André Sacco, trente ans de syndicat départemental
André Sacco, directeur de la Fédération départementale de l'industrie hôtelière de Meurthe-et-Moselle, a pris récemment sa retraite. Ses 31 ans de service en font un témoin privilégié de l'évolution de l'hôtellerie et de la restauration. De la fougue qui animait les professionnels hier, pour défendre leurs intérêts, il ne lui reste que des souvenirs...
"L'hôtellerie-restauration reste une profession de services qui demande que ceux qui la pratiquent aiment leur métier. Mais pour les indépendants, cette notion de services est souvent contradictoire avec la rentabilité", explique André Sacco.
Quand André Sacco a débuté
en 1969, le Syndicat patronal des cafés, hôtels et restaurants du département comptait
1 600 adhérents. 31 ans et quatre présidents plus tard, la Fédération départementale
réunit 700 membres. "A l'époque, il y avait un café dans chaque village et de
nombreux hôtels dans les petites villes, voire à la campagne. La profession, depuis
l'après-guerre, semblait inamovible. C'était juste avant le grand chambardement des
années 70-80." Le grand changement, pour le directeur de la FDIH, ce fut
l'arrivée de libres-services puis de chaînes hôtelières "qui ont
obligé l'hôtellerie traditionnelle à se remettre en question". André Sacco a
commencé dans la profession en 1966 comme comptable pour plusieurs établissements de
l'hôtellerie-restauration. Il travaillait notamment au France, disparu depuis, un
établissement d'avant-garde alors, qui avait en son temps ouvert la première
discothèque et le premier libre-service de Nancy. Son patron, président du Syndicat
patronal, lui avait demandé de s'occuper du secrétariat de l'organisation... qu'il n'a
plus quittée jusqu'à sa retraite. En 1969, période de blocage des prix, les attentes
des adhérents étaient bien différentes de celles d'aujourd'hui. "La profession
vivait sur sa lancée, les métiers étaient très différenciés entre un cafetier et un
restaurateur de France bien classique, l'hôtellerie était en train de se moderniser. Les
attentes des adhérents ? La hausse du prix du café, de la chambre ou du plat du jour !
On tenait beaucoup de réunions avec des débats enflammés. Maintenant, les gens ne se
déplacent plus."
Les années 70 ont été celles de la découverte de la journée continue et de la mise en
place du ticket-restaurant. "Les gens sortaient de chez eux et on leur apprenait
à bien se nourrir à midi. Ceci a influencé la manière de gérer les établissements."
Pour répondre à la demande de cette clientèle pressée et qui n'a pas beaucoup de
moyens, les libres-services font leur apparition. Puis c'est l'arrivée des premières
chaînes hôtelières, des fast-foods. Autant de concurrences qui changent totalement les
métiers de base. "En 70-80, la profession a basculé. On est passé de la
troisième à la cinquième République en une seule fois. La fédération a aussi changé
de rôle. Les professionnels recherchaient de l'aide, du conseil, de la protection, en
réaction au fait que l'hôtellerie-restauration était très en retrait socialement."
Ces années-là marquent aussi la désertification des campagnes, la fin des bistrots de
village, et l'arrivée des gîtes et des fermes-auberges. "Avec une gestion
d'entreprise, en général mal adaptée, encore empreinte de paternalisme, ont également
disparu tous ces petits hôtels qui faisaient le maillage de la France, ainsi que les
meublés et les hôtels non classés, dits de préfecture."
Un CFA géré par la profession
La mutation a donc été extrêmement importante, surtout ces 20 dernières années
marquées par l'obligation d'apprendre à gérer les établissements comme une entreprise,
y compris en instituant une concurrence nouvelle avec les fournisseurs de la profession.
L'apprentissage de l'informatique a été très lent, juge André Sacco, sauf pour les
hôtels importants. De son côté, l'organisation professionnelle a poursuivi son rôle
d'assistant "pour un secteur qui aime bien qu'on s'occupe de lui" au
travers de conseil en création d'entreprise, de gestion et de protection juridique. La
formation a été un autre des chevaux de bataille d'André Sacco. Il a d'ailleurs été
à l'origine et a dirigé le premier CFA de France, "entièrement géré par la
profession".
En 2000, le directeur voit deux problèmes majeurs pour le secteur. D'une part la TVA, les
charges et les 35 heures, et d'autre part, la structure même du secteur qui est composé
à 80 % de microentreprises. "Il est donc difficile de pratiquer une politique
homogène en ce qui concerne son devenir", regrette André Sacco. Ce dernier
apprécie de ne plus être soumis au stress incessant de ses fonctions et "de ne
plus avoir à se mettre au courant de tout ce qui se passe". Sport, lecture,
vélo et italien, sa langue d'origine qu'il n'a jamais eue le temps d'approfondir, sont au
programme de ce jovial et jeune retraité.
En dates
1966
Comptable au France à Nancy
1969
Entrée au syndicat, 1 600 adhérents : on se bat contre le blocage des prix
1995
Début du combat contre la TVA
2000
Il ne reste que 700 adhérents et départ en retraite
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L'HÔTELLERIE n° 2695 Hebdo 07 Décembre 2000