Hôtels et restaurants
Des hôtels et des restaurants où tout est à vendre : il fallait y penser ! Du mobilier aux accessoires de décoration en passant par la vaisselle, le client peut acheter le restaurant ou l'hôtel par petits bouts. Si le concept est encore mal connu auprès des consommateurs, il prend petit à petit de l'ampleur.
Qui ne s'est jamais dit en regardant un tableau dans une chambre d'hôtel : "Il irait bien dans mon salon !" Jusqu'à présent, on repartait rarement avec un élément de décoration de l'hôtel (ou alors de façon malveillante). C'est désormais possible dans certains hôtels qui proposent à leurs clients d'acheter ce qu'ils veulent (ou presque...). Dans les hôtels de luxe, on connaît depuis plus d'un siècle le principe de vente de produits siglés et labellisés. C'est d'autant plus attractif quand l'établissement est très connu. Il y a aussi les expositions de toiles de peintres ou de sculptures, souvent achetables, ainsi que les boutiques qui vendent toutes sortes d'articles régionaux ou d'art. L'idée a suivi son chemin et les professionnels de la restauration, à leur tour, l'ont mis en pratique en proposant des choix de produits gastronomiques. C'est le cas de Régis Marcon, gérant de l'Auberge et Clos des Cîmes à Saint-Bonnet en Haute-Loire. Le lauréat du Bocuse d'or, 2 macarons au Guide Rouge, propose sa vaisselle signée, des tabliers marqués à son nom, des nappes, des confitures faites maison, des pâtisseries réalisées dans ses cuisines et même des livres de recettes. "La clientèle est contente de rapporter un souvenir de son passage au restaurant", déclare Régis Marcon. Cet exemple n'est pas isolé : la plupart des grands chefs, tels que Bernard Loiseau, commercialisent aussi, dans leur boutique et même via Internet, des produits sélectionnés par leurs soins, avec parfois des lignes griffées à leur effigie. D'autres ont fait le pari d'aller beaucoup plus loin. Ils conjuguent l'hôtellerie ou la restauration avec une activité annexe, une passion souvent inassouvie.
Des objets qui font partie de la décoration
Du verre à 50 F à la mosaïque à 3 200 F, tout est à vendre au restaurant Le
Dénicheur à Paris. Son credo : le restaurant-brocante. Là, le client vient déjeuner ou
dîner dans un fatras de bibelot et peut repartir, après marchandage, avec sa chaise, sa
table... "Au départ, mon idée était de créer un établissement où l'on peut
tout acheter, explique Franck, gérant du restaurant. Depuis, je gère une unité
de 22 places assises." L'entourage et les amis du gérant ont alors tous apporté
un objet pour lancer le concept, et aujourd'hui, le succès est au rendez-vous puisqu'il
est difficile de trouver une table libre sans réserver à l'avance. Michel Rousselet,
quant à lui, est propriétaire de l'hôtel Mangio Fango aux Saintes-Maries-de-la-Mer. Il
met à la vente des pièces qui font partie de la décoration intérieure de
l'établissement. Les clients peuvent ainsi acquérir des lampes, des vases, des peintures
d'artistes contemporains et autres céramiques. "Chaque pièce est unique et
provient de collections personnelles, d'amis artistes ou de brocantes", déclare
Michel Rousselet. Même si on y vient d'abord pour dormir, l'hôtel, grâce à ses
articles de valeur, a su fidéliser une clientèle nouvelle passionnée d'art. "Les
objets sont en situation, et au fond, c'est ce qui interpelle le client", ajoute
Michel Rousselet.
Chacun y trouve son compte
Certains peuvent trouver ces concepts saugrenus... Pourtant les professionnels qui ont
tenté l'aventure y trouvent leur compte. Preuve en est le restaurant Pierre au Palais
Royal de Paris dont le propriétaire Jean-Paul Arabian a ouvert le premier
restaurant-fleuriste. "Cette idée bucolique rend le restaurant encore plus
attractif", déclarait-il récemment. Pour d'autres encore, c'est le moyen de
renouveler la décoration régulièrement et à moindres frais. Mais la plupart y voient
la possibilité de marier leur activité professionnelle à leur passion et de faire
partager leurs intérêts. Enfin, plus accessoirement, cela s'avère être parfois une
source de profits supplémentaires. Mais comme le déclare Michel Rousselet, "c'est
une affaire de goût plus qu'une affaire de commerce". De manière générale,
ces ventes annexes ne représentent qu'une petite partie de l'activité. "L'affaire
n'est pas lucrative (5 % du chiffre d'affaires), ajoute Michel Rousselet, mais cela
le deviendrait si les objets exposés avaient une valeur minimum de 10 000 F." Si
les professionnels tirent un bénéfice, il est souvent produit par la ponction d'une
commission variable pour l'exposition des objets (entre 20 et 25 % du montant). Par
ailleurs, il faut signaler que l'activité n'est pas sans risque : le chapardage et la
détérioration d'articles sont monnaie courante. L'investissement important de départ
nécessite un système de sécurité plus rigoureux qu'à l'accoutumée et le respect de
certaines normes. "La commission d'hygiène est venue au restaurant et n'a pas
jugé réglementaire la vaisselle dépareillée que j'utilisais", explique Franck
du restaurant Le Dénicheur. Mais ces tracasseries ne découragent pas ces professionnels
de l'hôtellerie et de la restauration qui ont le courage d'innover dans une industrie qui
tend vers la standardisation.
M. Guillot
L'hôtel Mangio Fango a su fidéliser une clientèle nouvelle passionnée d'art.
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L'HÔTELLERIE n° 2709 L'Hôtellerie Économie 15 Mars 2001