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Editorial
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Aux fourneaux

Plus le temps passe et plus les professionnels sont inquiets de la rigidité dont font preuve les politiques vis-à-vis de la gestion des entreprises et, en particulier, vis-à-vis de l'application de la loi sur la réduction du temps de travail. Que ceux qui nourrissent encore quelque espoir le sachent, Elisabeth Guigou a été très claire : les très petites entreprises n'échapperont pas aux 35 heures... "La loi sera appliquée pour tous au 1er janvier 2002. Pas question de la différer, ni de penser pouvoir la contourner", a prévenu la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, dernièrement, lors d'une visite à Lyon. Communication oblige, elle a tenté, pour adoucir son image que l'on qualifie de froide et de dure, de rassurer en rajoutant : "ce ne sera pas un couperet, nous allons mettre à profit le temps qui nous reste pour mieux informer les entreprises artisanales, les aider, les convaincre que de telles conditions de travail sont de plus en plus appréciées du personnel".
De tels propos sont révélateurs, ils montrent combien nos dirigeants sont déconnectés des réalités tant humaines qu'économiques des entreprises, et en particulier des plus petites. Félicitant un boulanger qui venait d'anticiper la loi sur les 35 heures, la ministre s'est immédiatement approprié cette expérience pour la généraliser à toutes les petites entreprises. La démagogie de ceux qui parlent sans savoir. Pour savoir, il eut fallu qu'elle passe, ne serait-ce qu'une toute petite semaine, aux côtés de ce boulanger. Elle aurait ainsi pu rester quelques heures à la caisse à vendre petits pains et croissants, à s'obliger à sourire aux clients tout en approvisionnant les rayons, en organisant la réception des sacs de farine, en gérant les emplois du temps des commis, des vendeurs. Périodes de fêtes, cérémonies, elle aurait organisé horaires et production des pièces montées, des saint-honorés, en même temps que les livraisons de pains aux restaurants alentour, et le tout, en gardant le sourire et en respectant les horaires définis par la loi ! Elle aurait compris peut-être ce qu'est le quotidien d'une entreprise de ce type, et aurait certainement fait preuve de quelque prudence envers l'application des 35 heures dans les petites entreprises. Quelle naïveté de croire qu'il faille convaincre les chefs d'entreprise que le personnel apprécie des horaires de travail allégés !
Tous ces métiers - et ceux de l'hôtellerie-restauration en sont le cuisant exemple - sont des métiers de production et de service. Ils sont avant tout dépendants de la clientèle et des temps de production. Aussi, si sur le principe on peut être favorable à une réduction du temps de travail, ce n'est qu'en donnant les moyens aux plus petites entreprises que l'on pourra les convaincre de sa mise en place. Ce n'est qu'une question de faisabilité, pas de principe. Les ministres gagneraient réellement à prendre en charge, en engageant leurs deniers personnels, une petite entreprise quelques mois. Leurs discours envers les entrepreneurs s'en trouveraient dès lors certainement modifiés et leurs décisions politiques gagneraient en réalisme et perdraient en démagogie.
PAF


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L'HÔTELLERIE n° 2716 Hebdo 3 Mai 2001


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