Quick défie McDonald's en France et en Belgique
Le hamburger est européen, qu'on se le dise ! Ce pain fourré à la viande chaude est une invention apparue sur les quais du port de Hambourg au début du siècle pour nourrir les émigrants en partance pour l'Amérique, affamés et transis de froid. S'il nous est revenu d'Amérique comme un boomerang, rien ne nous empêche de nous l'approprier et de le relever à notre goût et à nos sauces. Cessons donc de faire des complexes anti-américains, confectionnons, mangeons et vendons de bons hamburgers typiquement européens, distribués sous une marque typiquement européenne basée à Bruxelles : Quick. C'est le premier message lancé par Chris Van Steenbergen, administrateur délégué du groupe, à la tête de l'affaire depuis seulement cinq mois après une carrière internationale. Soyons d'autant plus confiants que ce hamburger est un aliment "complet, porteur de valeurs, économique". Un produit originaire d'Europe, distribué par une entreprise belge forcément inprégnée de culture culinaire française, et qui a connu sa plus grande extension dans l'Hexagone. Une grande part de sa direction est d'ailleurs française.
Les armes du renouveau
Quick reprendra en 2000 ses implantations de restaurants après deux années de sévère
restructuration et de vache folle. Car, second message, Quick, après avoir essuyé des
pertes assez sévères, a enregistré de nouveau 6,5 millions de francs de bénéfice
d'exploitation au premier semestre. Ce n'est pas encore le Pérou, mais le renversement de
tendance est là et les coûts de restructuration vont s'estomper. L'effet dioxine a été
relativement modeste grâce à la solidité des fournisseurs de l'enseigne. Cette année,
les ventes à l'enseigne devraient atteindre 4,4 milliards de francs, en progression de 3
% sur 1998 à périmètre constant. Le résultat net devrait fortement s'améliorer.
Parallèlement, l'enseigne, après avoir non seulement réduit sévèrement ses coûts et
fermé des unités non rentables, repart de l'avant. Quick, sans sortir de son pré carré
de France et du Benelux, a ouvert 23 restaurants cette année et en ouvrira de nouveau une
quarantaine l'an prochain, essentiellement en France. Sur ces deux espaces limités, Quick
l'Européen se pose en challenger de McDonald's. Sa part de marché en restauration rapide
est de l'ordre de 25 % en France, après que Burger King a dû se retirer.
Avec quelles armes Quick entreprend-il sa croisade ? Il y a le "management à
l'européenne" pour rendre heureux ses quinze mille équipiers, une traçabilité
pointilleuse imposée à tous ses fournisseurs et des procédures rigoureuses dans ses
propres installations, ainsi que des efforts en matière d'environnement avec
l'introduction d'emballages recyclables. Mais avant tout, l'équipe compte sur
l'innovation.
Stars et inventives
Avec l'aide de son conseil François Théron, un créatif dans le domaine agroalimentaire,
architecte de formation mais ancien restaurateur à La Charlotte à Boulogne-sur-mer,
Quick a inventé le "Star", dans tous les restaurants depuis octobre. C'est
toujours un hamburger. Mais le pain s'inspire des fantaisies de nos boulangeries de
quartier : il est carré, saupoudré de farine, moelleux dedans mais croustillant en
surface. La star des Stars est un hamburger aux légumes chauds, avec des champignons en
sauce. Toute cette garniture, mise au point minutieusement avec un industriel, arrive
surgelée aux restaurants. Une procédure très précise permet d'être servi à bonne
température. Avec Théron, Quick a lancé également des salades à base de mariages de
féculents et de légumes aux goûts régionaux, souvent méditerranéens, plutôt
légères mais qui permettent de faire un repas sans viande, visant ainsi un public de
femmes. On peut aussi manger une salade céleri-carottes avec un hamburger. La marque a
également travaillé le dessert. Quand au design des restaurants, il est rafraîchi, avec
une pensée ciblée sur chaque clientèle : la famille, la bande d'amis, le solitaire
pressé, le couple... Que les professionnels de la restauration ne s'y trompent pas. Ce
n'est pas seulement à McDonald's que Quick lance un défi, mais aussi et de nouveau au
bistrot dîneur. Il n'y a pas de vrais cuisiniers dans les restaurants Quick, seulement
des terminaux de service. Mais il y en a en amont, chez les concepteurs et les
réalisateurs industriels des recettes, pour la plupart français, en tout cas européens.
La concurrence en restauration rapide s'est relevée d'un cran, et le leader McDonald's a
déjà réagi à ce pas de charge européen avec sa campagne "made in France".
A. Simoneau
Chris Van Steenbergen, nouveau patron de l'enseigne.
Fast QuickQuick, filiale du Belge GIB Group, exploitait au 20 novembre dernier 406 restaurants en Europe dont 138 (34 %) en propre et 268 (66 %) en franchise. En France, la marque comptait 292 restaurants dont 106 (36,3 %) en propre. Les ventes à l'enseigne ont représenté 4,1 milliards de francs en 1998 en Europe, pour 180 millions de hamburgers, 19 000 tonnes de frites, 41 millions de litres de boissons vendus. L'enseigne accueille actuellement près de 650 000 clients chaque jour. Elle emploie 16 000 salariés, dont 12 000 en France, en moyenne une quarantaine par restaurant, jusqu'à 250 pour les plus gros porteurs. Chaque restaurant produit en moyenne près de 12 millions de francs de chiffre d'affaires. Les ventes de l'enseigne ont fortement progressé sur les marchés du Benelux (+ 9,3 % en Belgique, + 9,6 % au Luxembourg, + 8,8 % aux Pays-Bas), et nettement en France (3,7 %) sur un terrain plus difficile. |
L'HÔTELLERIE n° 2643 Hebdo 9 Décembre 1999