Réduction du temps de travail
De l'aveu même
des partenaires sociaux ayant participé à l'élaboration de l'accord (à l'exception de
la CFDT qui ne l'a pas signé), cette négociation fut "la première dans laquelle
un dialogue de haut niveau entre partenaires professionnels et sociaux eut lieu".
Et il est vrai qu'en ce matin du 27 juin, durant le point presse annonçant les modalités
de l'accord, l'ambiance était extrêmement courtoise et détendue entre les différents
partenaires. Ce fait est à mettre en relief à plusieurs titres. Il est tout d'abord
très rare d'entendre des organisations salariales féliciter les organisations patronales
pour la bonne volonté qu'ils ont pu mettre dans la négociation d'un accord de branche,
"l'usage" étant plutôt de regretter que tel ou tel point n'ait pas été
abordé ou ait été évincé de l'accord. De plus, une telle embellie dans les relations
entre les partenaires est bénéfique à chacun : au vu de l'expérience dont est issu
l'avenant sur la réduction du temps de travail, chaque partie sait aujourd'hui qu'en cas
de problème elle a face à elle un interlocuteur prêt à l'écouter et qui prendra en
compte ses arguments. La recherche du consensus étant toujours plus productive qu'un
affrontement direct, le plus souvent stérile, il y a fort à parier qu'en ce cas, les
problèmes se résorberont de manière plus facile et rapide.
Le principe posé par l'accord est que toutes les entreprises évoluant dans le secteur de
la restauration rapide, quel que soit le nombre de leurs salariés, doivent réduire à 35
heures le temps de travail de leurs employés à temps plein à partir du 1er novembre
1999.
Cette réduction du temps de travail se fera sans perte de salaire, et deux primes seront
attribuées en 2000 et 2001.
Répartition des horaires
Quatre méthodes, à la discrétion de l'employeur, peuvent être employées pour
répartir la durée du travail des salariés : les 35 heures peuvent être octroyées de
façon hebdomadaire, c'est-à-dire que le salarié peut, pour 5 jours de travail,
effectuer des journées de 7 heures de travail, ou de 8 h 45 si la répartition s'effectue
sur 4 jours.
Il est également possible à l'employeur de faire en sorte que, sur l'année, la moyenne
hebdomadaire soit de 35 heures. En pratique, si le salarié effectue par exemple 39 heures
de travail par semaine, il bénéficiera de 22 jours de repos supplémentaires dans
l'année.
L'employeur pourra également opérer une modulation sur une période déterminée (d'une
durée qui ne peut être supérieure à une année) du temps de travail des salariés à
temps plein. La durée maximum de travail par semaine ne peut excéder 42 heures. S'il est
fait application d'une telle modulation, les heures supplémentaires effectuées ne
donnent lieu ni à majoration ni à repos compensateur, car elles sont récupérées à
une période plus "creuse" de l'année.
Enfin, les employeurs peuvent mettre en place une auto-programmation des horaires par les
salariés en fonction des postes et des créneaux horaires disponibles. Ce dispositif
d'horaires individualisés a le mérite de la souplesse et favorise l'organisation de son
temps de travail par le salarié. L'accord prévoit d'ailleurs des possibilités de
reports d'heures d'une semaine sur l'autre pour constituer un crédit d'heures pour
l'employé.
En ce qui concerne la rémunération des salariés, plusieurs points sont abordés dans
l'accord : l'avenant règle tout d'abord la question du salaire de ceux qui travaillaient
jusqu'alors plus de 35 heures par semaine. Lors du passage à 35 heures, ils vont pouvoir
bénéficier d'une indemnité dégressive de réduction du temps de travail qui
correspondra à la différence entre le salaire qu'ils touchaient calculé sur leur ancien
temps de travail, et le salaire calculé sur 35 heures. Cette indemnité sera diminuée
régulièrement en fonction des augmentations de rémunération qui lui seront versées.
Si, au 1er janvier 2002, il subsiste une part d'indemnité réduction du temps de travail
dans sa rémunération, le résidu sera incorporé à sa rémunération mensuelle de base
afin de la faire disparaître. Enfin, les salariés à temps plein bénéficieront de deux
primes d'aide à la réduction du temps de travail, l'une au 31 juillet 2000 et la seconde
au 31 juillet 2001. Suivant le niveau du salarié, ces primes s'étaleront entre 816 et 1
254 F.
Concernant les contrats à temps partiel (c'est-à-dire 80 % des 80 000 employés du
secteur de la restauration rapide), ceux-ci ne bénéficient pas, a priori, de la
réduction du temps de travail. En revanche, à partir du moment où ils en font la
demande, leur employeur ne peut leur refuser une diminution de 10 % de leurs horaires de
travail. Si une telle demande n'est pas formulée, les salariés à temps partiel
bénéficieront en revanche, sur trois ans, et en compensation du maintien de leurs
horaires de travail, d'une augmentation de leur taux horaire minima. Cette augmentation,
d'un montant total de 11 %, est divisée en trois échéances : la première au 1er
novembre 1999 sera de 4 % du taux horaire applicable au 1er janvier 1999, puis 4 %
également au 1er novembre 2000 et enfin 3 % au 1er novembre 2001.
Les partenaires ont également pris soin de prévoir des dispositions concernant les
heures supplémentaires. Annuellement, le contingent d'heures supplémentaires est fixé,
pour les entreprises de moins de 20 salariés, à 190 heures par an et par salarié pour
une période transitoire d'un an à compter du 1er novembre 1999, et ce afin de faciliter
la mise en uvre de la loi Aubry dans les petites structures. Au 1er novembre 2000,
ce contingent est ramené à 130 heures. Dans les entreprises de restauration rapide de
plus de 20 salariés, le contingent est fixé à 130 heures par an et par salarié à
partir du 1er novembre 1999.
Enfin, les entreprises ayant opté pour une répartition modulée du temps de travail, et
ce quel que soit le nombre de leurs salariés, ne bénéficient que d'un contingent de 90
heures supplémentaires, car la modulation leur permet déjà une grande souplesse.
Les cadres, quant à eux, bénéficient d'un régime un peu moins protecteur. Trois
catégories de cadres sont définies dans l'accord : les cadres supérieurs ne
bénéficient pas de la réduction du temps de travail. Les cadres bénéficiant d'une
large autonomie dans l'organisation de leur mission, dont la durée de travail est
incontrôlable, percevront quant à eux une allocation d'au moins 14 jours de repos
annuels. Les autres personnels d'encadrement (directeurs de restaurant, leaders,
managers...) verront leur durée de travail diminuer à 35 heures. Il va sans dire que
chaque établissement ou chaque enseigne devra donc prévoir des systèmes de
vérification pointus afin de s'assurer des horaires de ces cadres, qui, en règle
générale, ont plutôt tendance à "exploser".
Aides gouvernementales
Enfin, l'accord prévoit des dispositions particulières pour les entreprises souhaitant
bénéficier des aides du gouvernement pour la réduction du temps de travail. Deux cas
sont présentés par l'avenant.
Tout d'abord, l'entreprise de moins de 50 salariés pourra, sans négociation au niveau de
l'entreprise, conclure auprès de la direction départementale du Travail et de l'Emploi
et de la Formation professionnelle une convention de réduction collective de la durée du
travail. La durée du travail devra être réduite d'au moins 10 % et devra porter le
nouvel horaire de travail à 35 heures au plus tard le 1er novembre 1999. L'entreprise
bénéficiera des aides de l'Etat si elle diminue de 10 % le temps de travail des
salariés effectuant déjà moins de 39 heures par semaine. De plus, elle doit s'engager
à embaucher dans l'année un minimum de 6 % de salariés à temps plein, sachant que
l'augmentation de la durée du travail d'un salarié à temps partiel est assimilée à
une embauche. Une indemnité dégressive de réduction du temps de travail est distribuée
aux salariés dont le temps de travail a diminué.
Si un accord d'entreprise ou d'établissement a été conclu, les entreprises de plus de
50 salariés pourront également, avant le 1er novembre 1999, conclure une convention avec
la DDTEFP. Il leur est possible de prévoir un périmètre particulier d'application
(site, catégorie de salariés...) de la RTT. L'entreprise doit réduire à 10 % la durée
du travail de son personnel et porter l'horaire à un maximum de 35 heures. La réduction
de 10,26 % du temps de travail des salariés effectuant 39 heures hebdomadaires permet à
l'entreprise de bénéficier des aides. De plus, elle devra s'engager à embaucher 6 % de
salariés à temps plein. Là encore, les salariés dont le temps de travail est réduit
bénéficieront d'une indemnité dégressive de réduction du temps de travail.
C. Pouant
L'HÔTELLERIE n° 2621 Hebdo 08 Juillet 1999