour ce premier Quick sportif au décor
entièrement dédié au foot, emplacement oblige, avec une fresque géante intitulée
"au coeur du sport", un sol marqué de lignes de but et des tables de couleurs
vert et jaune portant des numéros de maillots de sport. Le restaurant de 180 places
dispose de deux verrières qui donnent directement sur l'aile Nord du Stade de France. De
plus, Quick n'a pas oublié l'engouement de sa clientèle pour le sport. Ses dirigeants
ont ainsi pensé à installer un gigantesque mur d'ima-ges, qui diffuse en alternance des
rencontres sportives, des extraits de films et des dessins animés. Le Channel Quick est
un véritable programme de télévision interne aux restaurants de la chaîne de
restauration.
B.T.
Jean-Pierre Papin et Jean-Pierre Granié, président de Quick France, le jour de
l'inauguration du premier Quick sportif, implanté sur l'esplanade du Stade de France à
Saint-Denis.
L'HÔTELLERIE n° 2566 Hebdo 18 Juin 1998