12e édition de Toques et Clochers à Limoux
Pour la 12e fois, les caves de Sieur d'Arques, à Limoux dans l'Aude, ont accueilli la vente aux enchères de fûts de chardonnay spécialement sélectionnés.
Un rendez-vous devenu incontournable pour des acheteurs du monde entier, professionnels du vin, restaurateurs ou institutionnels qui déboursent un peu plus cher chaque année pour acquérir une précieuse barrique. Mais pour en arriver là, les organisateurs de cette manifestation ont dû parvenir à prouver qu'un cépage qui a surtout acquis ses lettres de noblesse dans des régions plus septentrionales, et qui n'avait trouvé place ici que dans le but d'enrichir le goût de la célèbre blanquette, était capable de s'exprimer avec les mêmes qualités. "Ils y ont réussi pleinement, commente Béatrice Da Ros, directrice de l'Association nologues de France, qui regroupe les 1 500 techniciens français. Je participe à de nombreuses dégustations internationales et je n'ai pas honte de faire la comparaison. Les chardonnays de limoux sont à la fois une belle expression du terroir et du cépage."
Terroir océanique : prêt à consommer
La sélection rigoureuse des vins mis aux enchères - près de 130 francs cette année -
s'effectue dans les quatre terroirs qui ont été délimités en fonction de l'orientation
géographique, du climat et de l'altitude. Ce qui livre à la dégustation des vins une
expression très différente.
Ainsi, le terroir océanique a offert dans son millésime 2000 "des vins à
consommer dès maintenant avec des nez très fins et des arômes floraux, notamment
d'acacia. La bouche est pleine, structurée, avec beaucoup de gras, et présente une belle
alliance de l'ensemble", analyse encore Béatrice Da Ros.
Le terroir méditerranéen se situe le plus à l'est de l'appellation, dans une région
où l'altitude moyenne n'atteint pas 200 mètres. "Ces vins sont en général
riches, très aromatiques et parfois même un peu chauds. Seule la commune de Rouffiac, à
la limite de la haute-vallée, bénéficie d'un microclimat qui assure beaucoup de
fraîcheur. Le millésime 2000 présente des vins plus primeurs que les autres. Ils sont
gais, dessoiffants et gourmands", commente Georges-Albert Aoust, consultant en
vins basé à Beaune.
Haute-vallée : pour le futur
Le terroir haute-vallée est celui qui, depuis le début de cette aventure à la
fois de développement de la qualité, promotionnelle et économique, réunit le plus de
suffrages. "Il bénéficie d'une situation géographique privilégiée avec un
ensoleillement plus équilibré qui se traduit au niveau de l'acidité et de la matière.
Autant de critères qui lui assurent le meilleur potentiel de garde des quatre
terroirs", explique Philippe Etchebest, chef de l'hôtel Château Des Reynats
dans le Périgord, et Meilleur ouvrier de France 2000. Loin du vignoble bordelais qu'il
vient de quitter, il s'apprête à introduire ces blancs limousins à sa carte. "Simplement
parce que les efforts réalisés par Limoux en font des produits que l'on peut conseiller
sans prendre de risques." Une réalité dont Pascal Calvel, sommelier du
restaurant Les Jardins de l'Opéra à Toulouse, est convaincu. Lui a eu un coup de foudre
pour le terroir d'Autan. "C'est un terroir qui évolue et c'est celui qui a le
plus d'avenir. Sa fraîcheur et sa simplicité lui offrent la plus belle facilité de
consommation."
Les prix grimpent
Mais ce plaisir a un prix. Vendu aux enchères 30 000 F en moyenne le fût, chacune des
300 bouteilles qu'il représente est ensuite proposée à plus de 200 F au minimum en
restauration. "Nous avons commencé à 250 F, poursuit Pascal Calvel, mais,
vu la flambée des prix, nous allons bientôt devoir doubler nos tarifs. C'est une bonne
chose que d'avoir un vin finalement unique. Un même producteur n'a que deux ou trois
barriques sélectionnées. Alors, celle que l'on choisit et achète ne peut que nous
ressembler et séduire nos clients."
Une clientèle qui, de Rejkavik à Pékin, de Miami à Berlin, trouvera dans quelques mois
les bouteilles acquises au cours de la vente présidée par Antoine Westermann, le chef 3
étoiles du Buereheisel à Strasbourg. Un succès qui permettra de financer un nouveau
clocher, car cette opération de promotion assure aussi la protection d'un patrimoine
architectural très riche. Et ça aussi c'est original !
J. Bernard
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L'HÔTELLERIE n° 2717 Hebdo 10 Mai 2001