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Conséquence de la crise de la vache folle
La deuxième crise de la vache folle a été celle de trop pour Johnny Letzter. Patron du Buf Mode à Strasbourg, il a décidé de changer d'enseigne au printemps prochain, et de se réorienter vers une cuisine du marché.
Ce changement d'enseigne sera l'occasion, pour Johnny Letzter, de proposer une nouvelle carte.
Qu'il soit rouge ou noir, le buf est souvent à l'enseigne des restaurants alsaciens. En 1983, Johnny Letzter, après avoir "pas mal voyagé aux Etats-Unis", décide de lancer la mode du buf dans la capitale alsacienne. "J'ai lancé le carpaccio, le T-Bone, le train de côtes, à Strasbourg", affirme le cuisinier. A l'époque, les veaux étaient aux hormones, les poulets pas encore à la dioxine. Mais le buf était intouchable pour ce petit-fils de fermier. "Je proposais un produit de luxe, l'Angus d'Aberdeen (Ecosse), la Rolls-royce du buf, insiste Johnny Letzter. C'est ce qui a fait notre image de marque." Les ravages de l'encéphalite spongiforme bovine au Royaume-Uni entraînent l'interdiction de toute importation : "On n'a pas fait le distinguo avec l'Angus", regrette le patron du Buf Mode qui perd près de 30 % de son chiffre d'affaires en un an. Johnny Letzter se tourne alors vers le Simmental, une espèce bavaroise labellisée dont l'aura n'atteint pas celle de l'Angus. Surtout, la carte s'élargit à "cinq ou six sortes de poissons. Mais on vient chez moi essentiellement pour manger du buf". La deuxième crise de la vache folle, survenue cet automne, est la goutte d'eau qui fait déborder le vase : près de deux tiers de la clientèle déserte le restaurant dans la semaine suivant la crise européenne.
Bien réfléchir avant de choisir un nouveau nom
"C'est juste une question d'image", affirme-t-il. Non sans raison ! Car
le restaurant d'à côté, qui répond au tranquille nom du Bistrot, n'a subi aucun
contrecoup : "Or, il s'agit de la même carte, des mêmes prix et de la même
cuisine", poursuit Johnny Letzter, propriétaire des deux restaurants. Qui ne
sait s'il faut en rire ou en pleurer. Se débarrasser de l'image du buf n'est
cependant pas une mince affaire. Outre l'impact auprès des guides, le choix de la
nouvelle enseigne doit être mûrement réfléchi : "Je ne veux pas être enfermé
dans un créneau trop précis, souligne, un rien échaudé, Johnny Letzter. Il ne
faut pas qu'il y ait un rapport trop direct avec la nourriture." Le cuisinier a
d'ailleurs sollicité ses habitués pour lui proposer un nom : "Pour l'instant, je
n'ai pas encore eu la révélation." Ce changement d'enseigne, admet le
restaurateur, sera aussi une occasion de 'rebondir' : "Nous allons faire une
cuisine de marché. J'adore y aller chaque matin et j'irai acheter ce qu'il me plaît",
dit Johnny Letzter. Il conservera une carte de base pour maîtriser les prix, mais il veut
aussi sortir de la 'rigidité' de la viande, et se permettre une plus grande créativité.
Ce qui nécessite aussi une nouvelle manière de travailler. Néanmoins, le cuisinier ne
souhaite pas changer de gamme : "Je ne sais pas faire du bon marché et je ne veux
pas me lancer dans le style étoilé car cela nécessite des investissements trop lourds."
Avec six employés et 60 couverts par jour pour les deux restaurants, le panier moyen
restera aux alentours de 200 francs le midi et 250 francs le soir.
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L'HÔTELLERIE n° 2700 Hebdo 11 Janvier 2001