Le bon La Fontaine n'avait pas
attendu l'arrivée des sociologues et des énarques, créations d'un XXe siècle parfois
mal inspiré, pour constater l'inégalité de traitement réservé aux différentes
catégories de l'espèce humaine.
Et ses fines remarques n'ont rien perdu de leur actualité, à observer les événements
de ces derniers jours qui sont venus malmener les ultimes moments de torpeur estivale.
Pour les restaurateurs, le coup le plus dur fut assené par le ministre des Finances, M.
Fabius, qui s'était déclaré un chaud partisan de la baisse de la TVA sur la
restauration quand il occupait "le perchoir" du Palais Bourbon. Aujourd'hui, il
considère que la mesure serait trop coûteuse pour les finances publiques.
Etait-il, lors de son mandat à l'Assemblée nationale, moins bien informé ? On n'oserait
le croire. D'autant que quelques-uns de ses collègues du gouvernement, y compris Mme
Aubry, pas spécialement une adepte du libéralisme, s'étaient prononcés en faveur de
cette mesure tant attendue par la profession.
Aujourd'hui, cette réclamation est perçue comme "démagogique", ce qui aura
sans doute été apprécié par les intéressés.
En revanche, si le soutien du ministre de l'Emploi et des Affaires sociales (n° 2 du
gouvernement, rappelons-le) ne sert strictement à rien, fut-il appuyé par la position
modeste mais positive de la secrétaire d'Etat au Tourisme, quelques "bahuts"
judicieusement placés à la sortie de dépôts de carburant produisent des effets
beaucoup plus rapides, fussent-ils ensuite contestés par ceux-là même qui viennent de
les obtenir. Pas besoin d'être docteur en sciences politiques pour apprécier
l'efficacité d'un mouvement à l'aune de sa capacité de nuisance : 3 tracteurs et
quelque "30 tonnes" aux carrefours stratégiques produisent des résultats
autrement rapides et palpables qu'un rendez-vous courtois avec un bureaucrate de Bercy ou
de Matignon. Voire une promesse ministérielle, de moins en moins crédible d'ailleurs.
Au-delà de ce désappointement provoqué par l'absence de mémoire de nos excellences,
c'est la représentativité de la profession qui pose question. Quel poids accorde-t-on en
haut lieu aux arguments, pourtant fondés, en faveur d'une baisse de la TVA en
restauration ? Quels moyens faut-il employer aujourd'hui pour se faire entendre ? Le
civisme des représentants de la profession est bien mal récompensé, au regard du
traitement réservé à ceux qui n'hésitent pas, au nom des intérêts de leur
corporation, marins pêcheurs, routiers, agriculteurs, taxis et autres ambulanciers, à
bloquer les ports, les raffineries, les rues et les routes...
Les restaurateurs se contentent de faire leur métier et leurs représentants de faire
valoir leurs revendications par des moyens pacifiques et légaux. Serait-ce leur grand
tort de ne pas faire partie des professions à forte capacité de nuisance ?
LH
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L'HÔTELLERIE n° 2683 Hebdo 14 Septembre 2000