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En décidant que les sommes investies sur un contrat d'assurance vie ne peuvent pas êtres saisies par un créancier (administration fiscale ou autres), la Cour de cassation vient d'octroyer à ce placement un nouvel avantage dont il convient de souligner l'importance tant pour un chef d'entreprise que pour un salarié. Explications.
Quelles que soient vos responsabilités au sein d'une entreprise, une maladie, un
divorce ou une baisse d'activité conjoncturelle peuvent vous contraindre à ne plus
respecter les délais impartis pour le paiement de vos échéances fiscales, sociales ou
bancaires. Le ou les créanciers non payés (Fisc, URSSAF, Banques...) sont alors en droit
de demander la saisie de vos avoirs en compte à l'exception des sommes versées sur vos
contrats d'assurance vie, désormais insaisissables.
En effet, les juges de la 1ère chambre civile de la Cour de cassation (arrêt du 28/04/98
n° 733 PBR) viennent de décider que «l'administration fiscale ne peut saisir entre les
mains d'un assureur les sommes versées en exécution d'un contrat d'assurance vie par un
contribuable qui n'a pas payé ses impôts et ce, tant que l'opération n'est pas
dénouée car les sommes versées appartiennent à l'assureur jusqu'au dénouement du
contrat.»
L'affaire jugée
Un commerçant avait souscrit en 1982 un contrat «d'épargne-prévoyance-investissement»
d'une durée de 15 ans auprès d'une compagnie d'assurance (AGF vie), sur lequel il
effectuait des versements réguliers (primes périodiques). Ce contrat
garantissait :
* d'une part, pendant la durée du contrat, en cas d'invalidité totale et permanente du
souscripteur, le versement à celui-ci d'une rente ou, s'il venait à décéder, d'un
capital à son conjoint ou à ses enfants ;
* d'autre part, en cas de vie du souscripteur au terme du contrat, le versement à ce
dernier d'un capital.
Mais alors que son contrat était dans sa douzième année, ce commerçant a cessé de
payer sa TVA. L'administration fiscale de sa région a alors notifié à l'assureur par le
biais d'un «avis à tiers détenteur» (cf encadré) qu'il devait acquitter l'équivalent
de l'arriéré fiscal de son client. Les AGF ayant refusé de payer les impôts dus,
l'affaire a été portée devant la justice.
La cour d'appel de Grenoble (arrêt du 7/11/95) alors saisie, a donné raison aux AGF en
se basant sur la jurisprudence antérieure selon laquelle ce type de contrat ne constitue
pas une opération d'épargne faisant entrer le capital assuré dans le patrimoine du
souscripteur mais une opération de prévoyance. Par conséquent, les sommes capitalisées
sont insaisissables par un créancier (cf arrêts CA de Colmar 19 mars 1993 et CA de
Toulouse 24 octobre 1995).
Un jugement révolutionnaire
La Cour de cassation a entériné le jugement de la cour d'appel de Grenoble, mais en
innovant puisqu'elle n'a pas repris la distinction opérée pour justifier sa décision.
En se basant sur les articles L 132-8/9/12 et /14 du Code des assurances, les juges de la
Haute Cour ont décidé que tant qu'un contrat d'assurance vie est en cours, quel que soit
le type de contrat (placement ou prévoyance), les sommes versées demeurent la
propriété de l'assureur et ne peuvent donc être saisies par un créancier même par le
biais de la procédure particulière qu'est l'avis à tiers détenteur.
De plus, rappelant les conclusions d'un autre arrêt de la Cour de cassation du 25 octobre
1994, les juges ont précisé que si le souscripteur peut racheter son contrat comme
prévu par l'article L 132-21 du Code des assurances, cette faculté de rachat est
strictement personnelle et ne peut être exercée ni par ses représentants légaux, ni
par ses créanciers, y compris dans une procédure de redressement ou de liquidation
ouverte à l'encontre du souscripteur.
Au moment même où les épargnants se posent des questions sur le devenir des avantages
liés à la souscription d'un contrat d'assurance vie, cet arrêt confirme que ce
placement bénéficie de nombreux atouts malgré l'alourdissement récent et relatif de sa
fiscalité.
M.-C. Barbier
Qu'est-ce qu'un avis à tiers détenteur (ATD) ?L'ATD est un acte par lequel un percepteur saisit entre les mains d'un tiers des sommes
dont ce dernier est débiteur envers le contribuable ou simple dépositaire. En d'autres
termes, un avis à tiers détenteur vise à transférer au profit du Trésor Public la
créance qu'un redevable de l'impôt détient sur un tiers. Toutefois, l'ATD ne peut être
employé que pour le recouvrement des créances d'impôt et ne peut porter que sur des
sommes d'argent. |
L'HÔTELLERIE n° 2582 Hebdo 8 Octobre 1998