Une centaine de manifestants ont traversé les rues du Mans la semaine dernière. A l'instar de plusieurs autres départements, ils ont souhaité rappeler aux nouveaux élus les promesses de campagne.
"Ce n'est pas un geste politique mais revendicatif", a répété Jean-François Girault, président de la Confédération des professionnels indépendants de l'hôtellerie, la semaine dernière, en tête du cortège de la manifestation organisée dans son département de la Sarthe. Avec lui, une centaine de restaurateurs, discothécaires, cafetiers, hôteliers. Munis de casseroles, de couvercles et de grosses cuillères, ils ont entamé une marche dans les rues du centre-ville du Mans. Les slogans portaient sur la TVA. "Baisse de la TVA, Chirac, t'as promis, tu tiens", pouvait-on lire sur les panneaux. Ou encore "Fabius, tu n'as pas tenu parole, Chirac, il faudra tenir". Partis de la République, ils ont rejoint la préfecture en passant par le quartier des Jacobins. A la veille de l'Ascension, de nombreux Manceaux faisaient leurs courses. Certains s'arrêtaient sur le passage des manifestants, intrigués par cette cohorte de toques blanches. D'autres allaient leur serrer la main ou les embrasser. "La réaction des gens est importante, a commenté un peu plus tard Jean-François Girault. Ils ne sont pas hostiles au fait que nous manifestions. Au contraire. Regardez, nous avons bloqué le passage, et malgré cela, les automobilistes nous faisaient des signes d'amitié."
Opération escargot réussie pour Jean-François Girault ce mardi 7 mai au Mans.
Petits et grands
Des établissements très différents étaient représentés : un maître d'hôtel de chez
Ricardeaux, le nouvel étoilé du Guide Rouge Olivier Boussard, les patrons de la
Foresterie, du Papea, du Maroc Gourmand, de la Taverne de Maître Kanter, du Parvis
Saint-Hilaire, du Globe, de la discothèque Nulle Part Ailleurs... Diana Falise, l'épouse
de Richard Noël, président départemental des cafés de la Sarthe, accompagnait son mari
sur le terrain. "Nous tenons un bar-restaurant rue Pasteur. C'est toujours
difficile pour nous de manifester ouvertement notre mécontentement. Je crois d'abord que
la profession rechigne, par pudeur, à crier au grand jour ce qui ne va pas. Nous avons
l'habitude d'accueillir, de faire plaisir, nous apportons un moment de détente... Alors,
jouer les trouble-fêtes n'est pas dans notre manière de penser. Nous avons aussi un
autre problème. Je vais prendre mon propre exemple. Mon mari et moi avons une petite
structure et nous avons dû fermer. C'est un choix difficile, et beaucoup n'ont même plus
les moyens de le faire." Diana Falise n'est pas venue seulement pour la TVA.
Elle, comme d'autres professionnels, redoute la stricte application de la loi Aubry et
s'inquiète des conséquences à terme. "Les 35 heures, c'est de la folie. Pour
s'organiser, c'est un casse-tête. Et puis quand on a une clientèle de bureaux comme
nous, on accuse une réelle baisse du chiffre. Les gens s'en vont plus tôt."
Les rayons de soleil qui balayaient le parcours ajoutaient à l'esprit bon enfant de cette
opération escargot dont le but était de rappeler aux politiques qu'ils doivent être les
représentants du peuple et non des "machines déconnectées de la réalité",
comme l'exprime un manifestant. Des jeunes professionnels, en stage, en alternance, ont
accompagné leurs aînés dans leur défense du métier. Dans une récente interview, le
président de la CPIH nous avait annoncé qu'une vingtaine de départements
manifesteraient en même temps que la Sarthe. Mais, entre-temps, la nomination de
Jean-Pierre Raffarin à la tête du gouvernement a tempéré les ardeurs. "Les
départements qui le connaissent lui font confiance. Ils ont foi en lui et préfèrent lui
laisser le temps de mettre les choses en place. Des départements ont décidé de
manifester le 7 juin." Malgré ces quelques désistements de dernière heure,
Jean-François Girault s'est dit satisfait par la mobilisation. "Au Mans, nous
avions 80 inscrits et d'autres sont venus sans prévenir. Cette opération n'a aucune
couleur politique. Ce que nous voulons, c'est qu'on nous écoute et qu'on respecte notre
savoir-faire." Dans les jours qui viennent, le président de la CPIH devrait
présenter, en partenariat avec l'Umih, un dossier détaillé sur la TVA aux nouveaux
responsables du ministère de tutelle. "Je ne sais pas si nous tenons le bon bout,
mais, pour une fois, j'ai quand même envie d'y croire", termine le président de
la CPIH.
S. Soubes zzz74v
Jean-François Girault et son épouse aux côtés de M. Blanchet (au fond),
président des hôteliers de la Sarthe.
Qu'en pensent les jeunes ? Ludo, 18 ans : "Je prépare un
bac pro. On l'a vu, à l'occasion de la présidentielle, les jeunes peuvent avoir un
impact. Ce n'est pas un prof ni même des patrons qui m'ont dit de venir. Je l'ai fait
parce que j'ai envie de travailler dans le secteur que j'ai choisi. On dit que la
restauration, c'est dur. C'est vrai. Mais moi, j'ai envie de réussir dans ce métier. Et
pas comme un salarié qui regarde sa montre, mais comme un individu qui peut espérer
gravir des échelons, s'éclater dans la création, et qui sait, un jour, avoir sa propre
affaire. C'est pour ça que je suis dans la rue. Manifester |
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L'Hôtellerie n° 2769 Hebdo 16 Mai 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE