Recherche de l'amiante
L'Hôtellerie :
Quels types de bâtiments sont visés par la réglementation ?
Jean-Pierre Potonnier :
Le décret n° 96-97 du 7 février 1996, modifié par le décret n° 97-855 du 12
septembre 1997, stipule que tous les immeubles, à l'exception des bâtiments ne comptant
qu'un seul logement, c'est-à-dire les maisons individuelles, doivent faire l'objet d'une
expertise portant sur la présence ou non d'amiante.
Tous les propriétaires d'immeubles bâtis collectifs doivent donc impérativement faire
expertiser leur bien et mettre éventuellement en uvre les solutions nécessaires
pour maîtriser les risques sanitaires liés à l'amiante.
Et tout ceci doit se faire en respectant une méthode réglementaire et des délais
établis.
L'H. :
Vous parlez de délais à respecter, est-ce à dire qu'il existe des dates buttoirs
pour la mise en uvre de ce décret ?
J.-P. P. :
En effet, il existe des dates limites. D'ailleurs, pour certains, elle est déjà
passée. Pour d'autres, il est encore temps de s'en préoccuper.
Pour les bâtiments construits avant 1950 ou après 1980, vous avez jusqu'au 31 décembre
1999 pour mettre en uvre les dispositions du décret. En revanche, pour les
établissements construits entre 1950 et 1980, la date limite d'exécution des travaux de
recherche était fixée le 31 décembre 1998. Cependant, nous ne saurions trop vous
conseiller de vous mettre rapidement en conformité. Le non-respect de ces dispositions
peut entraîner une amende maximale de 10 000 F pour les personnes physiques et de 50 000
F pour les personnes morales, même en l'absence de tout préjudice corporel. Sans parler
des autres sanctions pénales prévues notamment en matière d'homicide involontaire.
Sachez également que le non-respect des obligations de recherche et de décontamination
peut entraîner l'annulation d'une vente pour vice caché.
L'H. :
Dans un établissement du secteur CHR, où faut-il rechercher l'amiante ?
J.-P. P. :
Si amiante il y a, il se cache dans les produits de calorifugeage des tuyaux, dans
les flocages réalisés dans le cadre de la protection incendie et certaines dalles de
faux plafonds.
D'ailleurs, le décret 96-97 a été complété par le décret 97-855 qui élargit le
cadre d'application aux faux plafonds. En effet, certaines dalles fabriquées avant le 1er
janvier 1997 contiennent de l'amiante. En revanche, après cette date, elles ont été
fabriquées avec des fibres minérales sans amiante.
L'H. :
Qui est habilité à réaliser l'expertise "amiante" d'un établissement
?
J.-P. P. :
Vous devez obligatoirement faire appel soit à un bureau de contrôle, soit à un
technicien du bâtiment qualifié ayant souscrit une assurance professionnelle pour ce
type de mission. Seul un technicien qualifié peut certifier la présence ou l' absence de
ce matériau à risques dans le bâtiment.
En cas d'absence, il rédigera une attestation définitive à annexer au titre de
propriété. En revanche, si la présence d'amiante est révélée, il faudra procéder à
une évaluation de l'état de conservation des matériaux et produits concernés, et
prendre les mesures qui s'imposent.
L'H. :
En cas de présence d'amiante, que faut-il faire ?
J.-P. P. :
C'est en libérant des fibres dans l'air que l'amiante devient dangereux. Les
matériaux durs tels que l'amiante-ciment ne libèrent pas spontanément de fibres, sauf
lorsqu'ils sont sciés, découpés, percés ou poncés. En revanche, les flocages et
calorifugeages peuvent, en se dégradant, libérer des fibres d'amiante dans
l'atmosphère. Les dalles de faux plafonds également, si elles sont abîmées. Après la
détection d'amiante, il est donc nécessaire de procéder à l'évaluation de l'état de
conservation des produits en contenant. C'est lui qui déterminera s'il y a danger ou non.
Ainsi, selon une grille d'évaluation très précise, l'expert évalue l'état dans lequel
se trouvent les matériaux et produits contenant de l'amiante.
Si l'état de conservation est bon (N = 1), il suffira de faire procéder à un nouveau
contrôle dans les trois ans.
Si l'état de conservation est moyen (N = 2), il sera nécessaire de faire réaliser des
mesures d'empoussièrement par un laboratoire agréé. Si l'empoussièrement ne dépasse
pas 5 fibres/litre, une nouvelle vérification devra être effectuée dans un délai
maximum de 3 ans. Ce délai est ramené à 2 ans si l'empoussièrement est compris entre 5
et 25 fibres/litre. Et si l'empoussièrement atteint ou dépasse 25 fibres/litre, la
décontamination est obligatoire dans les 12 mois. Idem si avant même que soient
réalisées les mesures d'empoussièrement, les matériaux sont jugés fortement
dégradés (N = 3).
L'H. :
Pouvez-vous nous préciser clairement les missions du cabinet d'expertise et les
limites de ses compétences ?
J.-P. P. :
L'expert, qui, je le répète, ne peut être qu'un technicien du bâtiment
qualifié pour ce type de mission, commence par une visite complète de l'établissement.
Il recense visuellement les locaux présentant des flocages, calorifugeages et faux
plafonds. Puis, il procède à la vérification de la présence d'amiante dans les
matériaux et produits suspectés. D'ailleurs, après vérification, il apparaît que
beaucoup de ces matériaux ne contiennent pas d'amiante. Ils sont seulement fabriqués à
base de plâtre, fibres de verre, liège, laine de verre, laine de roche, polystyrène ou
autres. Cependant, il est important de lever tout doute. C'est pourquoi un prélèvement
et une analyse par un laboratoire agréé peuvent s'avérer nécessaires. Chez Louveau
Expertises, nous sommes habilités à effectuer les prélèvements qui sont ensuite
analysés par un laboratoire agréé. Puis, nous nous chargeons du rapport final.
En cas de présence révélée d'amiante, nous procédons alors à l'évaluation de
l'état de conservation des matériaux et/ou des produits concernés. Dans tous les cas,
nous rédigeons un rapport remis au propriétaire. Ce rapport peut être à tout moment
demandé par des commissions de contrôle ou les occupants du bâtiment.
Notre mission, en tant que technicien qualifié, s'arrête au diagnostic. Afin de
conserver notre obligation d'indépendance, nous ne pouvons intervenir comme maître
d'uvre pour la réalisation des travaux. En revanche, nous pouvons assister les
propriétaires pour la mise en uvre des mesures correctives et réaliser les
contrôles périodques obligatoires de l'état de conservation des matériaux et produits
contenant de l'amiante.
L'H. :
A qui revient la charge financière de l'expertise, des analyses et travaux
éventuels à effectuer ?
J.-P. P. :
Le décret n'évoque que les propriétaires. C'est à eux que revient l'obligation
de mettre en uvre les opérations nécessaires à la protection des occupants de
leur immeuble contre les risques sanitaires liés à une exposition passive à l'amiante.
C'est donc a priori à eux de supporter les coûts inhérents à cette démarche, sauf
indications contraires dans le bail commercial si l'exploitant n'est pas le propriétaire.
Pour permettre aux professionnels des CHR de s'acquitter de cette charge, Louveau
Expertises a étudié une tarification spéciale pour des établissements groupés
géographiquement, via un syndicat ou non.
Propos recueillis par Cécile Junod
L'amiante : un matériau à risquesLes études scientifiques menées sur ce matériau sont formelles : l'amiante est
cancérigène. Minéral fibreux de la famille des silicates, il se dégrade en libérant
des fibres microscopiques responsables d'une maladie pulmonaire appelée l'asbestose,
laquelle entraîne des difficultés à respirer pouvant conduire à l'insuffisance
respiratoire. L'amiante augmente également le risque d'apparition du cancer du poumon et
des formes rares de cancer de la plèvre et du péritoine. |
Quelles sont les échéances à respecter ? |
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Date de construction | Nature de la recherche obligatoire | Date limite des travaux | ||||
du bâtiment | de recherche | |||||
Avant 1950 | Recherche de présence d'amiante | |||||
dans les calorifugeages, flocages | Avant le 31.12. 1999 | |||||
et faux plafonds | ||||||
Entre 1950 et 1980 | Recherche de présence d'amiante | |||||
dans les calorifugeages, flocages | Avant le 31.12. 1998 | |||||
et faux plafonds | ||||||
Après 1980 | Recherche de présence d'amiante dans | |||||
les calorifugeages uniquement, | ||||||
et faux plafonds pour les immeubles construits | Avant le 31.12. 1999 | |||||
jusqu'au 1er juillet 1997 | ||||||
(date de permis de construire faisant foi) |
Louveau Expertises : 36 rue Marcel Sembat Tél. : 02 47 20 53 17 ou Bellegarde - 82370 Saint-Nauphary Tél./Fax : 05 63 66 26 26. |
L'HÔTELLERIE n° 2612 Hebdo 6 Mai 1999