Havana Club en bisbille avec le groupe Bacardi
Les Américains seraient-ils
jaloux du succès d'Havana Club, dont les ventes ont quintuplé en cinq ans, depuis que la
marque se trouve dans le giron de Pernod Ricard ? C'est en tout cas ce qu'il ressort des
explications fournies par le groupe européen dans les débats qui opposent la société
cubaine au groupe Bacardi. S'il est vrai que Bacardi produit du rhum dans certains pays
comme le Mexique ou le Brésil, "aucune matière première originaire de Cuba
n'entre dans la composition des rhums Bacardi", affirme-t-on chez Pernod Ricard.
Il faut savoir que l'essentiel de la communication du produit Barcardi outre-Atlantique
est basée sur la référence cubaine avec "des campagnes de publicité ambiguës"
telles que "el mejor ron de Cuba" ou encore "Cuban rums since 1862",
s'insurge encore le groupe européen. C'est en 1996 que le différend va réellement
éclater avec le lancement, sur le marché américain, par Bacardi, d'un Havana Club
fabriqué aux Bahamas. Havana Club Holding crie alors à la "contrefaçon"
et à la "tromperie du consommateur". "Pour se protéger, Bacardi
s'efforce alors de retrouver une partie des héritiers de la famille fondatrice de la
marque (Havana Club). Une société, José Arechabala International, est constituée de
toutes pièces au Lichtenstein en 1997. Elle cède au groupe Bacardi des droits qu'elle
n'a jamais détenus ou qui avaient été depuis longtemps abandonnés".
Mais l'embargo contre Cuba ayant des raisons hautement économiques, en 1998, l'Amérique
adopte l'Article 211. "Une disposition qui, au mépris des accords internationaux
en matière de propriété industrielle, interdit rétroactivement la protection aux USA
de marques ayant appartenu à des Cubains avant leur exil, même lorsque ces marques ont
été volontairement abandonnées ou sont tombées dans le domaine public" (sic).
En avril dernier, la plainte en usurpation déposée par Havana Club Holding est
déboutée "en raison de l'Article 211, promulgué deux ans après le début du
procès et 24 ans après le dépôt de la marque aux Etats-Unis par les partenaires de
Pernod Ricard". Mais l'Union européenne s'en mêle et en juillet, une procédure
"pour violation de leurs (les Etats-Unis) engagements sur les droits de
propriété intellectuelle liés au commerce" est lancée. Dernier épisode en
date : la rencontre à Genève de délégations européenne et américaine, sous l'égide
de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), venue débattre du sujet. Qu'en déduire ?
Peut-être que le panier de la ménagère, made in USA, a d'autres errements que les OGM.
S. Soubes
L'HÔTELLERIE n° 2640 Hebdo 18 Novembre 1999