Eclipse du 11 août
L'Alsace du nord, moins connue que l'Alsace de la Route des Vins au niveau touristique, compte sur l'éclipse du 11 août pour attirer des touristes qui ne viennent pas habituellement dans cette région. Avec le parc régional naturel des Vosges, ses nombreux châteaux et ses villages typiques, la région ne manque pas d'atouts pour séduire les touristes. Mais le phénomène du 11 août n'a pas vraiment mobilisé les professionnels de l'hôtellerie locale. "La clientèle est venue d'elle-même, explique Sibylla Schmutz, responsable de l'office de tourisme de La Petite Pierre, et les hôteliers n'ont guère eu besoin de faire des efforts. Il faut dire que la haute saison se situe plutôt avant et après les deux mois d'été. Néanmoins, je trouve qu'il n'y a plus le dynamisme que l'on avait connu dans la profession il y a dix ou quinze ans. Les professionnels sont un peu victimes de leur succès d'alors, mais c'est un positionnement relativement dangereux à moyen terme." Du côté des hôteliers-restaurateurs du parc régional, on admet volontiers ne pas avoir prévu les choses en grand pour le 11 août. Des barbecues géants seront organisés dans pratiquement tous les restaurants, qui ouvriront leur cuisine un peu plus tard que d'habitude pour l'occasion. Philippe Velten, directeur de l'hôtel restaurant Au Lion d'Or a imaginé un buffet incluant le petit-déjeuner et le déjeuner de midi. "Nous sommes finalement un peu pris au dépourvu, raconte-t-il. Peut-être que nous n'avons pas cru à l'importance de l'événement. Nos premières réservations sont arrivées d'Angleterre il y a quelques mois. Nous allons toucher une population inhabituelle. Mais cela nous apportera-t-il quelque chose pour l'avenir, je ne sais pas. Même si nous avons un devoir de bien accueillir ceux qui viendront et de faire en sorte qu'ils aient envie de revenir."
Entre 5 000 et 10 000 personnes à Niederbronn
A une vingtaine de minutes de La Petite Pierre, perdu dans la montagne, on trouve l'hôtel-restaurant de la Couronne à Reipertswiller. "Normalement, nous avons 15 % de taux de remplissage au mois d'août, cette année l'hôtel est complet", se réjouit Sylvie Kuhm, la directrice de l'établissement. "Il en vient de partout, même de Tahiti, mais je ne crois pas que cela ramènera des clients dans l'avenir." A Niederbronn, ville thermale située plus au nord, on a pris l'éclipse au sérieux. Avec 5 000 personnes prévues, la population de la commune va doubler, voire tripler à cette occasion. "Tout est complet depuis des mois, indique Denis Lecoq de l'office de tourisme. Et on est obligé d'envoyer les gens vers Haguenau." Denis Lecoq croit que les retombées médiatiques pourront amener une promotion de l'Alsace du nord, "qui a du mal à se démarquer de l'Alsace viticole, malgré les efforts entrepris. L'éclipse nous donne l'occasion de montrer notre savoir-faire et notre sens de l'accueil, et de marquer quelques points pour inciter les gens à de plus longs séjours".
Peu de retombées ?
Lembach, petite bourgade proche de Wissembourg, n'a pas échappé à
l'engouement dû à l'éclipse. Hôtels, gîtes et camping sont complets, et la mairie a
fait faucher des prés pour éviter le camping sauvage. Ici, on a préféré éviter les
manifestations importantes, pour recevoir les touristes dans la tranquillité et la
convivialité. "Nous avons donné des consignes aux restaurants afin d'être
particulièrement accueillants, commente Jacques Gunder, hôtelier-restaurateur,
membre de l'office de tourisme de la ville. Car il y a peut-être une petite carte à
jouer avec des personnes qui se rendront pour la première fois en Alsace du nord. Mais il
est difficile de se rendre compte de l'ampleur du phénomène, et de mesurer qui va
rester, même pour le déjeuner. De nombreux touristes viendront juste pour la journée,
avec leur pique-nique. Nous n'avons pas prévu d'investissements en particulier, de toute
manière, les passionnés viendront." De manière générale, les hôteliers
n'attendent pas des miracles. Pourtant, le marché a énormément évolué durant les
quinze dernières années. "Il y a dix ans, nous avions des pensionnaires de
mi-mai à mi-septembre, explique Jacques Gunder. Maintenant nous sommes contents
quand les gens restent pour une période de huit jours." Malgré cette
évolution, il semble que les professionnels de l'Alsace du nord se serviront peu de
l'événement pour faire une véritable promotion de leur établissement. Ils considèrent
plutôt ce phénomène comme un plus dans l'été, et s'ils sont prêts à accueillir les
visiteurs d'un jour ou d'une nuit, ils ont préféré laisser aux offices de tourisme et
aux municipalités le soin d'organiser des manifestations liées à l'éclipse. Sans
croire vraiment en des retombées pour la région.
L'HÔTELLERIE n° 2625 Hebdo 5 août 1999