On croyait que les clients d'hôtels avaient la dent dure contre le petit-déjeuner servi dans les hôtels. Une récente étude quali-quantitative réalisée par Coach Omnium nous prouve le contraire : 92 % des clients d'hôtels sont globalement satisfaits de cette prestation hôtelière, tant critiquée autrefois. Justement, 53 % d'entre eux trouvent aussi que de nombreux efforts ont été faits par les professionnels durant ces dernières années pour améliorer ce premier service du matin. Même s'ils pensent que tous les hôteliers ne se sont pas encore suffisamment mobilisés pour rendre la chose performante et séduisante. Il faut dire que la généralisation des buffets dans les chaînes, y compris dans les établissements superéconomiques, suivies par de nombreux hôtels indépendants, a redoré le blason du petit-déjeuner. D'ailleurs, le buffet est préféré par près de 65 % des clients d'hôtels, contre près de 1/4 d'irréductibles hôtes partisans du plateau servi dans la chambre. Avec la richesse des buffets, le client y a perdu sans doute en service, mais y a gagné en choix de produits et en liberté de mouvement.
Le plébiscite des produits régionaux
Aujourd'hui, 77 % des voyageurs disent prendre systématiquement un petit-déjeuner quand
ils sont à l'hôtel, alors qu'ils sont 90 % à le prendre chez eux. Ce décalage
s'explique par le fait que les clients n'ont pas toujours le temps de déjeuner en
déplacement, et notamment parfois à cause des horaires de service dans les hôtels
qu'ils fréquentent. D'ailleurs, plus on descend en gamme hôtelière, et plus les taux de
captage de la clientèle au petit-déjeuner sont médiocres. Dans beaucoup
d'établissements superéconomiques, jusqu'à 40 à 45 % des clients peuvent partir le
ventre vide. Parmi les produits vedettes, on trouve bien sûr le café. On en consomme
plus souvent en voyage professionnel, avec 72 % de buveurs de café, qu'en voyage privé
de week-end, par exemple (seulement 58 %). C'est en effet le stimulant choisi en priorité
pour aider à démarrer une journée chargée de travail et de rendez-vous. Les amateurs
de thé sont entre 20 % (en semaine) et 28 % des clients (en week-ends/vacances). Dans
tous les cas, quand on va à l'hôtel, on ne se prive pas. Le Français compose son repas
de manière bien plus élaborée et diversifiée que chez lui (voir encadré). Jus
d'orange, croissants, viennoiseries, fruits frais, yaourts deviennent la nourriture de
base du "petit-déjeuneur" à l'hôtel. D'ailleurs, près d'un voyageur sur
trois déclare qu'il enrichit volontiers son petit-déjeuner dans l'idée de
"sauter" son déjeuner. Les hôteliers sont, bien malgré eux, des sortes de
para-concurrents des restaurateurs à midi ! L'étude de Coach Omnium nous apprend
également que 78 % des clients d'hôtels sont sensibles aux produits régionaux proposés
à l'occasion des petits-déjeuners à l'hôtel : spécialités de viennoiseries,
confitures et miels locaux, charcuterie de pays, fromages du cru... C'est une manière de
découvrir une région et de faire connaissance avec des nourritures insolites. On aime
aussi que les hôteliers jouent les saisons en présentant des fruits frais, mais aussi
des salades de fruits de saison, voire des compotes,... ou encore décorent la salle ou le
plateau (hôtels haut de gamme) de fleurs. A l'opposé, 1/3 des consommateurs ne sont pas
séduits par les micro-emballages (beurre, fromage, confiture, miel,...), qui font trop
industriels dans l'esprit des gens, mais aussi trop standardisés car on les trouve
systématiquement dans tous les hôtels.
Si la grande majorité des clients d'hôtels se montrent satisfaits du petit-déjeuner
hôtelier, on entend ici et là des reproches. En premier, les produits les plus
lourdement contestés sont le café et les jus de fruits. Ce phénomène existe de longue
date et on voit qu'aucune solution n'a été trouvée car ces mêmes critiques ont
traversé le temps. Il est certain que ces boissons sont des produits sensibles, auxquels
les consommateurs sont habitués. Ils sont donc très difficiles à choisir pour
satisfaire tout le monde : les goûts diffèrent selon les femmes et les hommes, selon les
âges, selon l'origine des clients (entre le nord et le sud, par exemple), selon les
cultures. Pourtant, seulement 2 % des voyageurs disent avoir déjà été invité par un
hôtelier pour sélectionner ce type d'aliments, alors que le "blind test"
renouvelé est sans doute la meilleure solution pour faire les bons choix.
Prix et service
Les clients contestent également les horaires de service du petit-déjeuner dans certains
hôtels, qui ne sont pas toujours bien adaptés : soit on ne sert pas assez tôt, soit pas
assez tard. Les queues pour accéder aux buffets au moment des heures de pointe peuvent en
décourager plus d'un, comme parfois la petitesse des salles à manger. En salle, on
déteste aussi les fumées de cigarettes et les odeurs, mais aussi l'attente pour être
servi, le bruit ou encore les téléphones portables, aux sonneries qui retentissent dès
potron-minet. Les ruptures de stocks ou les défauts de réapprovisionnement irritent
aussi la clientèle de temps en temps. Mais ces menus défauts ne doivent pas cacher
l'essentiel des reproches faits par les consommateurs aux hôteliers : le petit-déjeuner
est jugé trop cher par presque un client sur deux. Malgré leur satisfaction et la
reconnaisance de la richesse des produits proposés sur les buffets notamment, les
voyageurs trouvent que les tarifs sont exagérés d'une part par rapport à leur budget,
d'autre part par rapport à leur propre quantité de nourriture consommée. Par ailleurs,
les clients ont l'impression qu'entre le petit-déjeuner dans un 3 étoiles et celui servi
dans un 4 étoiles, il n'y a que peu de différence, alors que les prix peuvent aller du
simple au double.
Une véritable plus-value
Si on peut être fatigué d'entendre que le petit-déjeuner est le dernier souvenir d'un
hôtel pour le client, alors qu'il s'agit probablement d'une grande vérité, il faut
surtout considérer ce premier repas comme une véritable plus-value qu'offre l'hôtel.
C'est même peut-être à l'heure actuelle un des seuls éléments de valeur ajoutée dans
les hôtels. Le petit-déjeuner possède une grande dimension affective, voire intimiste,
qui en fait une prestation dans laquelle la plupart des Français mettent beaucoup
d'intérêt. Mais l'avantage perçu vient du fait que les clients trouvent à l'hôtel ce
qu'ils n'ont pas chez eux, parce que cela leur demande de l'organisation (il faut acheter
les produits avant), de la préparation et du temps. Cette plus-value leur plaît, car ils
accèdent sans trop d'effort à une grande variété d'aliments habituellement
introuvables dans leur garde-manger et leur frigo. Si les hôteliers ont considérablement
travaillé sur leur prestation de petit-déjeuner, il est certain qu'ils ont encore du
chemin à parcourir pour combattre les perpétuels risques
de lassitude du client. Innover en matière de petit-déjeuner est probablement une
solution encore plus facile que l'innovation dans les chambres ou dans l'accueil. Le
petit-déjeuner peut sans conteste être un objet de séduction, pour peu qu'on sache le
soigner, l'apprêter et le rendre attractif.
M. W.
Méthodologie de l'étudeCette étude inédite a été réalisée par Coach Omnium en avril 1999, auprès de 400 clients d'hôtels français, par entretiens individuels quali-quantitatifs en face-à-face. L'échantillon a été composé de 44 % de Franciliens et de 56 % de Provinciaux, représentatifs de la clientèle hôtelière fréquentant l'ensemble des catégories d'hôtels en France et à l'étranger. |
% sur répondants | |
Systématiquement De temps en temps Rarement Jamais |
76,8 % 10,2 % 3,2 % 9,8 % |
Source Coach Omnium
De chez soi à l'hôtel...Il n'y a rien qui soit plus entouré d'habitudes que le petit-déjeuner des Français. Contre toute attente, entre la semaine et le week-end, ce premier repas du matin semble invariable dans les foyers, voire même totalement standardisé. 73 % des consommateurs disent avaler strictement la même chose tous les jours de l'année. C'est tout juste si, le dimanche matin, quelques amateurs s'offrent un jus d'orange, des croissants ou un fruit, en plus de la composition de leur petit-déjeuner de la semaine. Cependant, il est surprenant de découvrir que près de 40 % des "petit-déjeuneurs" s'offrent un jus d'orange quotidiennement. Moins étonnant : la fraise et l'abricot sont les parfums préférés en matière de confitures. Le séjour à l'hôtel est la seule occasion véritable pour changer ses habitudes de petit-déjeuner. On y consomme une plus grande variété d'aliments que chez soi, dont essentiellement des produits dits nobles : charcuterie, viennoiseries, ufs... Il y a également bien plus de Français qui déjeunent le matin qu'on ne le croit, bien qu'on ait encore affaire à peu de grands mangeurs matinaux en France. Pour autant, le nombre d'adeptes du petit-déjeuner a progressé durant ces dernières décennies. Aujourd'hui, seulement 4 % des intéressés n'absorbent absolument rien au lever et 13 % se contentent d'une boisson froide ou chaude, sans aliment solide. A noter que 26 % des Français déclarent prendre de temps en temps un petit-déjeuner hors de chez eux, principalement dans un café-brasserie. Seulement 2 % poussent la porte d'un hôtel pour cela. |
Plusieurs réponses possibles | % sur répondants | |||
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En voyage | En voyage | |||
privé | professionnel | |||
Pain/baguette | 60,1 % | 50 % | ||
Croissants | 55,5 % | 60,1 % | ||
Fruits frais | 25,6 % | 18 % | ||
Yaourts | 23,1 % | 25,3 % | ||
Charcuterie | 19,3 % | 21,3 % | ||
Pains au chocolat | 16,4 % | 14 % | ||
Céréales | 15,1 % | 12,4 % | ||
ufs | 13,9 % | 20,2 % | ||
Fromage | 9,7 % | 12,4 % | ||
Brioches | 9,2 % | 5,6 % | ||
Biscottes/pain de mie/pain grillé | 8 % | 2,2 % | ||
Salades de fruits/compotes | 5,5 % | 3,4 % | ||
Pains aux raisins | 3,8 % | - | ||
Autres viennoiseries * | 3,8 % | 2,2 % | ||
Autres aliments * | 2,9 % | 1,1 % | ||
Fruits secs | 0,8 % | - | ||
Confiture : | 33,2 % | 21,9 % | ||
fraise | 41 % | 56,7 % | ||
variable | 19,7 % | 10 % | ||
abricot | 18 % | 20 % | ||
fruits rouges | 9,8 % | 6,7 % | ||
orange | 8,2 % | 3,3 % | ||
groseille | 4,9 % | - | ||
framboise | 3,3 % | - | ||
cerise | 3,3 % | 3,3 % | ||
myrtille | 3,3 % | - | ||
pêche | 3,3 % | - | ||
prune | 3,3 % | - | ||
autre parfum | 8,2 % | - | ||
Miel | 10,1 % | 7,3 % | ||
Rien | 3,4 % | 3,4 % | ||
Source Coach Omnium | ||||
* Autres viennoiseries : pains au lait, chaussons aux pommes, biscuits, pâtisseries... | ||||
* Autres aliments : fromage blanc, Nutella... |
Plusieurs réponses possibles | Chez soi | Chez soi | A l'hôtel |
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En semaine | En week-end | ||
Café / café au lait | 65 % | 65 % | 72 % |
Thé / thé au lait | 23 % | 22 % | 16 % |
Chocolat | 10 % | 11 % | 10 % |
Jus d'orange | 40 % | 45 % | 74 % |
Croissants | 12 % | 25 % | 60 % |
Pain / baguette | 53 % | 53 % | 50 % |
Yaourts | 12 % | 12 % | 25 % |
ufs | 2 % | 8 % | 20 % |
Charcuterie | 4 % | 7 % | 21 % |
Céréales | 18 % | 14 % | 12 % |
Source Coach Omnium |
L'HÔTELLERIE n° 2621 Supplément Economie 08 Juillet 1999