Corse
Il s'agissait pour la plupart des professionnels du tourisme du défi numéro Un. L'Etat et la Région ont décidé de le relever ensemble. Face à la "frilosité naturelle du secteur bancaire pour le tourisme, en Corse comme ailleurs", selon Michelle Demessine, la secrétaire d'Etat au Tourisme, le gouvernement a décidé la mobilisation du Fonds national de développement des entreprises (jusqu'alors non autorisé à intervenir en Corse) pour faciliter la création d'un fonds régional qui permettrait de garantir les prêts accordés aux entreprises de l'île à une hauteur maximale de 70 %. En fait, dans ce dossier, il ne reste plus aux élus de l'Assemblée de Corse qu'à se rapprocher de la BDPME. C'est sous son égide, à l'instar de ce qui existe déjà en région PACA pour le soutien à l'innovation ou à l'exportation, que le fonds régional sera mis en place. L'Etat, à travers le FNDE et la SOFARIS, garantira à hauteur de 40 % les crédits accordés aux entreprises dans l'île, la région assurant les 30 % restants. Cette mesure était fortement réclamée dans le secteur touristique insulaire. En effet, après deux saisons de bonne qualité, l'industrie touristique, est aujourd'hui à un moment crucial : face à l'augmentation de la fréquentation, il lui faut en urgence investir pour moderniser, mettre aux normes ou encore augmenter la capacité d'accueil des structures existantes. Mais la faiblesse des capitaux propres, l'endettement qui reste important après cinq années de crise grave et malgré une amélioration des trésoreries depuis deux ans, rend le concours bancaire indispensable.
Faibles taux de marge
Or, ce concours bancaire est encore quasiment nul aujourd'hui. La volonté affichée par
les pouvoirs publics de prouver leur confiance dans un secteur qui, selon Michelle
Demessine "jumelle à la fois une forte intensité capitalistique et de
main-d'uvre à de faibles taux de marge", doit amener le secteur bancaire
à changer d'attitude... Parallèlement, la secrétaire d'Etat a annoncé au cours d'un
débat avec les professionnels du tourisme, que, pour faciliter la modernisation et
l'équipement de leurs entreprises, ses services réaliseraient en Corse, comme ils vont
le faire dans 8 autres départements français, une analyse fine de la situation de
l'endettement de l'hotellerie-café-restauration. Il sera alors possible d'établir entre
les professionnels et les services de l'Etat un "contrat de modernisation et de
valorisation" de l'offre touristique. Pour accompagner cette démarche, la
délégation régionale au tourisme voit ses moyens humains et ses capacités d'expertise
renforcées avec notamment l'installation sur place d'un inspecteur général au Tourisme
chargé d'accompagner les porteurs de projets dans l'ensemble de leurs démarches. Et
surtout, Michelle Demessine, a pu annoncer que l'enveloppe de l'Etat directement affectée
au secteur touristique corse dans le contrat de plan 2000-2006 s'élèverait à 55
millions de francs (contre 38 MF dans le précédent, dont à peine 50 % ont été
consommés, lui ont rappelé les hôteliers de la coordination des industries touristiques
!).
Forte saisonnalité
Enfin, après avoir abordé le nécessaire aménagement du territoire insulaire pour
atteindre un développement touristique "équilibré, respectueux de
l'environnement, des cultures et des traditions, mais en même temps porteur de
développement local et créateur d'emplois", la ministre a dévoilé ses
ambitions concernant la formation des hommes, l'autre grande "revendication"
insulaire. La forte saisonnalité touristique en Corse rend plus crucial encore le
problème de la formation, mais aussi de la reconnaissance et de l'accueil des employés
saisonniers. La secrétaire d'Etat qui s'est dite consciente des enjeux de ce dossier a
rappelé le travail engagé par son ministère pour l'élaboration de mesures de
sécurisation des embauches et des contrats de travail, de la santé, du logement et de la
formation de ces salariés "encore trop précarisés". Ainsi,
l'expérimentation pilote menée avec les professionnels et les élus de la région PACA
sur les besoins en formation bi-qualifiantes et rémunérées, à destination des
saisonniers, pourrait être étendue à l'île de beauté. Des mesures concrètes,
globales, destinées à accompagner un secteur en plein défi : la secrétaire d'Etat au
Tourisme a tenu durant deux journées de visite officielle dans l'île de beauté à
expliquer ses propositions aux professionnels du tourisme. Mais elle a surtout insisté
sur l'aspect partenariat de sa démarche, se réjouissant, que "la Corse prenne
aujourd'hui la dimension de l'enjeu touristique, que ce soit au niveau de sa population ou
de ses élus qui dans les collectivités locales ont en charge ses choix de
développement". Une prise de conscience, tardive mais salutaire : en 1993
encore, le plan de développement de la Corse définissait le tourisme comme "un
mal nécessaire"...
L. Peretti
"La Corse prend aujourd'hui la dimension de l'enjeu touristique",
insiste Michelle Demessine.
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L'HÔTELLERIE n° 2646 30 Décembre 1999