Epargne
La rémunération des
placements dits administrés - c'est-à-dire des produits dont le taux de rendement est
décidé par les pouvoirs publics - ne peut plus désormais excéder le taux moyen des
opérations librement négociées à court terme, de plus d'un demi-point. De ce fait,
suite à la baisse des taux d'intérêt en début d'année, le Comité consultatif des
taux à court terme avait demandé au gouvernement de baisser le taux du livret A, produit
leader des placements à taux réglementé.
La réponse des pouvoirs public s'est fait attendre car la décision est en fait plus
politique qu'économique. Le montant des sommes en compte sur un livret A ne représente
que 107,4 milliards d'euros (704,5 milliards de francs) alors que la capitalisation
boursière de la Bourse de Paris est de 1 000 milliards d'euros mais les 47 millions de
Français détenant un livret A ou équivalent devaient voter pour les élections
européennes. D'où la situation paradoxale actuelle : une baisse autoritaire des taux
réglementés de 0,75 % juste au moment où les taux d'intérêt à long terme se tendent.
Taux réglementés en baisse
Le gouvernement Jospin a donc décidé de frapper fort en ramenant, à compter du 1er
août, à 2,25 % le taux d'intérêt servi sur le livret A des Caisses d'Epargne et de La
Poste et sur le livret bleu du Crédit Mutuel. Cette baisse entraîne dans son sillage les
taux d'intérêt des autres placements réglementés dont les rendements sont liés à
celui du livret A.
Ainsi, le rendement du Codevi chute également de 3 à 2,25 %, celui du livret d'épargne
populaire (LEP ou livret rose) de 4,75 % à 4 %. Les produits d'épargne logement sont
également touchés par cette mesure mais de façon un peu différente. En effet, tous les
comptes d'épargne logement voient leur rémunération abaissée à compter de la fin
juillet de 2 à 1,5 %. En revanche, seuls les contrats de plan d'épargne logement ouverts
après la fin juillet ne seront plus rémunérés qu'à 3,6 %, les contrats ouverts avant
cette date conservent le taux pratiqué lors de leur souscription. Ainsi, votre PEL à 6 %
conserve son taux tant que le montant de la prime versée par l'Etat en complément de la
rémunération servie par votre banque n'est pas atteint (10 000 F).
Cette baisse du taux du livret A a eu également pour conséquence la révision par de
nombreux réseaux bancaires des taux de rémunération des livrets B et du livret jeune.
Les taux servis sur ces produits sont dorénavant librement déterminés par chaque
banque. Toutefois, aucun établissement ne peut annoncer pour ces deux placements un
rendement brut inférieur à celui du livret A. Conséquence, votre livret B rapporte
depuis le mois d'août entre 2,25 % et 2 % bruts dans la plupart des grandes banques
françaises et le livret jeune, entre 3 et 3,50 % nets. A noter que les intérêts perçus
sur un livret B sont fiscalisés (IRPP ou prélèvement forfaitaire de 15 %) et supportent
de plus les prélèvements sociaux (taux actuel de 10 %).
Un petit plus pour le PEL
L'ensemble de ces placements offre donc désormais un rendement encore supérieur à la
hausse des prix mais les taux servis sont à présent guère attractifs. Le seul cadeau
qui demeure attaché au livret A, au LEP et au Codevi est l'avantage fiscal :
l'exonération pour les intérêts versés de toute taxation tant au titre de l'impôt sur
le revenu que des prélèvements sociaux.
A noter toutefois le petit geste en faveur des ménages à revenus modestes, le plafond
des livrets d'épargne populaire a été relevé de 40 000 à 50 000 F et leur rendement
demeure élevé : 4 % nets d'impôts, difficile de trouver mieux.
Enfin, les produits d'épargne logement retrouvent, à la suite de cette baisse de leur
rentabilité, leur objectif premier : le financement de l'immobilier à un taux
intéressant. En effet, les nouveaux souscripteurs pourront bénéficier dans 4 ans de
prêts immobiliers dont les taux seront de nouveau en-dessous des taux du marché libre :
4,31 % pour les crédits liés à une opération d'épargne sur un PEL et 3 % pour un CEL.
Que faire de son épargne ?
Si vous ne souhaitez pas faire une acquisition immobilière dans 4 ou 5 ans ou si vos
revenus ne sont pas suffisamment modestes pour vous permettre d'ouvrir un LEP (moins de 4
200 F d'impôts), les produits administrés ne constituent plus pour vous une solution de
placement à moyen ou long terme. Vous devez les utiliser pour l'instant uniquement comme
moyen de rémunération de votre trésorerie, en attente du paiement de vos charges ou de
vos impôts. Leur rendement net est encore supérieur à celui des Sicav monétaires.
Ceux qui peuvent immobiliser leur épargne sur une période plus longue sans prendre de
risques peuvent commencer à envisager un retour vers les produits obligataires si les
tensions actuelles se poursuivent. Depuis le début de l'année, les taux à 30 ans
américains sont passés de 5,10 % à 6,18 % et les rendements des bons à 10 ans
français et allemands de 4 à 5,18 %.
Un versement sur votre contrat d'assurance vie en francs vous permettra également de
profiter des fluctuations actuelles des taux d'intérêt. Mais il faudra conserver cette
somme investie au moins 4 ans pour obtenir un rendement nettement supérieur à celui du
livret A en raison du montant des frais de chargement sur les versements (3 à 4 % en
moyenne) et des 10 % annuels de prélèvements sociaux.
Le monde des placements est en ce moment en perpétuelle évolution. Le produit idéal
aujourd'hui ne le sera certainement plus demain. Tenez donc compte de la situation
économique mondiale avant de placer vos économies.
M.-C. Barbier
Produit | Rémunération | Plafond | Fiscalité | Prélèvements |
---|---|---|---|---|
de dépôt | sociaux | |||
Livret A | 2,25 % | 100 000 F | Sans | 0 % |
Livret | ||||
bleu(1) | 2,25 % | 100 000 F | Sans | 0 % |
CODEVI | 2,25 % | 30 000 F | Sans | 0 % |
LEP (Livret d'épargne populaire ou | ||||
Livret rose) | 4,00 % | 50 000 F | Sans | 0 % |
CEL (Compte épargne logement) | ||||
1,50 % | 100 000 F | Sans | 10 % | |
PEL (2) | 3,60 % | 400 000 F | Sans | 10 % |
(1) Ce produit est en réalité fiscalisé mais c'est le Crédit Mutuel qui acquitte les impôts dus | ||||
(2) Pour les PEL ouverts après le 1er août 1999 |
L'HÔTELLERIE n° 2632 Hebdo 23 Septembre 1999