Avant la levée de rideaux, prévue à l'automne 1999, la partie se joue en trois
actes. Premier acte : réunir les fonds pour sa réhabilitation. La ville de Bordeaux et
l'Etat devraient prendre en charge l'investissement lié aux gros uvres soit près
de 6 MF. Les travaux artistiques, décor peint XIXème par Burget et dorures, estimés à
3 MF, seront financés par la direction régionale des Affaires culturelles et pour partie
par des mécènes.
Second acte, le choix du concessionnaire. "Après un bref tour d'horizon,
Jean-Marie Amat qui était intéressé, nous paraît être celui qui a le mieux compris
l'esprit dans lequel nous souhaitions que cette brasserie revive, explique Jean-Luc
Maeso. D'autre part, il fallait que le repreneur ait une marge d'investissement
suffisante, car il aura à sa charge tout l'aménagement intérieur, cuisine, équipement
et mobilier". Ainsi, si Jean-Marie Amat a été choisi pour écrire la partition
culinaire, il cumulait l'avantage d'être adossé au groupe Borehal. Propriétaire, depuis
son dépôt de bilan du Saint-James à Bouliac, (ex-propriété d'Amat), la société de
Jean-Claude Borgel, spécialisée dans la fourniture en tout genre pour les boulangeries,
cantines, hôtellerie et restauration, est un géant régional de la distribution
spécialisée, avec 500 salariés et près de 1.500 clients disséminés dans l'Ouest de
la France. Et c'est précisément ce choix qui a fait bondir les professionnels bordelais
et notamment les restaurateurs du SGIH.
"Nous n'avons rien contre Jean-Marie, au contraire, tient à préciser Francis
Garcia, chef étoilé du Chapon Fin et président des restaurateurs au sein du Syndicat
général de l'industrie hôtelière de la Gironde, mais on se sert de son nom. S'il
conçoit le cadre et la carte, met en place son équipe, il ne sera pas présent
physiquement. Le plus grand bénéficiaire sera donc Borehal".
Les restaurateurs craignent en effet que cette société, du fait de ses nombreux
avantages fournisseur de produits, loyer bas...- n'applique des prix qui concurrenceront
directement la centaine de restaurateurs du centre de Bordeaux. "Le groupe Borehal
a déjà raflé le Saint-James pour 4,5 MF alors qu'il en valait au moins 20 MF et
maintenant on lui offre pour un loyer annuel inférieur à 300.000 F par an, la brasserie,
ceci sans appel d'offres."
Car les candidats à la reprise ne manquent pas. Parmi eux, Francis Garcia qui avait fait
une demande il y a 5 ans et qui s'associerait à Bernard et Daniel Cuny, le trio proposant
une offre supérieure aux 300.000 F. Jean-Christophe Parineau, de l'établissement Courbu
et propriétaire depuis cette année de la Réserve à Pessac, se dit également
intéressé.
Si tous militent pour un appel d'offres dont la transparence éviterait tout favoritisme,
les règles de passation de marché public indiquent qu'en-dessous de 300.000 F, la
procédure d'appel d'offres n'est pas obligatoire. Les professionnels comptent donc faire
entendre leurs voix auprès de la mairie de Bordeaux, propriétaire du Grand Théâtre. Et
déjà un rendez-vous est pris avec le maire de Bordeaux Alain Juppé.
B. Ducasse
L'HÔTELLERIE n° 2575 Hebdo 20 Août 1998