Recrutement
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Stratégie
Face à la pénurie de main-d'uvre, les professionnels ont mis en place une communication de crise. Les offres d'emploi doivent séduire le personnel. Analyse d'un état de fait.
Lydie Anastassion
Pour les entreprises de la restauration et de l'hôtellerie, les temps sont durs. La crise est passée et les clients sont revenus. C'est au tour du personnel de traîner les pieds. Cette année, c'est la pénurie, surtout dans le domaine de la cuisine. Les professionnels sont nombreux à le dire : "Plus personne ne veut travailler". En fait, ils sont confrontés à un renversement de situation. Actuellement favorable au personnel, la loi de l'offre et de la demande sur le marché du travail oblige les patrons à repenser leur argumentaire d'embauche. Car le message des salariés est clair : "Si vous savez nous attirer, nous reviendrons dans vos établissements."
Séduire les candidats
De fait, depuis quelques mois, les annonces de recrutement sont beaucoup plus vendeuses.
Les professionnels semblent avoir compris qu'il leur fallait séduire les candidats.
Organisant la riposte, ils ont commencé à communiquer différemment. "35 heures
hebdomadaires", "avantages sociaux", "deux jours de
repos consécutifs" indiquent aujourd'hui un nombre croissant d'offres d'emploi.
En revanche, pas (ou peu) d'allusion(s) au salaire proposé (lire encadré). Une lecture
attentive des petites annonces publiées dans notre hebdomadaire révèle que toutes les
catégories d'employeurs sont concernées par cette nouvelle communication : les
indépendants comme les chaînes, la restauration commerciale comme la restauration
collective, les hôteliers comme les restaurateurs.
Chez France Quick, le responsable du recrutement, David Police, explique : "Nous
pensons mettre en avant dans nos annonces à moyen terme l'application des 35 heures dans
nos établissements. Et ceci pour une raison : nous avons du mal à recruter car nous
avons de gros besoins de personnel à un moment où tout le monde en cherche dans ce
secteur." "Il est bien évident que l'entreprise qui propose un plus
trouve plus facilement du personnel", commente Emilio Alvarez, directeur de
l'agence ANPE Ile-de-France Restauration qui, tous les matins à 7 h 30, affiche environ 1
000 offres d'emploi. "Les plus intéressantes seront pourvues en 24 heures alors
que d'autres, moins motivantes, peuvent 'traîner' des semaines", poursuit Emilio
Alvarez.
En raison du large décalage entre la demande et l'offre de travail, il semble encore trop
tôt pour tenter de tirer un bilan de cette nouvelle forme de communication. "La
question n'est pas de savoir si ce mode de communication nous apporte plus de candidats.
Il faut se demander s'il nous évite d'en recevoir de moins en moins", renchérit
Pascal Chaineaux, responsable du recrutement au Méridien Montparnasse. Selon lui, "horaires
continus" constitue la mention la plus vendeuse auprès des candidats. Ce qui
irrite bon nombre de patrons des petites maisons et d'indépendants dont le rythme
quotidien d'activité ne permet pas d'organiser des journées continues.
Pourtant, les entreprises artisanales et familiales ont elles aussi des atouts à vendre.
A condition de les identifier et de les rendre visibles.
Jouer sur la qualité
"Les entreprises de taille moyenne pourraient très bien mettre en place un
système d'intéressement aux résultats afin d'attirer, de motiver et de fidéliser leurs
personnels", explique Alain Jacob qui dirige la société parisienne AJ Conseil,
spécialisée dans le recrutement de professionnels de la restauration et de
l'hôtellerie. Il poursuit : "Au-delà de l'intérêt économique, elles doivent
jouer sur leur taille modeste. C'est un bon argument de vente qui sous-entend des
relations privilégiées avec le personnel. Ce qui est moins évident dans les grandes
entreprises." Selon lui, les candidats, outre les horaires et les coupures, sont
très sensibles aux arguments, comme les perspectives d'évolution de carrière, le
challenge lié au poste à pourvoir. "A chacun de nos clients, nous posons la
question suivante : que proposez-vous pour l'épanouissement de votre futur employé ?"
L'exemple du témoignage
Chez France Quick, la réponse est dans le texte de l'annonce. "Nous présentons
le poste, l'évolution professionnelle possible et l'accompagnement individuel apporté au
candidat", pourrait répondre David Police, responsable du recrutement de France
Quick, en écho à la question d'Alain Jacob. La direction française de la société
belge de fast-food a communiqué, durant l'une de ses dernières campagnes de recrutement
à travers le discours
- gagnant - de l'une de ses jeunes managers. L'annonce intitulée "Halte à la
routine" et publiée par France Quick dans notre numéro 2671 du 22 juin dernier,
n'est pas un "bidonnage". Stéphanie Muller a 26 ans et existe bel et
bien. Elle dirige depuis deux ans un restaurant à Strasbourg. Titulaire d'un BTS en
hôtellerie, la jeune femme appartient à une famille de restaurateurs, d'où le premier
message : "On peut apprécier une enseigne de restauration rapide en étant issu
de la restauration traditionnelle." Stéphanie Muller explique ensuite son
ascension rapide au sein du groupe. En lisant entre les lignes, le discours est le suivant
: "En restant dans la restauration traditionnelle, la jeune femme n'aurait
peut-être pas évolué aussi rapidement." Un argument comparatif de poids au
moment où toute la restauration est touchée par la pénurie de main-d'uvre.
L'allusion à la période de formation contenue dans le témoignage est également
importante. Elle prévient le candidat qu'il devra passer par une période de terrain au
sein du restaurant, à tous les postes, et donc faire preuve d'une certaine humilité. Une
qualité que les restaurateurs traditionnels regrettent de voir disparaître chez leurs
employés qui, selon eux, "veulent tout et tout de suite". "J'ai
raconté mon parcours et j'ai validé le texte", commente au téléphone
Stéphanie Muller, d'une voix décidée. "C'est vrai que j'ai moins bien trouvé
mon compte dans la restauration traditionnelle dont je suis issue. Et d'autres de penser
tout à fait le contraire. Je crois que l'utilisation des témoignages dans les annonces
peut être vendeuse pour les jeunes et permet de donner une image réaliste de la
restauration rapide."
« Il est bien évident que l'entreprise qui propose
un plus trouve plus facilement du personnel »
Emilio Alvarez, directeur de l'agence ANPE Ile-de-France Restauration
Alain Jacob, directeur de AJ Conseil.
Les salaires passés sous silence
Il y a ce que l'on dit et ce que l'on tait. C'est une pratique qui semble propre au
secteur du CHR : les annonces de recrutement ne parlent pas des salaires et ne donnent
aucune fourchette de rémunération. Une situation étrange, d'autant plus que les
tensions actuelles sur le marché du travail jouent en faveur d'un relèvement des
rémunérations pratiquées jusqu'à présent. L'explication la plus répandue consiste à
avancer que trop de paramètres entrent en ligne de compte, parasitant la fixation du
salaire : le lieu, le type de restaurant (prix du couvert), l'expérience du candidat. Des
données, pour les premières en tout cas, que le patron connaît obligatoirement
puisqu'elles vont directement influer sur sa proposition salariale.
"Un cabinet de recrutement ne mentionne jamais le salaire car il existe toujours
une possibilité de le négocier", justifie Alain Jacob qui dirige la société
parisienne AJ Conseil. Il poursuit : "L'indication d'un salaire peut induire une
mauvaise analyse de l'offre de la part du candidat." Responsable du recrutement
au Méridien Montparnasse, Pascal Chaineaux renchérit : "On ne peut pas donner un
salaire exact car il y aura toujours des fluctuations dues, par exemple, aux primes."
Bref, les aléas communs à toute procédure de recrutement pourtant bien connus et bien
gérés par les autres secteurs d'activité.
Pas facile donc pour un candidat de savoir s'il est payé au prix du marché. Une solution
pour lui consiste à se référer à une enquête publiée dans le n° 2657 de L'Hôtellerie
et intitulée "Salaires au point mort". Elle est également disponible
sur le site du journal : http://www.lhotellerie-restauration.fr
Les trois messages de France Quick
A la direction française de l'enseigne belge de restauration rapide, on ne lésine pas
sur le volume des annonces. Avec un rythme d'ouverture d'une trentaine de restaurants par
an, les besoins de recrutement sont importants : 200 managers pour la France cette année.
Le service recrutement utilise trois styles différents : la communication
institutionnelle qui place le discours de la société comme employeur, la communication
semi-institutionnelle (ou testimoniale) qui permet de communiquer à la fois sur la
société et sur les postes avec un témoignage à l'appui (lire ci-contre), et enfin les
annonces classiques qui présentent les postes à pourvoir. "Nous cherchons à
communiquer de façon transparente et à montrer en quoi nous sommes différents",
explique David Police, responsable du recrutement chez France Quick.
David Police, responsable du recrutement chez France Quick.
L'hôtel-Restaurant .Second de cuisine Merci d'adresser vos candidatures (LM ; CV) à l'adresse suivante par
fax ou par courrier : |
Merci d'adress fax ou par courrier : ute pour 2001
-En mentionnant les compétences requises pour un poste, le chef
d'entreprise gagne du temps et évite d'avoir à traiter des candidatures qui ne le
concernent pas. De plus, c'est une bonne indication du "standing" de son
établissement.
-La mise en avant des avantages sociaux proposés par l'employeur sont un atout pour
capter l'attention des demandeurs d'emploi (lire article).
-tEviter la domiciliation au journal pour les postes
qui n'appartiennent pas à l'encadrement. Il est déconseillé de demander aux personnes
intéressées par un poste de faxer leur candidature : c'est un outil de communication
dont beaucoup ne disposent pas chez eux ou sur leur lieu de travail.
--La mention de la localité et du département permet aux
lecteurs d'opérer une première sélection. Un recrutement réduit les distances entre le
domicile et le lieu de travail et minimise les délais de transport, les risques d'arriver
en retard à son travail.
La date de l'embauche est importante. Elle fait partie des contraintes du recruteur. De
plus, le candidat potentiel va tout de suite pouvoir positionner sa démarche dans le
temps.
- La nature du contrat de travail constitue l'une des particularités du poste. Ce
dernier intéressera davantage une personne célibataire et mobile. Le logement sur place
joue en contrepoids. C'est un argument vendeur à mentionner impérativement. Ne pas oublier de préciser la durée, tant du CDD que du
remplacement. Le lecteur peut ainsi placer ce poste dans un calendrier plus vaste de
recherche d'emploi et prévoir des embauches ultérieures. humaines
rue Coquelicots - 33 000 Bordeaux
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L'HÔTELLERIE n° 2683 Supplément Formation 14 Septembre 2000