«Quand j'ai dit à mes confrères d'Irlande qu'on a fait 25 fûts le soir du premier
concert, ils ont été incrédules. Il leur semble difficile que les niveaux de
consommation dans une ville française puissent être aussi élevés au démarrage», dit
Kevin Hegarty qui a ouvert au printemps le Mulligan's, dans la ville rose. Ce succès de
départ n'a pas réellement surpris Kevin Hegarty qui voulait apporter quelque chose de
nouveau à Toulouse avec un pub dont toute la partie visible a été confiée à une
entreprise irlandaise spécialisée dans l'habillage des bars, société qui facture ses
prestations entre 6 et 8.000 F le m2. De sorte que l'ensemble des matériaux et
des éléments du décor, de style campagne et victorien, proviennent d'outre-Manche et
ont été posés par des ouvriers irlandais, à l'exception du plancher ou de l'ardoise :
les lustres produisant une lumière tamisée un peu jaune, le bar, les banquettes, tables,
chaises, la garniture des tabourets, les boiseries cuivrées, les deux alcôves de
l'entrée, les vieilles pancartes de boutiques accrochées aux murs, les outils agricoles,
la vaisselle de décoration, moulins à café, pots, brocs, et autres objets anciens ou
hétéroclites dont un antique vélo trônant entre rez-de-chaussée et premier étage.
De la peinture du plafond un peu noircie au plancher patiné, tous les éléments du
décor ont été vieillis volontairement. «Je suis en France depuis quelques années.
J'ai travaillé à Paris et Bordeaux. J'ai vu partout de nombreux pubs faits par des
Français mais ils sont différents des véritables pubs, il leur manque quelque chose. Je
crois qu'on n'y peut rien, c'est probablement quelque chose de culturel. J'ai passé, en
bon Irlandais, une partie de ma jeunesse dans les pubs. Il y a une ambiance particulière,
que ce soit dans la musique ou le décor et c'est quelque chose qu'on ne peut pas
copier.»
Eviter la médiocrité
Situé à l'écart du centre-ville, où les surfaces disponibles sont rares et les loyers
élevés, le Mulligan's est installé face à la prison Saint-Michel, à l'emplacement du
bar-restaurant Le Pasteur qui avait brûlé et dont le fonds a été racheté par Kevin
Hegarty. L'intérieur du local, qui occupait trois niveaux, a été entièrement démoli
et la cave agrandie. L'investissement total représentant 3 MF pour une surface de 140 m2
sur deux niveaux entièrement isolés.
Pour limiter au maximum les coûts d'exploitation, le pub n'emploie que deux personnes, le
frère de son propriétaire et un barman, également irlandais. Le service est limité au
bar et au ramassage des verres dans la salle. «La clientèle, assure Kevin, ne vient pas
pour la bière mais pour l'ambiance.»
Côté animation, le Mulligan's programme au moins un concert par semaine. Il fait venir
des groupes d'Irlande dont il partage les frais de déplacement avec un pub de Bordeaux,
le Connemara, où Kevin Hegarty était employé avant de s'installer à Toulouse. «J'ai
pris un risque important, compte tenu de l'investissement, mais mon idée consiste à
aller jusqu'au bout d'une logique et de ne pas faire quelque chose de médiocre. C'est
pour cela que j'y crois.»
AMPso
Les bières* En contrat avec Kronenbourg, qui lui a fourni la moitié de la somme
empruntée, le Mulligan's sert seulement 5 bières |
L'adresse n'est pas dans le centre-ville, mais ce n'est pas gênant.
Kevin Hegarty fait venir des groupes d'Irlande pour les concerts.
L'HÔTELLERIE n° 2579 Supplément Bistrots en fête 17 Septembre 1998