Sur le vif
Le journal L'Hôtellerie a suivi le déroulement de deux examens pratiques à l'Institut de formation par alternance de la restauration de Saint-Gratien (Val-d'Oise) : le CAP cuisine et le CAP café-brasserie.
Créé il y a une dizaine d'années, le CAP café-brasserie forme l'apprenti à une méthode rapide de service en salle à l'assiette, sans flambage ni découpage. Le commis doit bien connaître son produit et savoir le vendre. L'épreuve technique de l'examen se déroule en plusieurs temps : épreuve de bar, argumentaire commercial, travail d'office service en salle. Chaque candidat est noté par un enseignant
et un professionnel.
Jeudi dernier, les clients habitués à déjeuner au restaurant pédagogique de l'IFA (Institut de formation par alternance) de la restauration à Saint-Gratien ont été soignés. Ce jour-là, la brigade de salle était composée de 5 apprentis venus passer l'épreuve pratique de leur CAP café-brasserie. Le service à table constitue la dernière ligne droite de la matinée. Et peut-être aussi la plus "facile" pour ces élèves apparemment bien rodés. "Elle est à l'aise, elle a exactement le geste qu'il faut", commente, satisfaite, l'une des examinatrices à propos de sa candidate. Accueil des clients, escorte à la table, présentation des cartes, prise de commande, efficacité... le jury ouvre l'il. Circulant entre les tables, ils font presque figure d'intrus avec leurs feuilles d'appréciations entre les mains.
Découpage et décoration
Commencé vers 8 heures, l'examen met l'apprenti en situation réelle au moyen de jeux de
rôle, d'une vingtaine de minutes chacun. Premier tableau : la préparation d'une assiette
brasserie composée de deux tranches de terrine et prête à la commercialisation.
Installés devant des planches de bois, les candidats évaluent la grosseur des parts,
coupent, disposent la décoration. Des gestes qu'ils devront ensuite parfois justifier :
"Vous avez choisi de poser les cornichons sur la tranche de terrine. Que
faites-vous si votre client n'aime pas ces condiments ? Quel est le prix de votre assiette
? Le chef vous a-t-il donné la partie de la salade la plus appréciée ?",
demande l'examinateur.
Evaluer les aptitudes à la vente et à la communication
Dans la salle voisine, c'est Mathieu qui est sur la brèche pour l'épreuve de vente et de
communication. Dans le rôle de deux amies clientes, les deux examinatrices évaluent son
aptitude dans ces domaines. Vingt minutes d'échanges autour du contenu de la carte que le
candidat connaît bien. "Puis-je vous proposer notre cocktail du jour ?",
attaque Mathieu, son carnet de commandes en main. D'abord tentées, les deux clientes
orienteront ensuite leur choix vers un vin cuit et un Américano tout en se faisant
préciser à chaque fois l'origine géographique, la façon de servir le verre. Sans se
départir de son flegme, le candidat leur expliquera aussi la composition des salades
niçoise et piémontaise, des plats de viande et du filet de sole Aïda et leurs
différentes cuissons, avant de refaire un tour de France du plateau de fromages, de
décliner la carte des desserts, de conseiller les vins appropriés aux deux clientes
décidément très hésitantes, mais curieuses de la provenance des cafés et de la
recette de l'irish coffee.
Coller au marché
Au bar, on joue le sketch "prise de commande" de boissons alcoolisées ou non.
"Une mauresque, un café et un croissant", lance l'examinateur attablé.
La cigarette de son collègue, installé juste à ses côtés, n'échappera pas au regard
de Natacha qui passe un CAP en candidate libre et apprentissage dans l'entreprise
familiale. Le cendrier arrive tout de suite, tout comme des chips à grignoter. Et encore
les questions : composition de la mauresque, du Ricard, fabrication de la bière,
différence entre la bière en fûts et la bière en bouteille. Les explications calment
la soif de précisions des deux collègues.
"Les commis de salle doivent être des vendeurs et non des 'porteurs d'assiettes',
insiste Valérie Bourgeois, enseignante à l'IFA. Je crois que le CAP café-brasserie
colle assez bien à la restauration grand public d'aujourd'hui, même s'il est parfois mal
perçu." Retour en salle. Le déjeuner s'achève. Les examinateurs se retirent
pour délibérer.
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Pour satisfaire à l'épreuve pratique du CAP cuisine, les apprentis doivent, de façon totalement autonome, confectionner deux plats, les dresser dans des assiettes et les faire goûter par le jury. Le respect de la marche en avant, la tenue du poste de travail, le respect de l'hygiène et de la sécurité, l'utilisation rationnelle des produits et des matériels, les techniques de réalisation simples, les techniques de cuisson, l'assemblage et les finitions, le dressage et l'envoi des plats constituent les critères d'évaluation.
Lundi 6 juin, 7 heures du matin dans le hall de l'IFA de la restauration à Saint-Gratien. Les premiers candidats arrivent. Ils sont six apprentis, dont une seule fille, venus des centres de formation, des lycées professionnels du département ou de la région parisienne, passer l'épreuve pratique de leur CAP cuisine. La matinée vient à peine de débuter, mais déjà, le président du jury du jour, Daniel Dubois, professeur au lycée d'Eragny, doit trancher. "Qu'est ce qu'on fait chef ?", demande l'un des examinateurs. Un candidat est arrivé sans sa mallette de couteaux. Il sera dépanné par le centre d'examens qui devra également lui fournir un calot de secours. "Attitude non professionnelle", murmure-t-on dans les rangs du jury. Pas de ceinture supplémentaire en revanche pour l'apprenti au pantalon pieds de poule tombant sur le caleçon. 8 h 30, c'est l'entrée en cuisine. Au programme : réaliser deux recettes - une entrée, un plat ou un plat un dessert - en suivant une fiche technique, les dresser sur l'assiette et les faire goûter au jury de formateurs et de professionnels.
Assembler les techniques
8 h 50, le jury, feuilles d'observation à la main, fait un premier passage en cuisine :
des légumes n'ont pas été lavés avant d'êtres débités, des épluchures traînent
encore sur une planche. La cuisine est calme. Les candidats sont absorbés par l'épreuve.
Ils sont secondés par des élèves de l'IFA de Saint-Gratien qui leur apportent
ingrédients et ustensiles et allument les feux.
"Les réalisations doivent être commercialisables, c'est la règle numéro 1,
avec le respect de l'hygiène", explique en aparté le président du jury. "Un
apprenti peut très bien louper son examen et être un bon élément. On lui demande de
savoir assembler des techniques. La rapidité va s'acquérir chez le professionnel qui
doit remplir sa part du contrat. Lorsque l'on est jury, on remarque que certains jeunes
ont de bonnes techniques, qu'ils savent bien éplucher les légumes par exemple, mais au
contraire qu'ils ont des lacunes au niveau de l'organisation. Il arrive aussi que l'on ait
une bonne surprise au niveau de la dégustation, alors que la réalisation nous était
apparue assez hasardeuse. C'est ce que l'on appelle avoir la fibre."
L'heure tourne. Après un départ assez rapide, il règne maintenant un certain
flottement. Il s'agit de passer à la réalisation de la recette suivante tout en gardant
la première sous le coude. C'est le moment où l'on s'aperçoit si le candidat maîtrise
ou non la répartition de son temps de travail. Réalisées en temps et en heure, les
pâtes feuilletées vont pouvoir reposer. Les crèmes de moules, pour lesquelles tous les
élèves ont fait l'économie du fumet, sont prêtes les premières. Impatient, un
candidat a écourté leur cuisson afin de les ouvrir au couteau. Sur deux ou trois plans
de travail, le saumon nettoyé attend encore avant de passer au four. Par une remarque ou
une observation, les examinateurs tentent, ici ou là, de faire avancer les choses :
"Vous connaissez la vinaigrette ?" 11 h 30, le jury donne les horaires
d'envoi des plats. C'est le moment de dresser les réalisations. Aucun des apprentis
cuisiniers ne pensera à goûter ce qu'il a préparé. De l'autre côté de la porte, les
commis de salle, formés à l'IFA, ont dressé les tables. Ils assureront le service.
"Candidat numéro 1, je lance la crème de moules", annonce le chef de
cuisine. Ce jour-là, enseignants et professionnels ne se sont pas régalés.
L. Anastassion
Dernière partie de l'épreuve pour les candidats et les examinateurs : la dégustation
L'IFA Saint-Gratien devient un centre d'examensCréé en septembre 1997 par la chambre de commerce et d'industrie de
Versailles-Val-d'Oise-Yvelines, l'Institut de formation par alternance aux métiers de la
restauration de Saint-Gratien, dirigé par Laurent Fabretti, a vécu cette année sa
première expérience en tant que centre d'examens.
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L'HÔTELLERIE n° 2670 Hebdo 15 Juin 2000