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Fermeture administrative

Drame dans un bistrot de quartier

Trois mois après avoir repris un bar de quartier à Clermont-Ferrand, les deux nouveaux patrons ont dû subir un terrible choc : un meurtre dans leur établissement. Et la fermeture administrative qui a suivi risque de couler l'entreprise.

Les petits bistrots de quartier ont tendance à disparaître peu à peu. Il est vrai que le métier est difficile. Et que rien ne facilite la vie de ceux qui se lancent dans l'aventure. Didier Roy, 27 ans, et François Rémy, 38 ans, ont repris le Roméo à Clermont-Ferrand fin août. "Cela n'a pas été facile pour trouver le financement nécessaire au rachat du fonds", se souviennent-ils. "Ici, c'est une ambiance de quartier, avec des habitués. Une grande famille en quelque sorte. Tout le monde se connaît", raconte Didier Roy. Dans l'ancien quartier de Clermont-Ferrand près de la cathédrale, avec son marché du samedi matin, les nouveaux propriétaires ne manquent pas de courage. L'établissement ouvre de 8 heures le matin (6 heures le samedi) jusqu'à 1 h 30, avec une activité de snack le midi et les dimanches, avec le lundi comme jour de fermeture hebdomadaire. "Nous travaillons à deux, par roulement, sauf les soirs du week-end", explique Didier Roy. Avec un million de francs d'investissements, donc d'endettement, une vingtaine de couverts le midi et une bonne dose de volonté, l'affaire se présentait malgré tout sous de bons auspices.

Pompiers, police, SAMU et morgue
Et puis c'est le drame, un vendredi soir de novembre. Une altercation oppose deux habitués. "Deux clients se disputent. On coupe la musique et on fait arrêter le grabuge. Ce n'était pas dans nos habitudes de gérer ce genre de conflit. Une des deux personnes quitte le bar. Mais une quinzaine de minutes plus tard, elle est de retour et plante un couteau dans le ventre de l'autre, qui reste debout, hébété ! Le sang coule à flot. Une cliente fait un point de compression. Nous appelons les pompiers et la police", racontent Didier Roy et François Rémy. "Nous faisons évacuer le bar. La police arrive trois minutes plus tard ; les pompiers une dizaine de minutes après et le SAMU est là au bout d'un quart d'heure, pour tenter des massages cardiaques et une réanimation". En vain. La victime a perdu trop de sang. Le meurtrier, retenu par un consommateur, est emmené par les forces de l'ordre. Une dizaine de clients et un des cafetiers se rendent au commissariat faire leur déposition. Le corps reste sur place jusqu'à deux heures du matin, jusqu'à ce que la morgue, service compétent dans ce cas, se présente. Il a fallu ensuite tout nettoyer. "Nous étions complètement secoués, complètement vidés. Nous n'avons rouvert que le mercredi suivant. Alors là, j'ai craqué. J'ai dû aller voir un psychologue. François, lui, fait des cauchemars, raconte Didier Roy. Nous connaissions ces clients et le soir du drame, ils étaient cohérents, ils ne présentaient pas de signes d'ivresse."
Après le coup de massue du meurtre vécu en direct, c'est le coup de matraque. L'administration ne reste jamais les bras ballants devant de tels événements.

Loi des séries
La police a donc demandé six mois de fermeture. La peine a été fixée à deux mois. C'est beaucoup pour une entreprise qui démarre. "Cela va être très dur, avec les charges, les emprunts personnels, nos familles à nourrir. Nous risquons de mettre la clé sous la porte." Et la clientèle pourrait ne pas retrouver le chemin du Roméo. Heureusement, la solidarité professionnelle a joué pour venir en aide aux deux jeunes patrons. Il faut ajouter que l'accident s'est produit dans une mauvaise période. Dans la même semaine, deux jeunes ont provoqué une bagarre dans un restaurant. Ils voulaient se faire servir à boire. Le refus de la patronne, qui ne peut servir que ceux qui viennent dîner, les a rendu agressifs. Un consommateur a tenté de s'interposer. Il s'est fait passer à tabac et a pris un coup de couteau. Le tribunal correctionnel, en comparution directe, a infligé aux fautifs trois et six mois de prison avec sursis, et 240 heures de travail d'intérêt général à l'auteur du coup de couteau. Un autre "client" a été condamné lors de cette même audience à huit mois avec sursis. Econduit d'un night-club, il était revenu avec un bidon d'essence pour tenter d'incendier l'établissement. Heureusement, le patron avait réussi à maîtriser le sinistre qui aurait pu avoir des conséquences dramatiques vu le nombre important de clients présents alors dans l'établissement.
P. Boyer


Le Roméo a écopé de deux mois de fermeture administrative après le drame qui s'est produit un vendredi soir de novembre.


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L'HÔTELLERIE n° 2653 Hebdo 17 Février 2000

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