Distinction
Aux portes sud de Grenoble,
Bresson n'est qu'un petit village de 700 habitants... avec tout de même trois châteaux
et un golf 18 trous.
Depuis quatre mandats, Jean-Pierre Chavant y exerce son activité de maire, parallèlement
à son activité professionnelle de cuisinier, derrière le piano de la maison
familiale... dont Danièle, sa sur, assure la direction. L'aventure du restaurant
Chavant débute en 1933. Cette année-là, Emile Chavant, chef de cuisine à l'Hôtel de
Paris à Monte-Carlo, rencontre Suzanne Gouraud. Le coup de foudre est immédiat et il
quitte les paillettes de la Principauté pour ce qui s'appelle encore l'Auberge des
Marronniers. Chez les Chavant, la cuisine est une histoire de famille. Le grand-père, lui
aussi prénommé Emile, avait déjà choisi cette voie au Café Parisien à Grenoble.
Etoilé au Michelin dans les années 70, le père conservera jusqu'à sa mort, en 1990, le
macaron pour la maison à laquelle il a donné son nom et dans laquelle sa fille est née.
Pour Danièle, la voie est donc toute tracée. C'est d'abord l'école hôtelière
Lesdiguières à Grenoble où ses copains ont pour nom Jean-Paul Lacombe, Michel Troisgros
et Philippe Faure-Brac. Ensuite, avec le brutal décès de sa mère à 54 ans, c'est le
retour au bercail en 1966. Elle n'en est jamais repartie depuis ! "J'aime beaucoup
ma maison. Si c'était à refaire, je referais le même parcours", affirme-t-elle
aujourd'hui.
Présidente de l'office de tourisme de Grenoble pendant 15 ans avant sa...
"municipalisation", première présidente des anciens élèves de l'école
hôtelière, elle vient donc de se voir remettre les insignes de la Légion d'honneur par
Francis Perrin, ex-sociétaire de la Comédie française et directeur du Théâtre de
Versailles.
"Je souhaitais que ce soit lui, un ami de... vingt ans. Ce fut un réel plaisir
car il l'a fait avec beaucoup d'humour et de gentillesse, profitant d'un jour de relâche
pour venir à Bresson. C'était avant tout un rendez-vous d'amis de la famille et de la
maison."
La maison justement : un restaurant avec service dans le jardin dès les premiers beaux
jours, sept chambres 4 étoiles et, depuis novembre 1998, la Cave d'Emile où dorment de
belles bouteilles et où les clients peuvent prendre l'apéritif.
"La maison, c'est un cadeau pour les enfants, en espérant qu'ils auront envie de
continuer. Je ne sais pas s'ils choisiront cette voie, mais nous irons au bout de nos
racines, de notre joie de vivre. Ici en province, nous connaissons tous nos clients. C'est
ce qui fait le charme de notre métier. Nous avons un rôle important à jouer. On dit
souvent que nous sommes des marchands de bonheur. C'est vrai et chacun doit s'en persuader",
dit encore Danièle Chavant.
En lui remettant sa décoration, Francis Perrin avait tenu des propos presque similaires.
"L'art de cuisiner, la manière de recevoir sont des qualités de la vie exigeant
tous deux la capacité de créer, de donner aux autres, de se renouveler et d'entretenir
l'enthousiasme et la passion pour ce que l'on fait, avec disponibilité et générosité."
J.-F. Mesplède
Photo de famille à l'occasion de la remise du ruban rouge à Danièle Chavant
avec son fils, Henri Ducret et Francis Perrin.
L'HÔTELLERIE n° 2621 Hebdo 08 Juillet 1999