Affiliation à une chaîne
Si les hôteliers indépendants demeurent de grands individualistes, ils rejettent de moins en moins l'idée de s'affilier à un réseau. Mais les conditions pour rejoindre une chaîne semblent comprendre de plus en plus d'exigences pour rentabiliser l'opération.
Après les années de crise d'avant 1997 et la belle reprise de l'activité hôtelière qui a suivi cette période difficile, les mentalités des hôteliers ont très sensiblement évolué sur la fin de la dernière décennie. Pour preuve, les réponses des hôteliers indépendants questionnés par Coach Omnium à 7 années d'intervalle sur leur vision de l'univers des chaînes hôtelières intégrées et volontaires. Désormais, on se montre moins réfractaire à l'affiliation à un réseau. En 2001, il y a parmi les indépendants 31 % de candidats potentiels à l'adhésion à un réseau. Ils sont plus nombreux qu'en 1994 où ils n'étaient que 18 %. D'une manière générale, les chaînes ont fini par bénéficier au fil du temps d'un meilleur crédit dans la profession, à défaut d'une meilleure image, parce qu'on se plie à l'évidence qu'elles attirent beaucoup de clients et que leurs hôtels obtiennent souvent de bons scores de remplissage. L'hôtellerie indépendante a également vu ses exploitants rajeunir depuis ces dernières années avec, très souvent, d'anciens clients d'hôtel convertis en hôteliers ou encore des transfuges de chaînes qui se sont mis à leur compte. "Ces nouveaux profils sont ceux de gens plus ouverts à la mise en réseau de leur hôtel que par le passé", explique Pierre Ferry, responsable de développement d'une chaîne.
2/3 d'hôteliers indépendants isolés
Pourtant, il y a souvent un décalage entre l'intention de s'affilier à un réseau et
l'acte concret de s'y engouffrer. Il y a 7 ans, 64 % des hôteliers français étaient
isolés, n'arborant pas d'enseigne de chaîne intégrée ou volontaire. Ils sont
aujourd'hui encore 63 % à être dans ce cas. Ainsi, environ 6 500 établissements sont
inscrits dans un réseau et ce parc n'évolue quasiment pas, même s'il ne s'agit pas
forcément des mêmes hôtels. Si les hôteliers français restent de grands
individualistes, il faut dire aussi que l'offre se compose de beaucoup de petites maisons
qui ne voient pas toujours une justification à se raccrocher à un réseau. A leur
décharge, les professionnels qui seraient intéressés de rejoindre un groupement
commercial avouent être sous-informés sur les possibilités qui s'offrent à eux. "Il
y a une méconnaissance assez profonde de l'univers et du fonctionnement des chaînes chez
les hôteliers, affirme un ATH d'une chambre de commerce. Quand ils s'ouvrent à
l'idée de s'affilier, ils ne savent généralement pas quelle enseigne choisir et quelle
serait la chaîne qui leur conviendrait le mieux. Ils n'ont pas à leur disposition
d'enquêtes critiques valorisant ou définissant les chaînes les unes par rapport aux
autres." Du coup, ce flou et cette carence en information objective découragent
un grand nombre de candidats qui ne savent pas comment trouver chaussure à leur pied. Les
chaînes de leur côté font bien des approches directes d'hôteliers, lesquels pour
certains sont parfois littéralement harcelés pour se franchiser ou s'abonner à des
enseignes. Mais elles avouent ne s'intéresser globalement qu'à des établissements de
plus de 40 chambres, ce qui limite leur champ d'investigation et laisse la plupart des
exploitations sur le bord de la route. Pour autant, s'ils ont du mal à réaliser des
choix, les hôteliers sont de plus en plus conscients de l'intérêt de faire partie d'un
réseau commercial, bien que cela ne se limite pas à l'affiliation à une chaîne. 45 %
pensent que cela pourrait représenter un réel bénéfice pour eux devant leurs
difficultés à commercialiser leur hôtel. Ils montrent même une exigence accrue en
termes de notoriété, de dynamisme commercial, de développement et de professionnalisme
vis-à-vis de la chaîne qui les accueillerait. Cette situation a pour conséquence
d'éliminer de plus en plus les petites enseignes confidentielles au profit des ténors.
Par ailleurs, si les grands groupes hôteliers ont longtemps été mal-aimés ou craints
des hôteliers, ces derniers reconnaissent majoritairement, pour 7 sur 10 d'entre eux, que
ce sont les seuls qui peuvent aujourd'hui apporter les meilleures cautions de
rentabilité. C'est la même chose pour les chaînes volontaires parmi les plus denses en
nombre d'hôtels. La batterie imposante de moyens promotionnels dont elles disposent (et
qu'elles développent sans cesse) rassure ouvertement.
Les chaînes sont considérées comme des fournisseurs
On l'a compris, quitte à entrer dans une chaîne, les propriétaires d'hôtels veulent
avoir la garantie que le retour sur investissement sera bon, mais également rapide, ce
qui est plus aléatoire. Comme en 1994, et sans doute de façon accentuée, on considère
toujours la chaîne comme une sorte de fournisseur qui doit générer des clients nouveaux
et un chiffre d'affaires additionnel. Les hôteliers ne souhaitent toujours pas voir les
enseignes hôtelières comme des partenaires avec qui naviguer dans un objectif commun.
Pire encore, si les professionnels reconnaissent un savoir-faire aux chaînes, ils ne
cherchent pas forcément à l'acquérir. Même les conseils en matière de
commercialisation ou de qualité, par exemple, ne sont pas considérés comme un élément
moteur pouvant alimenter leur envie de s'affilier. En résumé, les exploitants veulent
juste que leur taux d'occupation explose grâce à leur adhésion à une marque. Dans
cette logique, payer une redevance, voire investir dans le produit, ne sont plus
forcément des freins si on obtient l'assurance d'un bon rendement.
Séduire les candidats
Malgré cela, la perte de son identité ou de son indépendance, les risques supposés
d'inquisition de la chaîne de voir dénaturer son concept hôtelier restent les
principales craintes des hôteliers indépendants qui, pour la plupart, ont encore bien
des préjugés en tête. Mais ces préoccupations sont en recul comparées aux
déclarations enregistrées par Coach Omnium en 1994. Il est clair que les chaînes ont de
plus en plus de pain sur la planche pour attirer de futurs affiliés, surtout que la
concurrence est rude et que l'on assiste à une raréfaction de cibles attractives. Leur
stratégie gagnante de ces dernières années est une forte sélection à la source et une
politique d'assouplissement des conditions d'affiliation. Le nouveau profil des jeunes
hôteliers devrait faire le reste.
M. Watkins
Les exploitants veulent que leur TO explosent grâce à l'affiliation à une
chaîne.
Méthodologie : Les enquêtes de 1994 et de 2001 portent sur un total de 565 hôteliers indépendants français de plus de 25 chambres de 1 à 4 étoiles, interrogés par Coach Omnium. |
Etude 2001 | Etude 1994 | |
Non | 64 % | 74 % |
---|---|---|
Oui | 31 % | 18 % |
Ne sait pas | 5 % | 8 % |
Source : Coach Omnium |
Etude 2001 | Etude 1994 | |
Dynamisme commercial de la chaîne | 78 % | 47 % |
---|---|---|
Notoriété de l'enseigne | 71 % | 58 % |
Professionnalisme de la chaîne | 70 % | 45 % |
Développement dynamique | 66 % | QNP |
Coût de la redevance | 52 % | 65 % |
Caractéristiques des hôtels du réseau | 47 % | 55 % |
Densité du réseau | 36 % | 15 % |
Accéder à un savoir-faire et en bénéficier | 26 % | 47 % |
Pouvoir bénéficier des conseils de spécialistes |
25 % | 47 % |
Autres thèmes | 17 % | 9 % |
Source : Coach Omnium | ||
QNP : question non posée |
Etude 2001 | Etude 1994 | |
Le coût de la redevance | 48 % | 68 % |
---|---|---|
L'imposition d'un produit typé ou standardisé | 38 % | 47 % |
Perdre son indépendance | 18 % | 16 % |
Devoir se conformer à une politique commerciale | 14 % | 25 % |
Faire l'objet d'une surveillance de la chaîne | 12 % | 9 % |
La perte d'identité | 5 % | 8 % |
Source : Coach Omnium |
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L'HÔTELLERIE n° 2722 L'Hôtellerie Économie 14 Juin 2001