Buffets de gare
Les buffets de gare, tables autrefois souvent réputées dans leur ville, ont fait doucement place à de nouvelles formules, proches des tendances actuelles de la restauration. Les grands concessionnaires se battent pour s'y développer, à côté des indépendants en constant recul.
Apparue dans les années 1830, la restauration de gare connaît une évolution en accord avec celle du chemin de fer. "A l'époque de l'âge d'or du train, les buffets de gare sont apparentés à des lieux de restauration gastronomique et sont souvent convoités pour des repas d'affaires ou des repas festifs", explique Pierre Talendier de l'A2C (Société d'aménagement de commerces et de concessions), filiale de la SNCF. Ces restaurants parfois réputés - Le Train Bleu à la gare de Lyon de Paris en atteste - attirent non seulement les voyageurs, mais surtout la clientèle de la ville. Bien plus tard, les transports en voiture, puis en avion, se développent énergiquement et se démocratisent. Ils rivalisent avec le chemin de fer. En même temps, les buffets de gare, concurrencés par les restaurants qui se montent dans les centre-villes, voient leur clientèle se réduire et finissent par mal vieillir.
De nouveaux concepts
Mais l'arrivée du TGV dans les années 80 redynamise le chemin de fer et, quelque temps
plus tard, la restauration de gare se modernise ici et là pour répondre aux nouveaux
besoins de la clientèle. Elle tend même parfois à suivre les tendances conceptuelles
actuelles. Nouvelles formules et nouveaux modes de gestion sont autant de changements
orchestrés par la SNCF et les concessionnaires, qui satisfont non seulement les 900
millions de voyageurs, mais également les habitants de la ville où se niche chaque gare.
Il y a aujourd'hui environ 3 000 gares en France et 210 points de restauration qui
produisent un chiffre d'affaires proche de 1,4 milliard de francs.
On distingue deux types de restauration de gare. Les snacks et les formules de
restauration à service rapide, avec vente à emporter, et les établissements avec
service à table. Ouvert non seulement sur la gare et les quais, mais toujours sur la
ville, le buffet de gare accueille comme avant une clientèle en majorité citadine. "80
% de ma clientèle vient de la ville", souligne Christophe Zoupas,
concessionnaire indépendant du Buffet de la Gare à Mulhouse. Quant à Quai n° 1,
spécialiste de la restauration de gare, sa phrase choc confirme ce fait : "Avec
Quai n° 1, vous n'attendrez plus de prendre le train pour aller à la gare."
Brassant une clientèle hétéroclite, et bientôt commercialisés aussi sous de grandes
enseignes de chaînes telles que Buffalo Grill (déjà à Montparnasse) ou Hippopotamus
(déjà à Metz), les buffets n'ont plus l'étiquette de restaurants de gare mais de
restaurants de ville à part entière. Ils cohabitent aussi avec des fast-foods, comme
Quick à Dijon par exemple. Parfois boudés par les voyageurs car décalés par rapport à
leurs attentes selon les sites, les buffets partagent, depuis déjà quelque temps, le
marché avec les ventes à emporter. Sachant que le temps d'attente des voyageurs dans les
gares ne dépasse pas les 30 minutes, cette formule permet aux personnes en déplacement
de se restaurer rapidement et économiquement. Déclinés de nombreuses manières,
thématisés ou non, ces points de restauration servent à 80 % des voyageurs à l'inverse
des buffets. Pour Quai n° 1, ils représentent facilement 30 % de l'activité
restauration réalisée dans une gare, avec une TVA avantageuse à 5,5 %.
La restauration concédée en gare
Bien que propriétaire des lieux, la SNCF n'exploite pas les points de restauration mais
concède leur gestion, suite à un appel d'offres, en échange d'une redevance - elle se
compose d'un minimum garanti et d'un montant d'environ 12 à 14 % du chiffre d'affaires.
En France, le marché de la restauration concédée des gares revient pour près de la
moitié de l'activité à 3 groupes : Autogrill, SSP Compass et Eliance. Phénomène tout
récent dans la restauration commerciale (alors que cela se pratique depuis longtemps en
restauration collective), ces puissants groupes sont spécialistes de la restauration
concédée (aéroports, musées, autoroutes ou centres commerciaux) et développent leurs
enseignes à 'Très Grande Vitesse'. L'autre moitié du marché se compose
schématiquement de 2 groupes (Quai n° 1 et Station-Restauration) et de restaurateurs
indépendants. Aujourd'hui, la tendance est à la baisse du nombre d'indépendants sur les
sites des gares. "Tous les 6 ou 10 ans, selon le niveau de l'investissement, un
nouvel appel d'offres est lancé. Prendre le risque d'être remis en question n'est pas
très attractif pour les jeunes", précise Christophe Zoupas à Mulhouse.
Allons-nous vers la disparition totale de ces concessionnaires indépendants ? Selon
Pierre Talendier de l'A2C, un équilibre se doit d'être maintenu entre les groupes et les
indépendants : "Là où un indépendant peut être très efficace, car il ajoute
une valeur humaine et une touche personnelle à l'établissement, un groupe n'atteindra
pas les mêmes résultats." Aussi, les buffets de gare semblent représenter un
bon compromis pour les indépendants pour réaliser une première expérience sans devoir
acheter un fonds de commerce. Et la clientèle est a priori facile d'accès. Mais on peut
penser qu'à l'avenir les grands concessionnaires ne leur laisseront que les sites les
moins juteux. Marché à gros potentiel (+ 4,5 % de voyageurs rien qu'en 2000 par rapport
à 1999), la restauration de gare intéresse au plus haut point ces gros opérateurs qui
partagent tous la même ambition : se développer sur ce créneau, dans des gares qui sont
autant de vitrines pour les grandes enseignes. Forte du dynamisme engendré par les
efforts de rénovation et d'aménagement réalisés dans les gares, la restauration de
gare brille avec un taux de croissance pour l'année 2000 supérieur à l'augmentation du
nombre de voyageurs transportés par la SNCF.
E. Georges
Bientôt commercialisés sous des enseignes comme Hippopotamus, déjà à Metz,
les buffets de gare deviennent des restaurants de ville à part entière.
Principaux concessionnaires des restaurants de garew SSP Compass w Eliance w Autogrill w Quai n° 1 |
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L'HÔTELLERIE n° 2709 L'Hôtellerie Économie 15 Mars 2001