Conséquences - LE 11 SEPTEMBRE 2001, LE MONDE OCCIDENTAL A BASCULÉ DANS L'INSÉCURITÉ. SUR LE PLAN ÉCONOMIQUE, DES SECTEURS EN SUBIRONT LES CONSÉQUENCES PLUS QUE D'AUTRES. LE TOURISME EST DE CEUX-LÀ.
Alors que la conjoncture économique internationale, et en premier lieu américaine, régresse depuis quelques mois, les attaques visant les Etats-Unis et, en corollaire, les conséquences des frappes en Afghanistan, portent un coup de grâce à la plupart des industries. Effondrement des cours boursiers (chute immédiate de 19 % pour Amadeus, de 16 % pour Air France, de 12 % pour Accor et de 19 % pour le Club Med) et mise en difficulté des secteurs de l'assurance, du luxe et du tourisme, marquent le début de la crise, même si, au fil des semaines qui ont suivi, les cours se sont petit à petit ressaisis. Entre-temps, parmi d'autres titres, celui d'Accor se retrouve 1 mois après les événements à environ - 30 % de son niveau d'avant le 11 septembre. "Les attaques perpétrées sur les villes américaines ont provoqué des répercussions probablement plus importantes que celles engendrées par n'importe quelle crise survenue dans le passé", déclare l'Organisation mondiale du tourisme. Selon l'institut américain Dri-Wefa, les attentats représenteront un manque à gagner de 76 milliards de dollars pour le tourisme américain en 2002. La perte pour cette année devrait être équivalente à 10,5 % des dépenses totales de tourisme en 2000.
Didier Le Calvez, directeur du George V : "Le manque à gagner du mois de
septembre pour notre hôtel sera d'environ 400 000 euros."
Un effet domino
Depuis quelques semaines, la presse se fait l'écho des effets observés sur le secteur du
tourisme. Les compagnies aériennes annoncent dans la foulée 140 000 suppressions
d'emplois et une réduction des vols de plus de 20 %. L'hôtellerie, notamment le haut de
gamme parisien et azuréen, les congrès-conventions et les séminaires connaissent
également une passe difficile. Annulations de réunions d'affaires, d'événements, de
salons, de conventions d'entreprises, de lancements de produits ou de voyages
touristiques, mènent la vie dure aux professionnels du tourisme et sont autant
d'activités en moins pour les services banquet des hôtels et des restaurants. Peu de
prestataires de services en lien avec les entreprises ne souffrent pas d'annulations de
commandes. Alors que Didier Le Calvez, directeur du George V, confie, "le manque
à gagner du mois de septembre pour notre hôtel sera d'environ 400 000 euros",
le groupe Hilton confirme une chute de 20 % du taux d'occupation de ses hôtels
londoniens. Le Fouquet's et la Closerie des Lilas, deux restaurants parisiens haut de
gamme, auraient enregistré une baisse respective de 20 et 35 %. Le secteur des casinos,
quant à lui, a déjà licencié près de 15 000 personnes, peut-on lire dans Le Figaro
Economie. Chez Dégriftour, les ventes restent inférieures de 20 % aux résultats
attendus pour cette période. Selon le Snav, 11 000 annulations ont été observées en
France dans les 7 jours suivant le drame, dont la moitié provenait des Etats-Unis. Les
Nord-Américains sont la première clientèle de l'Hexagone pour les longs courriers avec
3,95 millions de séjours estimés en 2000. La liste est presque infinie des conséquences
de la grave crise qui sévit sur le plan international. L'activité touristique est donc
en suspens, et les effets de ces perturbations ne se limitent pas aux continents
américains et européens ; les pays d'Asie, du Golfe et du bassin méditerranéen, dont
en premier l'Egypte, crient à la famine touristique.
L'hôtellerie suit le mouvement de récession
La France, premier pays récepteur avec plus de 75 millions de visiteurs en 2000, s'attend
sans surprise à une chute de ses arrivées. Le bureau de Maison de la France de New York
envisage déjà une baisse d'activité de 30 % vers l'Europe. Mais, l'industrie
touristique nationale va également pâtir de la crise nord-américaine sur le plan du
tourisme d'affaires, car bon nombre de groupes français travaille avec ce pays, mais
aussi avec des entreprises d'autres pays qui travaillent avec les Etats-Unis. Quant à la
demande domestique sur le territoire américain, les hôtels annoncent fréquemment des
chutes de 50 à 60 % de leur taux de remplissage. Las Vegas, grand centre de conventions,
est actuellement en déroute. Chez Accor, on estime la baisse du chiffre d'affaires des
hôtels Sofitel américains à 25 % et à 10 % celle de l'hôtellerie économique. C'est
une première estimation. En réaction immédiate, le groupe a annoncé que les
investissements planifiés pourraient être réduits de 20 à 25 % selon l'évolution de
la conjoncture. Le Club Med, quant à lui, exerce 16 % de son activité aux Etats-Unis.
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Des avis partagés
Ces premières retombées sur le secteur sont instantanées et violentes. Menacé ou
inquiété, l'humain a le réflexe de rester chez lui et d'éviter tous déplacements
professionnels comme personnels. C'est pourquoi le secteur du tourisme d'affaires et de
loisirs est le premier sanctionné des aléas conjoncturels. Même si des rapprochements
ont été effectués par les spécialistes avec la guerre du Golfe, nul ne sait la
manière dont les choses vont évoluer. L'histoire révèle cependant que, par temps de
crise, les plus faibles s'avèrent fragilisés. Par conséquent, le phénomène de
concentration s'opère et la tendance est alors à la formation poussée de puissants
groupes. En ce qui concerne la fréquentation hôtelière, il est certain que les
catégories de gammes supérieures, dont la clientèle est en grande majorité
étrangère, sont les plus durement touchées. "Nous avons la chance d'avoir un
mix clientèle équilibré. Cela nous expose moins violemment aux événements
conjoncturels", a témoigné un hôtelier d'un palace cannois. D'après Accor,
les établissements économiques en Europe et le milieu de gamme en province ne
ressentiront que faiblement les effets de la crise. "80 % des arrivées
touristiques en France s'effectuent par voie terrestre, le pays a donc des atouts pour
résister", assure Francesco Frangialli, directeur de l'Organisation mondiale du
tourisme. Mais c'est sans compter sur les blocages psychologiques du public. Les messages
optimistes sont toujours là pour tenter de contrer les avis pessimistes. Toujours est-il
que, selon l'Insee, le moral des Français n'est pas au beau fixe. Ils pensent que le
chômage, l'inflation et leur niveau de vie vont empirer selon différents sondages qui
ont cours. Cette situation de recul de l'activité économique mondiale ne vient
qu'accélérer un phénomène de récession qui commençait à être observé depuis le
début de l'année 2001.
E. Georges zzz20a
Quelques chiffres w 29 % : part de la clientèle américaine des hôtels de la
Société du Louvre |
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L'Hôtellerie n° 2743 L'Hôtellerie Économie 8 Novembre 2001