Chaînes de restauration
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La restauration commerciale en France vit actuellement de grands mouvements. On assiste chaque année à des rachats au sein des chaînes de restaurants ou bien certaines optent pour la diversification. La présence en Bourse de quelques-uns a insufflé de nouvelles stratégies.
Depuis deux ans environ, les regroupements et les concentrations sont légion dans le secteur de la restauration. Bistro Romain, Batifol... sont tombés dans l'escarcelle de grands groupes et le sort de Léon de Bruxelles n'est pas encore fixé. Changements également dans les mentalités, les cotations boursières sont dorénavant au menu. Enfin, les stratégies d'implantation évoluent. Les adeptes des périphéries prennent d'assaut les centres-villes et vice-versa. Que ce soit dans la restauration ou dans un autre secteur, en période de bonne santé économique, les murs sont un peu étroits et chacun cherche à s'agrandir. Cette volonté d'expansion est également due aux occupants du palais Brongniart à Paris. En effet, la Bourse est exigeante et ne cote que les secteurs en développement rapide. Buffalo Grill comme le Groupe Flo, entre autres, ont cette contrainte. Mais ces choix financiers ont leurs limites, et il est difficile de maintenir les cours des actions dans les hit-parades boursiers. La restauration est un secteur avec trop d'aléas et une rentabilité fragile pour intéresser durablement les investisseurs de la corbeille. Léon de Bruxelles s'y est brûlé les doigts et se réorganise.
De la périphérie au centre-ville
La plupart des grandes chaînes sont nées dans les périphéries des villes et sur les
grands axes routiers. Ce sont des sites stratégiques pour un développement rapide. "Il
est plus facile de trouver un terrain en périphérie qu'un bon emplacement en
centre-ville", expliquent tous les responsables de développement. "Il a
fallu suivre les lieux de vie des Français. Des zones de loisirs se sont créées en
périphérie, les gens y habitent et les entreprises s'y installent", livre
Jean-Paul Brayer, directeur général du Groupe Flo. De plus, les chaînes de restaurants
ont désormais toutes une architecture et une façade telles, qu'en bâtiment solo, nul
besoin de faire de la publicité. On reconnaît immédiatement Courte- paille, La Criée,
Côte à Côte, Buffalo Grill, Hippopotamus... pour leurs bâtiments caractéristiques. Ce
sont des taches de couleur dans l'environnement parfois morne et gris des zones
industrielles. "Longtemps, les cornes de Buffalo sur les toits ont suffi à
générer du trafic, il n'était pas nécessaire d'informer sur une nouvelle
ouverture", ajoute un observateur. Pourtant Buffalo Grill a décidé de partir à
l'assaut des centres-villes, pour occuper le terrain et ne pas laisser de cases vides dans
un marché qui l'intéresse. Mais peut-on parler de stratégie ? Comme pour tous les
réseaux, les chaînes de restaurants courent avant tout pour une expansion rapide de leur
parc, tel Côte à Côte que le groupe Envergure relance énergiquement. Objectif : saisir
des parts de marché, augmenter la notoriété (donc le pouvoir d'attraction), réduire
les coûts de fonctionnement, rassurer les investisseurs. Mais pour bénéficier
également d'une bonne image, les chaînes de restaurants avouent parfois devoir faire un
passage obligé à Paris. La seconde voie devient l'internationalisation.
Diversification ou cannibalisation
Buffalo n'a qu'un objectif, être le leader du steak house en Europe. Mais outre le
déploiement, les temps sont à la diversification parce qu'on tient mieux sur plusieurs
pieds que sur un seul. Si le Groupe Flo a repris Bistro Romain, sa volonté est surtout de
proposer une restauration sur plusieurs créneaux et une gamme de prix différente. Il est
préférable de ne pas mettre tous ses ufs dans le même panier. Un nouveau cas de
psychose comme celui de la vache folle et c'est prendre un risque si vous êtes
positionné sur le mauvais créneau. Le rachat d'un concurrent permet également de
bénéficier d'une synergie colossale tant en termes de gestion qu'en puissance d'achat.
Mais toutes les chaînes n'ont pas forcément cette opportunité et elles doivent pourtant
continuer à exister. Ainsi, La Criée a plutôt décidé de lancer un nouveau concept
appelé Casa Sud, toujours dans l'idée d'une diversification. "La Criée est pour
l'instant assurée d'un développement linéaire. Il nous fallait un relais dans la
croissance, d'où cette création de restaurants à tendance méditerranéenne",
explique Jean-François Damour, le p.-d.g. Enfin, d'autres comme Courtepaille ont
préféré concentrer leurs efforts sur le produit existant. La chaîne a procédé à
quelques modifications au niveau de l'implantation, mais aussi sur la structure de ses
bâtiments. "Pour répondre aux habitudes des Français qui déjeunent ou dînent
tous à la même heure, nous avons doublé notre capacité d'accueil avec des unités de
144 places assises", argumente Christophe Delmoy, directeur des opérations du
pôle économique du groupe Accor. La marque de restaurants au toit de chaume a également
assuré son développement en s'associant à Ibis. Cinq Courtepaille sont ainsi implantés
au sein des hôtels 2 étoiles du groupe Accor. En bref, toutes ces chaînes de
restaurants cherchent à tricoter un maillage serré sur le territoire français.
L'enjeu du personnel
Leur volonté est également, on s'en doute, de continuer à plaire aux clients. "Notre
principale préoccupation, c'est le client. Nous devons continuer à lui fournir des
produits avec un bon rapport qualité-prix, car il est préférable de le voir
régulièrement avec une petite addition qu'une fois tous les 6 mois avec un ticket moyen
supérieur", défend Gabriel Culot, directeur financier de Buffalo Grill. Toutes
les stratégies sont là pour le client. Mais pour continuer à assurer un niveau de
prestation correct, le personnel doit également être à la hauteur. Or, c'est là que le
bât blesse avec les difficultés du secteur de la restauration à trouver des employés,
auxquelles les chaînes n'échappent pas. Malgré cela, les grandes enseignes ont
peut-être un plus par rapport aux autres professionnels du secteur. Elles peuvent
proposer à des collaborateurs sérieux d'évoluer avec elles. "La franchise de
nos établissements est réservée à notre encadrement. C'est un outil de promotion
interne et de motivation du personnel", commente Gabriel Culot. Les chaînes de
restaurants sont actuellement en pleine mutation. Ce n'est pas tant la reprise économique
qui les a fait se développer, mais surtout le changement de mentalités des consommateurs
qui fréquentent volontiers les grandes marques. Une des études de Coach Omnium sur le
secteur confirme que 46 % des clients de restaurants disent se rendre dans les chaînes
occasionnellement ou régulièrement. Leurs atouts reconnus par la clientèle : la
simplicité de leur concept, un prix sage (généralement moins de 120 francs le repas),
une animation, une thématique, une bonne accessibilité physique et psychologique.
M.-L. Estienne
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L'HÔTELLERIE n° 2691 L'Hôtellerie Économie 09 Novembre 2000