Droit du travail
Dossier réalisé par David Bouchet
Le Code du travail envisage
ce type de licenciement dans trois situations :
l la faute sérieuse ;
l la faute grave ;
l la faute lourde.
Il n'y a pas d'autre précision dans les textes, ce qui peut poser des problèmes quant à
la qualification de la faute. Le risque est grand puisqu'une erreur d'appréciation de la
part de l'employeur peut amener à un licenciement abusif. Ce type d'erreur peut amener au
versement de dommages et intérêts importants au profit du salarié (6 mois de salaire
pour un employé avec 2 ans d'ancienneté dans une entreprise de plus de 11 salariés).
Dans tous les cas, la loi exige une cause réelle et sérieuse pour le licenciement d'un
salarié. Cela suppose que l'employeur soit objectif lors de l'appréciation de la faute
commise.
Il faut donc préciser la notion de faute en droit du travail. La faute est constituée
lorsque le salarié ne respecte pas, par exemple, un texte ou le règlement intérieur.
D'une manière générale, la jurisprudence estime qu'il y a faute lorsque le comportement
du salarié n'est pas conforme à celui que l'employeur pouvait attendre. Mais elle doit
être appréciée en fonction de plusieurs éléments dont l'an-
cienneté du salarié, son passé disciplinaire, son état psychologique, sa position
hiérarchique, sa volonté de nuire ou non à l'entreprise, l'étendue du préjudice pour
l'entreprise...
A titre d'exemple, un abandon de poste pourra constituer une faute grave alors qu'une
bagarre violente entre salariés ou un vol avec intention de nuire pourront constituer une
faute lourde. Il est important de bien qualifier la faute car les conséquences sur le
salarié ne sont pas les mêmes. La faute sérieuse permet au salarié de bénéficier
d'un préavis, des congés payés qui lui restent dus et, s'il a plus de deux ans
d'ancienneté, d'une indemnité de licenciement. La faute grave lui fait perdre
l'indemnité de préavis (il ne doit pas être effectué) et celle de licenciement. En cas
de faute lourde, le salarié ne perçoit ni indemnité, ni préavis, ni les congés payés
de l'année en cours.
La faute doit se produire lorsque le salarié est sous la subordination de l'employeur,
donc pendant les heures de travail. Il faut pouvoir prouver cette faute, et démontrer le
préjudice subi par l'employeur. Il faut également s'interroger sur une éventuelle
tolérance dans l'entreprise, vérifier que le type de faute en question est reproché de
la même façon à tous les salariés.
Lorsque l'employeur décide de licencier le salarié pour un motif disciplinaire, il doit
impérativement respecter la procédure.
n Convocation à un entretien préalable :
La convocation à un entretien préalable doit être faite par écrit (cf. modèle n° 1).
Ce courrier peut être communiqué au salarié par lettre recommandée avec accusé de
réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre doit
comporter un certain nombre d'éléments :
l L'objet de l'entretien : il
faut indiquer que l'on envisage le licenciement du salarié sans en donner les raisons ni
donner l'impression que la décision est déjà prise.
l La date de l'entretien :
s'il n'y a pas de représentant du personnel dans votre entreprise, la date de l'entretien
doit être fixée minimum 5 jours ouvrables après la date de remise en main propre. Si la
lettre est envoyée en recommandé avec accusé de réception, ce délai doit être
calculé à partir de la date de première présentation. En pratique, il faut rajouter le
délai d'acheminement postal. En effet, on compte 5 jours ouvrables à partir du lendemain
de la réception du courrier ou de la remise en main propre pour finir la veille de
l'entretien.
Exemple : Si vous postez votre lettre avec AR un lundi, elle ne sera présentée, au
mieux, que le mardi à votre salarié. Le premier des 5 jours ouvrables sera le mercredi.
Attention, les jours de repos hebdomadaires de votre salarié ne sont pas des jours
ouvrables.
Au mieux, l'entretien pourra avoir lieu le mardi suivant. En réalité, il ne faut pas
hésiter à prévoir large pour éviter toute erreur qui aurait pour conséquence de
vicier la procédure de licenciement. Il vaut donc mieux prévoir l'entretien le mercredi
ou le jeudi suivant.
S'il y a des représentants du personnel dans l'entreprise, ce délai n'est pas prévu par
la loi. En pratique, il faut compter 3 jours. Cela suffit en général pour permettre au
salarié d'avoir le temps de préparer cet entretien et se faire éventuellement assister.
l L'heure de l'entretien doit
être mentionnée ; il doit se dérouler pendant les heures de travail pour éviter tout
problème.
l Le lieu de l'entretien.
l La possibilité pour le
salarié de se faire assister soit par un membre du personnel soit, en l'absence de
représentant du personnel dans l'entreprise, par une personne extérieure. Il faut
mentionner que le salarié doit choisir cette personne sur une liste établie par le
préfet du département ou se déroule l'entretien préalable. Il faut également
mentionner que cette liste est tenue à la disposition du salarié à l'inspection du
travail ou à la mairie.
n L'entretien préalable
Il faut dire au salarié ce qui lui est reproché et lui permettre de s'expliquer. Il ne
faut pas dire que de toute façon votre décision est prise. C'est ce qu'on appelle un
entretien contradictoire. Le salarié doit donc être écouté et avoir une chance de se
justifier. Si malgré ses explications, vous prenez la décision de le licencier, vous
devrez alors lui notifier le licenciement. Le Code du travail vous oblige à respecter un
délai de réflexion minimum de 1 jour franc avant d'envoyer la notification de
licenciement au salarié.
n La notification de licenciement
Elle doit être faite par lettre recommandée avec accusé de réception (cf. modèle n°
3 en cas de faute sérieuse, modèle n° 4 en cas de faute grave et modèle n° 5 en cas
de faute lourde). Ce recommandé a l'avantage de fixer la date du début du préavis. En
effet, ce dernier commence à la date de présentation de ce courrier. Cette notification
doit être envoyée au moins de 1 jour franc après le jour prévu pour l'entretien
préalable. En pratique, si l'entretien était prévu un lundi, il faut attendre le
mercredi pour envoyer la lettre de licenciement au salarié. De la même façon, cette
notification ne peut avoir lieu plus de 1 mois après la date prévue pour l'entretien.
Elle doit contenir, en outre, la ou les causes du licenciement, c'est-à-dire en quoi
consiste la ou les fautes sérieuses, graves ou lourdes qui sont reprochées au salarié.
Il faut être très précis, un licenciement qui n'est pas ou est mal motivé est un
licenciement abusif. Ne soyez pas avare de détails. En pratique, ne vous limitez pas à
mentionner "licenciement pour retard", mais énumérez les jours où ces retards
ont été constatés et leurs durées. Si vous avez déjà mis en garde votre salarié
contre ces agissements, mentionnez les courriers que vous lui avez adressés et les
réponses qui vous ont éventuellement été faites.
Les griefs reprochés au salarié doivent être matériellement vérifiables,
c'est-à-dire que l'employeur doit être en mesure de démontrer les fautes commises par
le salarié. Cette preuve devra pouvoir être fournie dans le cadre d'une éventuelle
action devant le conseil de prud'hommes. A cet effet, l'employeur doit conserver des
preuves dès le commencement de la procédure de licenciement.
Les preuves peuvent être constituées par tous moyens. En général, il s'agit de
témoignages, de constats d'huissier ou n'importe quel autre document. Attention,
l'employeur ne peut pas avoir recours à des moyens de preuves frauduleux, déloyaux ou
clandestins. En pratique cela veut dire que l'on ne peut recourir à des procédés tels
que l'enregistrement par une camera dissimulée ou la filature. En ce qui concerne les
éventuels témoignages, l'attestation du témoin doit respecter une certaine forme pour
être valable devant les tribunaux (cf. modèle n° 6).
La notification peut également contenir les avertissements qui ont été adressés au
salarié mais ils ne devront pas être le motif du licenciement. En effet, les fautes qui
ont fait l'objet d'un avertissement ont été, par là, sanctionnées. La même faute ne
peut pas justifier un avertissement et un licenciement.
La ou les fautes reprochées au salarié doivent toutes être mentionnées dans la
notification de licenciement. En effet, l'employeur ne pourra pas à l'avenir se
prévaloir d'une autre cause de licenciement que celles écrites dans cette notification.
Si l'employeur désire dispenser le salarié de son préavis, il doit le mentionner
expressément.
n Le cas particulier de la mise à pied conservatoire
Comme nous venons de le voir, cette procédure peut être longue et il arrive que la faute
reprochée au salarié soit suffisamment préjudiciable et ne permette pas le maintien de
ce dernier dans ses fonctions. Pour protéger l'intérêt de l'entreprise, l'employeur
peut mettre à pied le salarié fautif. Il s'agit alors d'une mise à pied conservatoire
qui n'est pas une sanction (à la différence de la mise à pied disciplinaire qui
nécessite le respect d'une procédure). C'est une mesure provisoire destinée à écarter
le salarié de l'entreprise pour protéger cette dernière. La mise à pied conservatoire
est prononcée immédiatement et ne nécessite aucun formalisme, elle peut être faite
verbalement et être confirmée par écrit ensuite. Par contre, elle doit être suivie de
l'engagement de la procédure de licenciement (convocation à l'entretien préalable cf.
modèle n° 2). Attention, pendant la période de cette mise à pied conservatoire, le
salarié n'est pas payé. Cependant, si finalement la faute reprochée au salarié
s'avère ne pas être une faute grave, l'employeur devra payer le salarié pendant la
période de mise à pied conservatoire. En pratique si l'em-
ployeur ne souhaite pas retenir une faute grave contre son salarié pour le licencier, il
en a parfaitement le droit, mais il devra payer les jours de mise à pied conservatoire.
Modèle de convocation à l'entretien préalable (Modèle n° 1)Ce modèle n'est pas valable pour un licenciement économique. (4) Nous vous rappelons qu'il vous est permis de vous faire assister par une
personne de votre choix, extérieure à l'entreprise, figurant sur une liste dressée par
le préfet. Cette liste peut être consultée : Veuillez agréer, Monsieur, (1) Choisir l'une ou l'autre. Si la lettre est remise en main propre, faire signer
le salarié avec la mention manuscrite "remis en main propre ce jour", faire
dater et conserver un exemplaire original. |
Modèle de convocation à l'entretien préalable avec mise à pied à titre conservatoire pendant toute la procédure (Modèle n° 2)Lorsque le salarié a commis une faute suffisamment préjudiciable à l'entreprise, l'employeur veut se séparer rapidement du salarié. La procédure de licenciement doit cependant être respectée. Pour protéger son entreprise, l'employeur peut alors prononcer une mise à pied à titre conservatoire. La mise à pied à titre conservatoire, qu'il ne faut pas confondre avec la mise à pied à titre disciplinaire, peut être prononcée immédiatement par voie orale. L'employeur confirme par écrit cette mise à pied à titre conservatoire lors de la convocation à l'entretien préalable. Entreprise : .......................... A .......................... Le
...../......./........ Monsieur, (4) Nous vous rappelons qu'il vous est permis de vous faire assister par une
personne de votre choix extérieure à l'entreprise, figurant sur une liste dressée par
le préfet. Cette liste peut être consultée : Veuillez agréer, Monsieur, (1) Choisir l'une ou l'autre. Si la lettre est remise en main propre, faire signer
le salarié avec la mention manuscrite "remis en main propre ce jour", faire
dater et conserver un exemplaire original. |
Modèle de lettre de licenciement pour faute sérieuse (Modèle n° 3)Entreprise : .......................... A ...................... Le
...../......./....... Monsieur, Fait à ..............., le ........../........../............. (1) Indiquez clairement et précisément le ou les motifs, en donnant le plus possible de détails. Rappelez les faits reprochés avec les circonstances, les dates, les lieux, les personnes présentes ainsi que les courriers adressés au salarié (éventuellement avertissements ou autres qui sont rappelés pour mémoire et qui ne peuvent justifier à eux seuls le licenciement). Indiquez les faits nouveaux depuis les avertissements. Expliquez les conséquences préjudiciables pour l'entreprise. Cette partie de la lettre est la plus importante, vous ne pourrez rien rajouter à l'avenir. Enfin, n'oubliez pas que vous devez pouvoir prouver ce que vous écrivez. |
Modèle de lettre de licenciement pour faute grave (Modèle n° 4)Entreprise : .......................... A ...................... Le
...../......./....... Monsieur, Fait à ..............., le ........../........../............. Signature |
Modèle de lettre de licenciement pour faute lourde (Modèle n° 5)Entreprise : .......................... A ...................... Le
...../......./....... Monsieur, Suite à l'entretien que nous avons eu le ..../...../...., nous sommes au regret de
vous informer que nous avons pris la décision de vous licencier aux motifs suivants (1) :
Fait à ..............., le ........../........../............. (1) Indiquez clairement et précisément le ou les motifs, en donnant le plus
possible de détails. Rappelez les faits reprochés avec les circonstances, les dates, les
lieux, les personnes présentes ainsi que les courriers adressés au salarié
(éventuellement avertissements ou autres qui sont rappelés pour mémoire et qui ne
peuvent justifier à eux seuls le licenciement). Indiquez les faits nouveaux depuis les
avertissements. Expliquez les conséquences préjudiciables pour l'entreprise. Cette
partie de la lettre est la plus importante, vous ne pourrez rien rajouter à l'avenir.
Enfin, n'oubliez pas que vous devez pouvoir prouver ce que vous écrivez. |
Attestation de témoin (Modèle n° 6)L'attestation doit être rédigée à la main, datée et signée par le témoin, qui
devra en outre joindre la photocopie recto-verso de sa carte d'identité ou un autre
document officiel justifiant de son identité (carte de séjour, ...). Je soussigné :
....................................................................................................................
Fait à ..............., le ........../........../............. |
L'HÔTELLERIE n° 2618 Hebdo 17 Juin 1999