En plus de son propre catalogue de restaurants, Eurotunnel lance avec le CDT du Pas-de-Calais une brochure tirée à 500 000 exemplaires où la restauration tient la vedette.
Eurotunnel et le comité départemental de tourisme du Pas-de-Calais lancent de concert un mini-guide nommé Discover Pas-de-Calais destiné à la clientèle britannique qui voyage par le tunnel. Une manière de conjurer le sort et de refuser la fatalité d'un éventuel déclin du tourisme après l'abolition du duty free. Ce guide est rédigé et préparé par le CDT, et diffusé essentiellement par Eurotunnel dans ses bureaux d'information britannique. Ce tirage prévu à 500 000 exemplaires devrait être épuisé pour janvier 2000. Il est prévu très rapidement une mise à jour et une amélioration du document à la lumière de l'enquête d'opinion intégrée dans le guide lui-même. Le guide divisé en six chapitres par sous-régions contient des informations pratiques, une rubrique shopping, et un large chapitre touristique dans lequel sont intégrés l'hébergement et la restauration. Dans cette première mouture, le CDT a fait le choix de se limiter aux hôtels et restaurants membres d'associations et clubs qui sont habituellement ses partenaires. La liste peut sembler un peu courte, et elle l'est effectivement quand on connaît l'importance du tissu local. Plus que le haut de gamme, le CDT a recherché le dynamisme commercial et l'attention du client, qualités mises en uvre en groupe. L'invitation à se regrouper est donc plus que transparente.
Jusqu'à cinq cents clients par soirée
Pour Bill Dix, directeur général des navettes Eurotunnel, l'expérience n'est pas tout
à fait nouvelle. Eurotunnel diffuse déjà un guide de poche nommé If you enjoy french
food, you'll appreciate our service. C'est l'outil d'Eurotunnel restaurant réservations
services, qui met un numéro de téléphone et un e-mail à la disposition de ses clients
britanniques pour réserver un aller-retour et une bonne table, souvent sur la journée ou
dans la même soirée. Le guide contient une trentaine de noms et coordonnées, avec selon
une nomenclature bien précise les moyens d'accès et situation, une fourchette de prix et
des éléments de menus. En grande partie, du moins pour les restaurants situés à moins
de trente minutes du terminal, les enseignes recoupent d'ailleurs celles de Discover
Pas-de-Calais, à l'ambition plus large. Les enseignes, mais pas les adresses et numéros
de téléphones intentionnellement absentes du guide d'Eurotunnel. Son puissant service de
réservations remplit les trains, encore un peu vides le week-end, d'abord, et donne les
adresses ensuite. "Après près de six ans d'exploitation, nous avons conquis 60 %
de part de marché. Nous n'avons pas seulement pris des parts aux ferries, mais nous avons
largement accru le marché total", commente Bill Dix. Constatant très rapidement
que la gastronomie était un motif majeur de très court séjour, voire d'aller-retour sur
une demi-journée pour une clientèle aisée, Eurotunnel a travaillé ce créneau
spécifique par mailing à partir d'une base de données qui comprend aujourd'hui un
million et demi d'adresses. "Nous avons à présent un groupe important de clients
qui dépensent beaucoup. Quelquefois, 400 à 500 personnes prennent les navettes qui
partent après 18 heures, uniquement pour prendre un bon repas", compte Bill Dix.
Les restaurateurs s'en sont aperçus. Dans certaines maisons, la clientèle britannique
frôle ou dépasse les 50 % du chiffre d'affaires. Hôtelier-restaurateur à
Blériot-Plage, à moins de dix kilomètres du terminal, Philippe Mené ne tient pas de
statistiques du phénomène, mais il apprécie ces touristes britanniques qui viennent
vers sept heures et demi et repartent vers onze heures prendre la dernière navette. Ce
sont des anniversaires, une fête entre amis, ou un couple qui vient uniquement faire un
bon repas. Il y a les connaisseurs qui savent ce qu'est un menu et une carte des vins et
ne regardent pas à la dépense. Il y a ceux qu'il faut guider de A à Z, qui demandent
timidement le menu basique et "le vin de la maison" (qui propose beaucoup de
vins mais pas de vin de la maison) et à qui le maître d'hôtel apprend à goûter les
différents vignobles français. "Nous sommes très prudents avant la suppression
du duty-free, les prix de traversée vont monter", craint Philippe Mené. On
n'aimerait pas à Calais voir disparaître cette jolie clientèle.
A. S.
L'HÔTELLERIE n° 2620 Hebdo 1er Juillet 1999