Le mariage est une source de
profit pour de nombreux secteurs d'activités et notamment ceux qui touchent de près ou
de loin
l'activité des banquets et des
réceptions. Les professionnels concernés ont donc pu se réjouir de la récente reprise
des ma-
riages en France. En diminution constante jusqu'en 1996, le nombre d'unions nouvelles
fait, depuis, un retour marqué puis-
que l'on est passé, selon l'Insee, de 254.000 célébrations en 1995 à 280.600 en 1996
et 284.528 en 1997. Aucunement lié à un effet de mode, cet engouement serait plutôt,
selon l'Institut français
de statistiques, le résultat de réformes fiscales (suppression des avantages fiscaux des
concubins en 1996). Avec 2.428 mariages en moins en 1998 (- 0,9 % par rapport à 1997), on
peut conclure à la fin de la miraculeuse ascension et à une tendance nouvelle à la
stabilisation. Malgré tout, le marché de la cérémonie est aujourd'hui plus riche et
plus diversifié et l'activité économique engendrée, en réelle croissance. Selon la
revue Wedding trend news du groupe Mariée Magazine, les Français
dépensent jusqu'à 14 milliards de francs
pour cette grande cérémonie. "Aujourd'hui, le mariage prend une allure plus
festive et plus exceptionnelle encore car l'acte de mariage est plus libre",
analyse le magazine. En France, le budget moyen d'un mariage oscille entre 40.000 et
60.000 francs, selon une étude du Revenu Français et 92.000 francs, selon une
enquête réalisée par Mariée Magazine auprès de ses lecteurs. Selon ces
derniers, le plus gros poste de dépense est la réception qui représente 43,5 % du
budget global et pour laquelle les futurs époux dépensent en moyenne 37.000 francs.
Enfin, 75,8 % des personnes questionnées organiseront un vin d'honneur, suivi d'une
réception.
Le traiteur, chouchou de la réception
Pour les restaurateurs, hôteliers et traiteurs, l'activité des réceptions familiales et
des mariages peut constituer un excellent revenu d'appoint et un moyen très efficace de
promotion, quoiqu'elle ne représente qu'une faible part de leur chiffre d'affaires total
(environ 10 % du CA total des grands traiteurs parisiens) et que les manifestations ne
soient pas toujours faciles à traiter. "Ainsi, bien que l'organisation d'un
mariage implique une démarche très spécifique, il existe un effet de synergie réel
entre ce type de manifestations et les banquets professionnels. Le mariage est un bon
moyen de renforcer son image de marque et de convaincre une clientèle affaires
potentielle", assure Diane Deblyck, directeur général du traiteur Saint-Clair.
Pour le restaurateur, l'activité n'est malheureusement pas simple à gérer car elle
nécessite la mise en place d'une logistique dont seules les grandes structures disposent.
Par ailleurs, il faut mobiliser le personnel souvent très tard dans la nuit. Les grands
restaurateurs travaillent parfois avec des traiteurs, complémentaires en termes de moyens
matériels notamment. Les autres n'acceptent généralement que des réceptions de moindre
ampleur et sur un créneau plutôt moins haut de gamme. En fait, selon une étude BVA
réalisée en 1996, seulement 17 % des cérémonies ont lieu dans les restaurants. Ce sont
les salles de réception qui ont la cote puisque 53 % des futurs mariés optent pour cette
alternative, qui apporte souvent plus de souplesse qu'ailleurs. Au final, les traiteurs
sont donc les heureux gagnants puisque, selon Mariée Magazine, 66 % des clients
font appel à leurs services. Les plus gros budgets s'orientent vers les grandes maisons
(Saint-Clair, Dalloyau, Potel, Flo, Riem Becker, etc.), qui ne proposent rien à moins de
500 francs par personne.
Un maximum de prise en charge
La tendance actuelle se porte vers le buffet "clés en main". "Le client
cherche à se libérer de toutes les contraintes liées à l'organisation. Grâce au
buffet clés en main, il ne s'occupe de rien", explique Michel Riem, p.-d.g. de
Riem Becker. "Nos clients sont de plus en plus attirés par une prestation
complète, bien que cela nécessite un investissement substantiel", renchérit
Fabienne Feidt, responsables des mariages chez Flo. Chez Saint-Clair, tandis que 20 % de
la clientèle organisent la fête dans la résidence familiale et 10 % choisissent une
salle indépendante, 70 % demandent une prestation incluant le lieu de réception. Il
existe néanmoins des alternatives "traiteurs" moins onéreuses. Les futurs
époux peuvent, en effet, s'adresser à d'autres professionnels, qui sont nombreux à
regarder d'un oeil nouveau ce métier en pleine mutation : pâtissiers, boulangers et
charcutiers ont saisi l'opportunité de démontrer leur savoir-faire et même les grandes
surfaces s'y essayent. A noter aussi que la tendance est à choisir des traiteurs qui ne
sont pas spécialement situés dans la région où se déroule la cérémonie. En raison
des prix pratiqués, la province a des atouts indéniables dans ce domaine par rapport aux
traiteurs parisiens. "Du fait d'une logistique beaucoup moins coûteuse, les
traiteurs de province peuvent proposer des prix très compétitifs", confirme
Fabienne Feidt.
Personnalisation de l'offre
"Si la tendance est à l'originalité et à la personnalisation, on en a bel et
bien terminé avec les fastes des années 1980 et les manifestations "poudre au yeux",
déclare Isabelle Bedouk, rédactrice en chef au groupe Mariée Magazine. Aujourd'hui, on
préfère inviter moins de monde. Les très grosses réceptions se font plus rares,
surtout à Paris et en région parisienne, sachant que de plus en plus, les Parisiens
aiment à retrouver leur région d'origine pour les fêtes familiales. Selon, l'étude
lecteurs Mariée Magazine, la majorité des manifestations (61,5 %) accueille entre
100 et 150 personnes. Seulement un quart des couples réunira plus de 150 convives. Les
tables en U abdiquent de plus en plus face aux tables rondes qui permettent de placer les
invités selon les affinités et sont plus conviviales. Les repas tendent aussi vers plus
de sobriété : le dîner ne se termine plus au petit matin, les alcools forts sont à la
traîne et les digestifs passés de mode. Au contraire, "vin et champagne sont à
l'honneur puisqu'ils sont plébiscités par plus de 83 % des mariés", indique
Isabelle Bedouk. Les cocktails font désormais fureur, et si malgré tout, on choisit un
repas assis, le buffet est préféré pour le dessert où la pièce montée n'est plus là
que pour la forme. Néanmoins, d'une manière générale, la province est moins sensible
à ces dernières tendances et reste relativement conservatrice dans les banquets de
mariages. En termes d'aménagement et de décoration, on recherche là aussi moins la
sophistication quoique l'on s'oriente vers plus d'originalité. Ainsi, les réceptions se
veulent de plus en plus thématiques. "Ce qui marche, en ce moment, ce sont les
thématiques régionales (provençales, alsaciennes, maritimes, etc.), de terroir,
exotique ou asiatique", explique Isabelle Bedouk. Les mariés veulent un mariage
qui se démarque et qui marque les invités. Les traiteurs doivent faire un sérieux
effort de mise en scène. "Celui qui se contente d'aligner les produits sur un
buffet peut se poser des questions quand à son avenir", explique Michel Riem. Et
surtout, "les mariés veulent un univers qui leur ressemble. Le traiteur se doit
de valoriser son client", affirme Diane Deblyck. Le mariage est avant tout
personnalisé et authentique. Les clients vont jusqu'à participer à la décoration
florale de la salle et les amis se chargent de plus en plus de l'animation à travers
chansons, sketches et autres surprises. C'est une uvre collective en somme.
Une audace mesurée
En ce qui concerne l'aspect culinaire, la démarche demeure très différente. "Vendre
des menus très originaux dans les mariages est presque impossible. Très souvent, ça ne
passe pas", assure Michel Riem. La demande reste très classique et
traditionnelle. Finalement, "un mariage à l'asiatique avec sushis au menu demeure
un exemple marginal, initiative d'une élite parisienne", ajoute un traiteur
lyonnais. En fin de compte, l'originalité a ses limites car si les jeunes époux
souhaitent rompre avec le classicisme, ils le font de manière tempérée afin de ne pas
blesser les générations plus âgées. Et surtout, l'organisation d'un mariage nécessite
un investissement très lourd qui implique une prise de risque minimum. Et un intéressé
de conclure : "On n'est sensé se marier qu'une fois dans sa vie. On n'a donc pas
le droit à l'erreur."
A. V.
Sources : Etude lecteurs Mariée Magazine/1996
Sources : Etude BVA/1996
L'HÔTELLERIE n° 2621 Supplément Economie 08 Juillet 1999