Danièle Chavant
Danièle Chavant, le regard clair malgré la fatigue, le sourire aux lèvres, et un mot gentil pour tous ses clients. Nul ne pourrait soupçonner qu'elle vient d'obtenir un score étonnant aux dernières municipales à Grenoble, une ville de plus de 250 000 habitants.
Certes, la liste de la
société civile dont elle faisait partie n'a pas remporté les élections, mais 49 % des
votants lui ont fait confiance. Et cela, Danièle compte bien ne pas l'oublier et
défendre ses idées au sein de la nouvelle municipalité. Et des idées, elle en a et en
a toujours eu.
A 20 ans, Danièle Chavant veut être hôtesse de l'air. La voie royale est l'école
hôtelière où Air France vient recruter ses plus jolis éléments. Ses parents la
poussent vers cette école, mais plutôt pour reprendre l'affaire familiale.
L'hôtel-restaurant Chavant, créé en 1933 à Bresson (38) à 7 km de Grenoble, est connu
dans toute la région pour la qualité de sa cuisine. Déjà son frère Jean-Pierre se
destine aux fourneaux, comme son papa. Danièle attend sa majorité pour faire ce qu'elle
souhaite vraiment. Mais le destin en a décidé autrement. Madame Chavant meurt
brusquement. C'est un choc terrible pour cette famille unie. Danièle décide alors de
reprendre le poste de sa mère dans l'hôtel-restaurant. Elle s'en sort très bien et
l'affaire progresse. Le frère et la sur forment un binôme parfait. Jean-Pierre, en
souvenir de leur origine bretonne, travaille les poissons, le homard et les crustacés. La
carte déploie toute sa créativité avec des saveurs exotiques. Si la qualité de la
cuisine attire bien des clients, le cadre se transforme sous la patte de Danièle. "Je
tente de donner l'impression à mes clients d'être chez eux", dit-elle. Danièle
multiplie les soirées à thème et lance une table d'hôte.
Passionnée par la vie publique
Mais la maison familiale ne suffit pas à contenir l'énergie de Jean-Pierre et Danièle,
qui veulent s'impliquer dans la vie politique et citoyenne, apporter leur expérience de
chef d'entreprise, retracer la réalité du terrain. Tous deux y réussissent avec brio.
Jean-Pierre est maire de sa commune depuis 24 ans, et vient de se faire réélire au
premier tour des dernières élections. Très impliqué dans la formation des apprentis,
il fonde, il y a 25 ans, l'Association des jeunes cuisiniers et restaurateurs de France. A
Bresson, une rue porte le nom de son père, car la commune doit beaucoup à la famille
Chavant. Danièle croit beaucoup au tourisme, et crée l'office de tourisme dont elle sera
la présidente pendant 14 ans. Bien sûr, l'office n'a aucun budget et Danièle doit
chercher les aides auprès d'entreprises, de partenaires. Car, elle refuse, dit-elle,
"d'être un élu potiche". Elle obtient un budget propre, et lance des
initiatives qui feront date. Elle propose des balades à vélo dans la ville, crée la
route Stendhal, le marché de Noël avant que ce ne soit la mode, organise un véritable
service des guides conférenciers. La ville est présente dans tous les salons et Danièle
sillonne le monde pour vendre Grenoble et son réceptif. "Les organisateurs de
congrès choisissent une destination pour son image. Celle de Grenoble est synonyme de
haute technologie, la Silicon Valley française." Peu à peu, Grenoble se fait
connaître comme ville de congrès où il fait bon vivre et faire la fête. La mairie
change de couleur politique et l'office de tourisme devient municipal. Danièle en quitte
alors la présidence en 1997. "J'étais désarmée. Tout le travail réalisé a
été anéanti. Grenoble n'est plus cité dans le Guide national des villes de
congrès depuis trois ans, et quand on sait qu'un congrès se décide deux ans à
l'avance, c'est une catastrophe."
Réveiller la ville
Les élections municipales de 2001 lui donnent l'envie de se battre. Elle s'inscrit sur
une liste sans étiquette, celle de Max Micoud, et donne la place aux professionnels.
"Une liste propre et transparente après ce que Grenoble a vécu." A la
surprise générale, cette liste arrive en tête au premier tour. Mais la liste opposée
remporte le deuxième tour. Danièle ne veut pas oublier que presque 1 Grenoblois sur 2 a
voté pour sa liste. Elle veut faire entendre sa voix au conseil municipal. "Nous
autres hôteliers sommes confrontés à une multitude de disciplines. Il faut savoir tout
faire. Je veux expliquer nos difficultés, nos joies. Je souhaite apporter un peu de
réalité économique concrète dans la vie publique." Ses projets ? "La
fête, les grands événements populaires... Il faut que la ville revive, je veux
réveiller cette belle endormie !"
F. Tari
© Vincent Wales
"Une belle auberge anglaise à la campagne, voilà ce que j'ai voulu faire
avec tout le raffinement que cela comporte", explique Danièle Chavant.
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L'HÔTELLERIE n° 2711 Hebdo 29 Mars 2001