Roland Magne, président de la CFHRCD
L'Hôtellerie :
Avez-vous évoqué la baisse de la TVA sur la restauration ?
Roland Magne :
Bien sûr, mais dès le début de l'entretien Monsieur Austry m'a
signifié l'inutilité de toute discussion sur une TVA à 14 % en restauration. Les choses
étaient très claires, le dossier n'est pas ouvert dans la mesure où la réglementation
européenne ne prévoit pas, dans l'immédiat, de créer un 3e taux de TVA. La France se
conformera donc à cette réglementation, c'était, sur ce sujet, une fin de non-recevoir.
L'H. :
Est-ce un dossier sans espoir ?
R. M. :
Pour moi, pas du tout, si ce n'est que, dans l'immédiat, ce n'est pas
auprès du gouvernement français que l'on peut obtenir quelque chose d'autre que de faire
pression pour que, du taux de 20,6 qui, rappelons-le, était provisoire, nous revenions à
18,6 %. A nous aussi de savoir négocier des compensations avec le gouvernement, par
exemple un allégement des charges sociales.
L'H. :
Alors où est l'ouverture ?
R. M. :
A Bruxelles ! Et en la matière, j'ai plutôt bon espoir. La Commission
européenne vient d'établir un projet de texte très intéressant : il porte sur
l'établissement de 3 taux de TVA :
- un taux réduit réservé aux seuls produits de première nécessité et aux activités
sociales, il se situerait entre 4 et 5 % ;
- un taux normal à 17 % ;
- et un taux moyen réservé aux entreprises à forte intensité de main d'uvre à
12 %.
A nous de saisir cette opportunité pour faire qualifier les CHR de secteur "à forte
intensité de main d'uvre" et de faire pression auprès des commissaires
concernés pour que ce texte devienne une proposition officielle de la Commission afin
qu'elle soit soumise au Parlement européen et enfin adoptée par le Conseil des
ministres. C'est un mécanisme très long qui ne peut absolument pas nous satisfaire dans
l'immédiat mais nous devons profiter de cette opportunité pour préserver l'avenir de
nos entreprises, dans le cadre de l'harmonisation et éviter de se voir taxés au plus
haut taux.
L'H. :
Devant l'attitude de Bercy sur le dossier TVA, quelle a été votre réaction ?
R. M. :
Je n'ai pas du tout été surpris, c'est la réponse qu'ont donnée tous
les responsables politiques sur cette proposition à 14 %, à nous de proposer autre
chose. J'ai profité de sa réponse, un peu abrupte, pour dénoncer une fois de plus le
niveau excessif de la TVA sur la restauration. Chiffres à l'appui, j'ai insisté sur la
mise en danger d'un très grand nombre d'entreprises et j'ai présenté le dossier de la
déductibilité de la TVA sur les repas d'affaires.
L'H. :
Dossier fermé là aussi ?
R. M. :
Absolument pas, Monsieur Austry a été intéressé, c'est pour lui une
piste sérieuse à étudier. Il n'est pas du tout opposé à examiner nos propositions.
Aujourd'hui, les services de la Confédération suivent le dossier. Si nous obtenons cette
déductibilité, les restaurateurs pourraient, à partir d'une bonne communication auprès
des entreprises, connaître une réelle amélioration de leur activité et donc de leurs
marges.
L'H. :
Quels sont les autres sujets abordés ?
R. M. :
Nous avons dénoncé la concurrence déloyale que pourraient nous faire
les agriculteurs, autorisés par la loi agricole qui vient d'être adoptée à devenir
hôtelier ou restaurateur dans le cadre d'un statut beaucoup plus favorable que celui dont
bénéficient nos entreprises. Promesse nous a été faite que, dans le cadre de cette
activité, les agriculteurs auraient les mêmes obligations et les mêmes contrôles que
les hôteliers-restaurateurs. A nous d'être vigilants sur le terrain.
Nous avons fait connaître notre impatience sur le dossier de la redevance télévision
qui, depuis 2 ans maintenant, est soi-disant en instance. Ce qui fait qu'aujourd'hui les
plus petits hôtels sont injustement pénalisés. Il a encore une fois fallu tout
réexpliquer parce que le dossier ne semblait pas vraiment être d'actualité au
ministère.
L'H. :
Et sur le dossier social, avez-vous eu des assurances ?
R. M. :
Nous avons soumis aux services du ministère la création d'un
"chèque extra", ce qui permettrait aux entreprises qui recrutent dans l'urgence
de respecter la législation. Je dois reconnaître que nous avons eu un écho très
favorable, c'est un sujet qui rentrerait parfaitement dans la ligne de conduite du
ministre dans le cadre de la simplification des déclarations. Nous avons également mis
en avant les efforts considérables que faisaient actuellement nos entreprises en matière
de réduction du temps de travail de par l'application de la convention collective, le
poids que nous représentons en terme d'emplois et avons insisté sur l'absolue
nécessité de travailler sur la baisse des charges sociales.
L'H. :
Quelle est votre position sur la loi Aubry ?
R. M. :
Notre secteur est déjà dans un processus de RTT dans la mesure où nous
appliquons les règles de la convention collective. Qu'on laisse nos entreprises mettre en
place les 43 heures et nous verrons pour ouvrir des négociations plus tard. Nous ne
pouvons aujourd'hui en donner davantage sans contrepartie : au gouvernement de choisir ou
une baisse de la TVA ou un réel allégement des charges salariales.
L'H. :
Certains évoquent une fusion Confédération-FNIH. Qu'en est-il ?
R. M. :
Il n'y a aujourd'hui que le président de la FNIH pour tenir de tels
propos ! Ce n'est absolument pas à l'ordre du jour. Dès le début de mon mandat, j'ai
multiplié les contacts avec le président Gauthier, le président Jond, le président
Daguin, le président Feutré, mon objectif étant de travailler en commun avec les autres
instances patronales afin de définir des actions communes et de défendre ensemble
certains dossiers auprès des pouvoirs publics. Ça s'est parfaitement bien passé avec la
FAGIHT avec qui nous avons dernièrement signé un protocole d'accord et nous nous
retrouvons régulièrement avec le SNLRH pour mettre aux point dossiers et actions
communes. Nous avons entrepris avec l'UFCT, grâce à nos contacts avec F. Mischler
(président des Maîtres cuisiniers), B. Fournier (président Eurotoques) et G. Fulgraff
(président des Jeunes restaurateurs), une nouvelle démarche pour la reconnaissance du
métier de restaurateur et là encore nous avons signé un protocole d'accord national.
C'est vous dire que nous souhaitons renforcer la représentativité de cette profession. A
la Confédération, notre objectif est très clair : nous voulons une mobilisation de
l'ensemble des instances syndicales pour défendre les intérêts communs de nos
adhérents, sans polémique, sans fusion, sans absorption. Ce que je constate c'est que
depuis notre congrès auquel André Daguin, invité, a lancé une OPA sur la
Confédération, jamais il n'a consulté les autres centrales sur les dossiers en cours.
C'est dommage, sans discussion constructive, sans esprit d'ouverture, il est impossible
d'imaginer un rapprochement d'autant plus que chaque organisation se doit de conserver sa
spécificité, si nécessaire à la représentativité de nos professions. La base de
notre proposition est et restera un travail en intersyndicale de construction, et
l'élaboration d'actions cohérentes face aux pouvoirs publics. Ce que nous déplorons
c'est qu'actuellement ce ne soit pas possible d'y arriver avec la FNIH.
«A nous aussi de savoir négocier des compensations
avec le gouvernement, par exemple un allégement des charges sociales.»
Renforcement des liens entre la Confédération et la FAGIHTCréée voici 7 ans par la CFHRCD et la FAGITH, l'UNIHR (Union nationale des
indépendants de l'hôtellerie restauration) se renforce aujourd'hui par la volonté de
ses responsables, Jacques Jond et Roland Magne et de leurs équipes. C'est à Chambéry
qu'ils ont dernièrement consacré une journée de travail très dense à examiner,
ensemble, un certain nombre de dossiers. Des prises de position convergentes qui
permettaient d'aboutir à la signature d'un protocole entre les deux organisations qui ont
convenu de resserrer leurs liens et de renforcer les actions de communication pour
valoriser l'hôtellerie et la restauration traditionnelles. |
L'HÔTELLERIE n° 2585 Hebdo 29 Octobre 1998