Gironde
Sur un marché d'environ 1 500 cafés-restaurants et 600 cafés en Gironde, les artisans torréfacteurs bordelais parviennent, non sans mal, à tirer leur épingle du jeu face aux grosses pointures nationales.
Il y a une dizaine d'années le nombre d'artisans torréfacteurs bordelais s'élevait à
une trentaine. Aujourd'hui ils ne sont plus qu'une poignée, moins de dix, et chacun
s'octroie entre 10 et 20 % de part de marché du secteur CHR.
Certaines grandes marques telles que les Cafés Richard ou Lavazza occupent le terrain,
"physiquement" depuis 1997, en recrutant d'ex-spécialistes du secteur.
Responsable des Cafés Richard à Bordeaux et pour le Sud-Ouest, Gérard Sicre travaillait
auparavant pour le café Le Gascon. Fort de sa connaissance du marché, il a réussi en
deux ans à se constituer une clientèle d'environ 300 clients dans le secteur CHR à qui
il vend près de 4 tonnes de café sur Bordeaux. Parmi ces clients on trouve notamment des
affaires jeunes et dynamiques comme le Café des Arts, le Café du Port, L'Estacade ou
Chez Greg. L'antenne Lavazza pour sa part a été créée par un l'ancien artisan
torréfacteur cofondateur des Cafés d'Oc, Alain Iturria, qui a quitté sa société en
"rachetant" le portefeuille client CHR.
Le relationnel
Ancienneté, savoir-faire et service sont les meilleurs atouts des artisans torréfacteurs
bordelais. Les plus représentatifs ont pour noms les Cafés Soubira, Delché, Régus et
Cimbali, Bastouil et Cafés Michel. D'autres encore sont également présents sur le
marché des CHR mais axent leur distribution principalement sur leur boutique ou en grande
distribution, comme Gama, Fazenda du Café, Tou'Caf, Petit Duc, Bordenave, Reno ou encore
Fancy implanté sur Libourne.
Comment parvient-on à s'imposer quand on ne peut "offrir la machine à café"
? (commentaire largement entendu). José Alvarez, qui a racheté en 1984 les cafés
Bastouil, maison créée en 1968 et dont il était employé, donne sa recette : "Nous
jouons le relationnel au maximum", indique-t-il d'une voix très chaleureuse.
Aujourd'hui sa maison, qui compte 5 salariés, torréfie près de 50 tonnes de café par
an et couvre 7 départements. 75 % de son chiffre d'affaires est réalisé dans le secteur
CHR, le reste dans les collectivités ou en grandes surfaces. Profil des clients : de gros
cafés comme le Saint-Projet ou de beaux restaurants comme Le Munich ou L'Absinthe.
L'avantage est donné encore aux entreprises régionales très anciennes sur le secteur.
Torréfacteur depuis 1932, Régus est, depuis sa création, restée dans les mains de la
famille Caunègre. Une exception ! Le gérant actuel, Philippe Caunègre, est confiant
dans l'avenir : "90 % de notre clientèle sont là depuis très longtemps. Outre
nos produits, ils apprécient notre service, une qualité souvent mise en avant, mais plus
rare dans les faits." Régus (7 personnes) torréfie près de 70 tonnes de café
et compte 50 % de son activité (soit près de 250 clients) dans le secteur CHR, dont
certains établissements réputés comme chez Jean Ramet ou La Chamade ou de beaux cafés
tels La Comédie, Le Saint-Rémy ou Le Cintra. Le reste est réalisé dans ses trois
magasins de la région bordelaise.
Entreprises familiales
Les Cafés Delché, torréfacteur de la même génération que Régus (1938),
bénéficient également de leur ancienneté. Dirigée par la famille Tabouret, cette
société est un des plus importants torréfacteurs de la région avec 10 personnes et 200
tonnes de cafés torréfiés, mais le secteur CHR représente seulement 30 % de son
chiffre d'affaires, l'essentiel étant constitué par une distribution nationale dans les
collectivités.
On peut encore s'imposer en affichant des spécificités comme les Cafés Michel. Ce petit
torréfacteur, créé en 1981 par Sylvie et Michel Gélis qui se sont formés sur le tas,
privilégie le très haut de gamme et possède une petite torréfaction blonde pas très
poussée, extrêmement appréciée notamment des restaurants chinois ou encore des
adresses réputées sur Bordeaux comme l'Alhambra (un fidèle de la première heure).
"Nos clients, près de 200 cafés ou brasseries, généralement de petites
affaires, ne regardent pas le prix mais la qualité, explique Sylvie Gélos. Je
pense que nous sommes les plus chers de Bordeaux, mais on apprécie notre service, car les
gens savent que l'on peut venir les dépanner même le samedi ou le dimanche."
B. Ducasse
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L'HÔTELLERIE n° 2649 Spécial Café 20 Janvier 2000